La tonne de riz qui quitte Bangkok ou Ho chi Minh en direction de l’Afrique de l’Ouest n’excède pas 500 dollars FOB. Mais, trés vite, les enchères montent. Le trader Genevois (la condition d’appartenance à la cité du Calvin n’étant pas, bien évidemment, siné qua none pour exercer ce vieux métier) , parfaitement au courant des tendances des marchés locaux, des niveaux de stock et des prévisions de récolte, charge le navire envers deux destinations optionnelles.
Plusieurs bateaux flottants sillonnent ainsi la côte ouest africaine à l’affût de la bonne affaire; C’est au large, à la rade ou à même le port, ou encore dans les silos déjà aménagés par les traders, que les « importateurs’ africains se ravitaillent en différents lots (ils n’ont pas les moyens, morcellés qu’ils sont, de prétendre à plus), encadrés par les banques (crédit documentaire) et via des tiers détenteurs.
La marchandise franchit ensuite la douane (frais de 10%), en passant par différentes étapes formant l’un des coûts de transit portuaire les plus chers au monde. Du grossiste au sémi grossiste et au détaillant, le riz poursuit son chemin le long des intermédiaires jaloux de leurs marges secrètes jusqu’ à l’assiette du consommateur. Celui-ci, s’il est sénégalais, achète en moyenne son riz brisé à 100% à 500 FCFA le kilo, subventionné ou pas. Ce qui nous ramène à 1006 dollars la tonne à l’arrivée.
Ainsi, le temps d’une expédition, la tonne de riz a doublé. Tout se passe comme si pour chaque tonne parvenant au consommateur, une tonne est restée entre les intermédiaires. Dans ces conditions de conforts de rentabilité, comment pousser les détenteurs de capitaux à venir investir dans la production d’un riz local aux débouchées incertaines? Comment les inciter à faire confiance à un riz local boudé d’avance par le consommateur sénégalais? Comment les encourager à investir dans l’aménagement et la transformation quand le coût du kilowatt est aussi prohibitif? Si le sénégalais adore le riz parfumé importé, le trader suisse vénère cet aliment qui lui offre des marges spectaculaire et secrètes.
L’Afrique qui importe 10 millions de tonnes en moyenne par an pourrait-elle continuer éternellement à vivre dans le luxe de la dépendance? Il est temps que le Nigeria et le Sénégal, solidement installés dans le top ten mondial des plus gros importateurs de riz, pensent à la restructuration de leur chaîne à l’import. Ce n’est pas sorcier, d’autres l’ont fait et réussi à économiser des milliards.
Adama Wade
2 commentaires
Le gouffre à millliards que constitue l’importation de riz durera jusqu’à quand ?
Peut etre quand on aura atteint la barre fatidique de 1500.000 tonnes de l’importation d’une denrée que l’on consomme brute sans se soucier d’en tirer de la valeur ajoutée on aura atteint le poiint sans retour de la dépendance
trés bon article vs avez pâtfaitement raison