L’économie mondiale tousse et c’est toujours à l’Afrique que l’on demande d’aller se faire soigner. Il suffit que le FMI énonce à la baisse ses prévisions de croissance pour 2013 et 2014 et que quelques multinationales annoncent des résultats financiers en recul dans les pays émergents, pour que le continent et ses faiblesses soient pointés du doigt.
Dernière frontière du développement un jour, et éternelle mauvaise élève le lendemain. C’est un peu trop facile. L’Afrique est bien ancrée dans le développement et les groupes internationaux présents sur le continent ne sont pas prêts de baisser leur rideau en Afrique. Mais avec une économie mondiale sous tension, une poignée de statistiques négatives suffisent encore à mettre en doute le potentiel économique des pays émergents en général et de l’Afrique en particulier.
Ces derniers jours, le Fonds monétaire international (FMI) a ainsi révisé à la baisse ses prévisions de croissance pour l’économie mondiale, tombant à 2,9% en 2013 contre une prévision de 3,2% établie en juillet. La raison ? Une diminution sensible de la progression du PIB des économies émergentes. Ces dernières ne croîtront en 2013 que de 4,5%. Soit 0,5 point de moins que ce qu’avait prévu le FMI cet été. Constat identique pour 2014 avec une prévision de croissance mondiale pour 2014 ramené à 3,6% contre 3,8 %. Là encore, c’est une moindre performance attendue des économies émergentes qui justifie cette révision à la baisse. Leur activité ne devrait progresser « que » de 5,1% l’an prochain, soit 0,4 point de moins que les prévisions initiales.
Des groupes comme Unilever ont immédiatement averti de résultats à la baisse en raison du ralentissement de la croissance des pays émergents qui « s’est accéléré » au troisième trimestre. De fait, pour le fabricant de produits d’entretien (Omo, etc.) d’hygiène (Axe, Rexona, etc.) et alimentaires (Knorr, Lipton, etc.) qui avait davantage misé sur les pays émergents que le n°1 mondial Procter & Gamble, les années se suivent mais ne se ressemblent pas. En 2012, le groupe anglo-néerlandais, n°2 mondial, a réalisé 57% de son activité dans les pays émergents. Ce qui lui a permis d’enregistrer une éclatante croissance de son chiffre d’affaires de 10,5%, tout en échappant à la crise européenne. 2014 s’annonce moins flamboyant pour Unilever, ses ventes ne progresseront que de 3% à 4 %.
Mais la contre-performance d’Unilever et d’autres groupes dans les économies en développement est due d’abord à l’affaiblissement de plusieurs devises. En Inde et en Indonésie elles ont respectivement chuté de 5% et 14% par rapport à l’euro au troisième trimestre 2013. L’effet de change vient s’ajouter au ralentissement de la croissance. Faut-il pour autant condamner les économies de ces pays dès le moindre soubresaut ? Oublier leur potentiel de développement serait une grave erreur. Sur le long terme, des groupes comme Unilever ont toutes les chances de connaître davantage de croissance dans les économies émergentes que dans les pays développés.
Des multinationales ne s’y trompent pas. Le 2 octobre, Adidas a inauguré un magasin de 500 m² à Rabat. Le 9 octobre, le groupe Nissan a annoncé une usine d’assemblage à Lagos, au Nigeria, dès le printemps 2014 et une autre pour sa marque Datsun, à Pretoria, fin 2014. Et le groupe du prêt-à-porter suédois H&M ouvrira son premier magasin au sud du Sahara en 2015, à Johannesburg. Certains groupes ont décidément plus confiance que d’autres dans l’avenir du continent africain.
Jean-Michel Meyer