Présidé par l’ancien secrétaire général de l’ONU, Koffi Annan, l’African ProgressPanel publie son rapport sur l’Etat de l’Afrique durant le mois de mai. Celui qui vient d’être diffusé ce vendredi 10 mai met l’accent sur le gap entre les ressources du continent et sa pauvreté criante. Il n’y a, à lire ce rapport, que deux voies qui s’ouvrent devant les décideurs africains: investir les recettes tirées des ressources naturelles dans leurs populations pour créer des emplois et générer des emplois et des opportunités pour les millions d’individus, des générations actuelles et futures. Ou bien, gaspiller ces s ressources en permettant une croissance sans emplois et en laissant les inégalités s’installer.
Dans de nombreux pays d’Afrique, les revenus issus des ressources naturelles creusent le fossé entre les riches et les pauvres. Bien des progrès ont été accomplis, mais une décennie de croissance à un taux très impressionnant n’a pas amené d’améliorations comparables dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la nutrition.
L’Africa Progress Panel est convaincu que l’Afrique peut mieux gérer ses vastes richesses en ressources naturelles pour améliorer la vie de ses populations, en définissant des agendas nationaux ambitieux en faveur du renforcement de la transparence et de la responsabilité.
Toutefois, l’évasion et les exonérations fiscales à l’échelle internationale, la corruption et une faible gouvernance constituent des défis majeurs. Le rapport salue donc la volonté de la présidence actuelle du G8, assurée par le Royaume-Uni, ainsi que des autres gouvernements, de mettre la fiscalité et la transparence au cœur du dialogue de cette année. Il invite tous les pays de l’OCDE à reconnaître le coût de l’inaction dans ce domaine critique. Les pertes subies par l’Afrique sous la forme de sorties de capitaux illicites représentent deux fois plus que ce qu’elle reçoit en aide internationale. L’Africa Progress Panel trouve invraisemblable que certaines entreprises, souvent soutenues par des fonctionnaires malhonnêtes, pratiquent une évasion fiscale contraire à l’éthique et se servent des prix de transfert et de sociétés anonymes pour maximiser leurs profits, alors que des millions d’Africains sont privés de l’accès à une nutrition adéquate, à la santé et à l’éducation.
Le rapport examine en détail cinq contrats conclus entre 2010 et 2012, qui ont coûté à la République démocratique du Congo plus d’1,3 milliard de dollars de recettes en raison de la sous-évaluation des actifs et des ventes à des investisseurs étrangers. Cette somme représente le double du budget annuel alloué à la santé et à l’éducation dans un pays qui présente l’un des taux de mortalité infantile les plus élevés au monde et qui compte sept millions d’enfants déscolarisés.
Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations unies et Président de l’Africa Progress Panel, déclare : « Les exonérations d’impôts et l’évasion fiscale sont des problèmes de dimension mondiale qui nous affectent tous. Pour les gouvernements du G8, cela correspond à une perte de revenus. Mais en Afrique, il y a des répercussions directes sur la vie des mères et des enfants. Dans le monde entier, des millions de citoyens ont aujourd’hui besoin que leurs leaders réagissent et prennent les devants. Heureusement, il semble que l’élan en faveur du changement s’accélère. »
Le rapport indique que les partenaires, bien que différents, ont des objectifs similaires et des intérêts qui se rejoignent. Créer la confiance est plus difficile que de changer les politiques, mais c’est une condition essentielle au succès d’une réforme politique. Le rapport de cette année définit un agenda commun pour le changement :
- · Les gouvernements africains doivent améliorer leur gouvernance et renforcer leur capacité nationale à gérer les industries extractives dans le cadre de leur stratégie économique et de développement au sens large ;
- · Les gouvernements africains doivent placer la transparence et la responsabilité au cœur de leurs politiques en matière de ressources naturelles, garantir à leurs citoyens une juste part des recettes issues des ressources et répartir les bénéfices tirés de ces recettes au moyen de dépenses publiques équitables ;
- · La communauté internationale devrait se baser sur la Loi Dodd-Frank et sur la législation comparable appliquée par l’UE pour développer une norme mondiale sur la transparence et la divulgation, mettre au point une riposte multilatérale crédible et efficace à l’évasion fiscale et lutter contre le blanchiment d’argent et contre les sociétés fictives anonymes ;
- · Les entreprises internationales doivent appliquer les meilleures pratiques en matière de transparence, aider à renforcer les capacités nationales, acheter davantage de produits et de services au niveau local et renforcer les normes dans tous les domaines de la responsabilité des entreprises ;
- · La société civile doit renforcer ses capacités et continuer à demander aux gouvernements et aux entreprises de rendre des comptes.
Graça Machel, Présidente de la Fondation pour le développement communautaire, Fondatrice du Graça Machel Trust et membre de l’Africa Progress Panel, déclare : « Ce rapport apporte une contribution essentielle aux débats sur la richesse de l’Afrique en ressources naturelles. Si les recommandations qu’il contient sont suivies, l’Afrique pourra accélérer ses progrès afin d’atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement. Davantage d’enfants iront à l’école, moins de femmes mourront en donnant naissance à leurs enfants, plus d’enfants survivront jusqu’à l’âge adulte. »
Strive Masiyiwa, Président et fondateur d’Econet Wireless et membre de l’Africa Progress Panel, affirme : « Bien que certaines grandes entreprises fassent preuve d’un leadership remarquable sur le plan de la transparence, d’autres affichent un mépris total pour l’éthique et pour la vie humaine. En dupant le système, ils compliquent la tâche des sociétés honnêtes. »
Pour Linah Mohohlo, Gouverneur de la Banque centrale du Botswana et membre de l’Africa Progress Panel, « le principal enseignement tiré par le Botswana est que les ressources naturelles de l’Afrique appartiennent au peuple. Ainsi, nos diamants sont devenus le pivot de notre succès. »