Le paradigme des banques centrales dans le contexte de développement
Important ordre du jour lors de la réunion des banques centrales africaines à Abuja, jeudi 27 mars. Cette rencontre organisée au siège de la Central bank of Nigeria (CBN) en marge de la 7e conférence des ministres africains des finances (1400 participants, un record) a revisité la version finance de la querelle des anciens et des modernes.
Adama Wade et Ibrahima Dia, Abuja
«Quel est le rôle de la banque centrale dans le contexte du développement : surveiller l’inflation et maintenir la stabilité ou jouer le rôle de stimulateur de l’économie » ?, s’interroge Sarah Alade, gouverneur de la CBN par intérim (photo). Dans un environnement de chômage élevé et de fortes pressions sociales, faut-il redéfinir le mandat de la Banque Centrale, poursuit l’intérimaire qui a récemment remplacé Sanusi Lamido ?
Participant à cette rencontre, Carlos Lopes, secrétaire général de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) ( ici, à gauche de Mme Aladé sur cette photo de famille des gouverneurs des banques centrales africaines prise à Abuja le 27 mars) a affirmé que le consensus entre la stabilité et le développement est possible. En effet, rappelle le bissau guinéen, la banque centrale doit stimuler le développement sans renier à son mandat de stabilisateur de l’économie à travers la lutte contre l’inflation. «En Afrique, nous avons besoin de créer 5 millions de postes de travail par an pour contenir le chômage, notamment celui des jeunes », explique-t-il en mettant l’accent sur ce qu’il estime être les trois fonctions clés de la banque centrale : faciliter l’accès au crédit à travers les réformes, stabiliser les prix et stimuler le développement économique.
Actuellement, la plupart des fux financiers gérés (environ 60%) par l’exportation du pétrole & gaz et des minerais africains ne sont pas intermédiés par des banques africaines. Ces transactions juteuses se font à travers des banques offshores, privant aux banques commerciales africaines une manne potentielle de leurs revenus. Sur cette question, la concertation des banques centrales peut grandement contribuer à inverser la donne. L’énorme déficit des infrastructures en Afrique ajouté au chômage et à la pauvreté militent pour un nouveau paradigme des banques centrales africaines. Longtemps prisonnières de la théorie économique classiques, les institutions centrales africaines sont invitées à explorer les nouvelles possibilités financières introduites par la biométrie (l’introduction de la carte biométrique a accéléré la bancarisartion) , le M Banking (qui a réduit de 7% la population non bancable au Nigeria et provoqué une révolution aux Phillipines en termes d’inclusion financière). La solution est dans l’innovation et non la posture conservatrice. Le consensus recherché passe par la voie médiane entre le rôle de la FED américaine , interventionniste et stimulatrice et la BCE européenne, neutre et occupée à la stabilité des prix. Il semble qu’entre ces deux institutions, la ligne de démarcation soit devenue floue depuis la crise de 2008.