Dix mois de préparation pour changer de ton, de logique et de stratégie. On le jure à l’Elysée et à Bercy, la « Françafrique » de papa c’est fini. Et bien fini cette fois. Le « sommet de l’Elysée pour la paix et la sécurité en Afrique », qui se tiendra à Paris cette semaine, en apportera la preuve, assure-t-on dans le cercle présidentiel.
En matière de paix et de sécurité, ou même de projet de défense commune sur le continent, «nous voulons soutenir les initiatives portées par les Africains et voir ce que la France peut apporte », souligne-t-on à l’Elysée.
Paris fait profil bas. « Avec nos partenaires africains nous avons fait le bilan de tous les sommets entre la France et l’Afrique pour en déterminer les points positifs et négatifs. Nous en avons tiré les leçons pour faire différemment », promet un conseiller de François Hollande. Faire différemment ? « Ce n’est plus à la France de décider seule d’un sommet. Nous avons mené de très larges consultations avec les pays africains qui nous ont dit d’arrêter de discuter de thèmes généraux et abstraits sur l’état du monde qui se décident ailleurs comme aux Nations Unies. Les Africains veulent parler avec nous de partenariats, de projets que l’on peut mener ensemble », précise ce même conseiller.
Un air de déjà-vu. De déjà entendu. Il n’y pas si longtemps que cela. Comme au sommet de Nice en 2010, avec Nicolas Sarkozy en maître de cérémonie. Là aussi la « Françafrique » devait être reléguée dans les archives de l’histoire. On a vu par la suite que les réseaux officieux, les conseillers occultes et les émissaires en tout genre ont poursuivi sans contraintes leurs « missions », continuant à nourrir la vieille machine tant décriée.
En 2013, forcément, tout va changer, assure-t-on à l’Elysée. Sur 54 invitations lancées, une quarantaine de chefs d’Etats et de gouvernements devrait faire le déplacement à Paris. Sous le coup de sanctions internationales, les présidents du Zimbabwe et du Soudan n’ont pas été conviés. Ainsi que quatre dirigeants (Madagascar, Egypte, RCA et Guinée Bissau) considérés comme personae non grata par Bruxelles pour avoir fomenté et lancé des coups d’Etats.
Ce changement promis d’approche sera d’abord perceptible au ministère de l’Economie et des Finances d’abord, à l’occasion d’un colloque organisé la journée du 4 décembre sur le thème : « pour un nouveau modèle de partenariat économique entre la France et l’Afrique. »
« Nous avons voulu voir grand, neuf et positif », explique un conseiller du ministère. Qu’on se le dise : le pré-carré africain de la France est envahi par les hautes herbes. En friches. Pour ce sommet, Paris a invité en force l’Afrique anglophone et lusophone. Un même message sera martelé par les officiels français : « nous voulons basculer vers un modèle économique qui n’est plus fondé sur les stocks, les rentes ou les situations acquises mais sur les flux économiques entre la France et l’Afrique. Il s’agit de créer une dynamique dans les deux sens ».
La France promet un nouveau visage. Mais trois jours ne suffiront pas à effacer le parfum de la « Françafrique. » Il faudra davantage de temps à Paris pour convaincre de sa bonne volonté dans ce domaine.
Jean-Michel Meyer