Par Adama Wade
La Société Nationale d’Investissement (SNI), holding privée qui détient des participations dans plusieurs sociétés au Maroc, vit un tournant. En effet, selon diverses informations, son PDG, Hassan Bouhemou, polytechnicien, diplômé aussi de l’Ecole des Mines de Paris, pourrait quitter cette entité à l’occasion du conseil d’administration prévu le 30 septembre prochain.
Après 13 ans de bons et loyaux services durant lesquels il aura assisté à une série de mutations allant du décroisement des participations avec les partenaires français (Auchan dans la grande distribution, Axa dans l’assurance) au désengagement en Bourse et à la fusion-absorption, le 31 décembre 2010, de l’ensemble ONA -SNI devenue aujourd’hui SNI avec une mission et un positionnement différents, Hassan Bouhemou est sur le départ.
L’histoire retiendra que c’est sous sa houlette que l’ONA sera radiée de la cote le 19 août 2010 après 65 ans de cotation, 13 ans pour la SNI, matérialisant ainsi la volonté de la famille royale, qui contrôle la SNI via la holding Siger, de se désengager des secteurs productics. En dépit des interrogations, l’opération fut un succès ayant permis d’engrager plus de 6 milliards de dirhams en devises dans un moment où le royaume en manquait.
M. Bouhemou tire sa revérence sans avoir pourtant achevé son dernier chantier: transformer la holding d’un fonds de participations industrielles en un fonds de participations stratégiques qui investit sur le long terme dans des secteurs stratégiques sans se mêler de la gestion quotidienne.
C’est ce changement radical de philosophie qui explique le désengagement de la holding de certaines de ses filiales au profit d’une cession par la Bourse ou d’une cession à d’autres entités. A la faveur de ce désengagement, le français Danone est passé de 29 à 67% dans le capital de la Centrale Laitière en juin 2012, l’indonésien Wilmar a mis la main sur le sucrier Cosumar.
Le français Lesieur a pris le contrôle de son homonyme marocain dans ce qui est présenté dans certains milieux financiers comme un changement de paradigme. En effet, le Maroc avait jusque-là privilégié la stratégie des champions nationaux à cheval sur les secteurs stratégiques, notamment les denrées de base. L’arrivée de Danone pourrait signifier la fin du gel de prix du lait et des produits laitiers que la Centale Laitière version SNI a toujours veillé à préserver, prenant sur lui les hausses brutales des intrants.
Parmi les opérations à venir, les désengagements dans Sotherma (eaux minérales) et dans Atttijariwafa Bank.. La banque devait selon la feuille de route du départ augmenter son flottant en Bourse et trouver un partenaire à long terme. Longtemps pressentie, la QNB a finalement jeté son dévolu sur Ecobank.
Pour le moins, le départ de Hassan Bouhemou n’est pas expliqué. S’agit-t-il de la résultante de tensions au sein du conseil d’administration? D’une volonté de se libérer pour convenances personnelles, afin de voler de ses propres ailes? Le mystère demeure de la part de celui que le journal français Le Point estampillait « Trésorier du Roi » dans un article aproximatif datant du 24 juillet 2014 et qui a valu une mise au point en bonne et due forme à cet hebdomadaire.
Si comme le déclare le site marocain 360.ma, M. Bouhemou sera remplacé par Hassan Ouriagli, 52 ans, ancien directeur délégué de l’ex ONA, alors il s’agirait juste d’un changement d’homme et non de culture. Plusieurs fois pressenti à Attijariwafa Bank, celui qui était numéro deux de l’ONA sera finalement envoyé à Paris à la tête d’Optorg, en « ressource de réserve » comme dirait l’autre. Methodique, d’une discipline militaire, M. Ouriagli est diplômé de l’Ecole polytechnique de Paris et de l’Ecole nationale des ponts et chaussées.