Par Alpha Wouri , Conakry
Sourire aux lèvres, le professeur Alpha Condé, a accompli ses devoirs civiques le samedi aux environs de 11 heures 30 au Collège 1, Boulbinet, BV N°2. » Visiblement soulagé, l’homme politique dégaine à l’adresse de la nuée de journalistes qui guettaient une déclaration: « J’avais dit de ne rien craindre que tout se passerait bien et que la Guinée ira de l’avant. Ils (les Guinéens, NDLR) n’ont pas à craindre les menaces de déstabilisation. Le gouvernement a pris toutes les dispositions ».
Malgré les assurances présidentielles, la Guinée est sur le qui-vive. Trois jours avant la tenue des législatives et municipales, soit le 25 septembre, un étrange article du Canard enchaîné « révélait » un coup d’Etat rampant qui serait perpétré par un homme d’affaires, franco-israélien, mécontent du retrait d’un permis illégalement acquis du temps de Lansana Conté.
L’article qui parle du groupe BSGR (voir Financial Afrik à propos du différend opposant ce groupe au gouvernement d’Alpha Condé ) évoque des sources de la CIA et de la française DGSN (communément appelée piscine). Curieux que ces deux organes spécialisés dans le renseignement et l’action en dehors de leurs territoires respectifs, souvent ennemis, soient d’accords sur le cas de la Guinée, pays, il est vrai, où tout fonctionne à l’envers.
Les rumeurs de putsch, à 48 heures d’un scrutin majeur, éternellement repoussé, ont encore plus alourdi l’atmosphère politique à Conakry. Aussi, la tenue du scrutin, même dans un calme relatif, ne semble pas avoir désamorcé la bombe qui plane sur l’une des villes les plus pauvres d’Afrique en termes d’infrastructures et de bien être. « Qu’on me demande pas que la Guinée soit comme le Danemark en trois ans », s’excuse le président Condé, en évoquant son bilan devant quelques journalistes triés sur le volet.
Et de faire porter le chapeau à ses prédécesseurs qui n’ont rien fait en cinquante ans. Fondant son action sur la renégociation des contrats miniers, le président peut se targuer d’avoir mis au pas de grands groupes qui s’étaient octroyés des concessions en toute illégalité. L’Etat guinéen redevient méthodiquement maître de son sous sol. Il faudra encore du temps pour que ces réformes courageuses soient ressenties par le citoyen lambda. En attendant, BSGR peut crier sa colère. « Monsieur Beny STEINMETZ et la société BSG, confrontés à un nouvel épisode de la campagne de dénigrement organisée par le pouvoir guinéen, ont donc, bien évidemment, décidé de poursuivre Le Canard Enchaîné devant le Tribunal correctionnel de Paris, ainsi que toute autre publication qui se risquerait à diffuser toute ou partie de ces insinuations calomnieuses, infamantes et infondées », lit-on dans un communiqué rageur. Mais qui y prêtera attention dans un pays otage d’un scénario électoral écrit d’avance à entendre, bien avant la proclamation des résultats, les cris de victoire d’un camp présidentiel sûr de lui et les cris d’au voleur d’une opposition méfiante?
En tout cas, le coup d’Etat, vrai ou faux, a permis de mobiliser d’importants dispositifs militaires de Conakry à la frontière sierra léonaise. D’importants mouvements de troupes et de blindés qui rappellent un coup d’Etat. Ainsi va la Guinée Conakry. Un 28 septembre ne chasse pas un autre.