Au delà de la polémique née outre Atlantique sur le coût de ce périple africain de Barack Obama, au delà des 100 millions de dollars dépensés, en partie pour combler le gap de sécurité des Etats africains, le temps d’un séjour, au delà des 50 véhicules dont 14 limousines officielles déployés, du safari maintenu ou annulé en Tanzanie, du mouvement réel et fantasmé des barbouzes, au delà de la prime de la démocratie que justifierait le choix des trois pays visités (Sénégal, Tanzanie et Afrique du Sud), au delà de l’émotion suscitée par l’arrivée de cette célèbre famille sur le tarmac de l’aéroport Léopond Sedar Senghor, au delà de la classique visite de l’Ile de Gorée, que retenir de cette semaine africaine de celui que l’on compare souvent au président Kennedy?
il y a ceux, nombreux parmi les intellectuels africains, qui reprochent au métis originaire du Kenya de ne rien avoir fait pour le continent, oubliant qu’il est avant tout le 44e président des Etats Unis, élu par le peuple d’Amérique pour défendre leurs intérêts au mieux. Pour ceux là, inconsolables, tout est à ramener à l’aune des réalisations chiffrées. Bill Clinton avait lancé l’AGOA, George Bush a consacré 15 milliards de dollars à la lutte contre le paludisme et le Sida dans l’une des rares parties du monde où il pouvait être accueilli sans jets de babouches. Alors, disent-ils, qu’a fait Obama pour l’Afrique?
D’autres, parmi nos leaders d’opinions, relèvent, parfois sur un ton de reproche, que Barack Hussein Obama est accompagné par 600 hommes d’affaires américains. Quand il ne serait pas venu pour les affaires, l’ancien président de la ligue des Etudiants de Harward voudrait contrer stratégiquement la Chine, premier partenaire commercial de l’Afrique depuis 2009, ou encore trouver un emplacement définitif pour la fameuse base militaire américaine.
Si tous ces motifs de voyages sont intellectuellement fondés, il n’en demeure pas moins que Barack Obama par lui même est un message adressé à l’Afrique. Lui, américain mais dont le père est étranger, est devenu président. Quel est donc le pays d’Afrique ou un citoyen, fils d’un étranger, peut postuler à la présidence d’un conseil municipal? L’ancien sénateur de Chicago n’aurait jamais pu vivre son ascension dans un des 54 pays africains, là où souvent les codes de nationalité privilégient le droit du sang, l’ethnicité et la dictature des origines, en lieu et place de la citoyenneté fondée sur les valeurs, ouverte et accessible à tous dans la grande Amérique.
Notre fierté d’ africain de voir un de nos fils à la tête d’un pays qui, il y a seulement 50 ans, n’acceptait pas qu’un homme de couleur prenne le même bus qu’un blanc, doit nous pousser à une introspection de nous même sur notre rapport à la tolérance, à l’étranger et surtout sur notre rapport à la Nation. Peut-on être fier de Barack Obama tout en refusant toute possibilité d »intégration aux citoyens d’origine étrangère? That is the question!
Adama Wade