«Notre vocation première est d’accompagner nos clients dans tous leurs besoins »
Aux commandes de la Chanas depuis le 20 septembre 2013, Henri Frédéric Ewélé, actuaire de formation, a été désigné directeur général de Chanas dans une short list comprenant quatre candidats. Diplômé d’études universitaires générales en Maths-physiques-Chimie à l’Université Claude Bernard de Lyon I, en 1981, M. Ewélé y a ensuite décroché le diplôme de l’Institut de Sciences financières et d’assurances (ISFA) en 1984. Entrtien Ancien membre de la Fédération française des actuaires et de l’association internationale des actuaires, membre fondateur et premier secrétaire général de l’Association des Autorités Africaines de Contrôle des Assurances au sein de l’organisation Africaine des Assurances (OAA), de 1989 à 1991, ce représentant de l’ethnie Douala est président de la Fédération des Actuaires Africains des marchés de la FANAF depuis 2008. Administrateur suppléant de la société Africaine de réassurance Africa-Re depuis 2012, Henri Ewélé dispose aussi d’une solide expérience dans l’administration centrale camerounaise. Au ministère des Finances, il a gravi tous les échelons pour officier de 1988 à 1991 au poste de Chef de Service du Contrôle des Entreprises d’Assurances. Son histoire avec Chanas remonte en 2005 en tant que contrôleur général, un des principaux collaborateurs de Jacqueline Casalegno en matière de contrôle, d’audit, de management, de production de sinistre, de finance et de réassurance. Depuis 2012 et jusqu’à sa nomination à la direction générale l’automne dernier, Henri Ewélé était directeur général adjoint en charge de la technique. Entretien.
Financial Afrik: Vous êtes directeur général de la Chanas depuis septembre 2013. Quelles en sont désormais les grandes orientations du groupe ?
Henri Ewelé: Le conseil d’administration de Chanas a placé sa confiance en ma personne pour à la fois consolider les acquis et donner un nouvel élan à Chanas, une compagnie leader qui, en soixante ans d’expérience, a vécu tous les cas de figure de sinistre y compris celle, redoutée, d’une catastrophe aérienne. Le sinistre de l’avion Camair qui a crashé en 2000 a été évalué à 49 milliards de FCFA. Le marché a payé au total, cette année là, 32 milliards de FCFA. Un tel risque ne pouvait pas être intégralement assuré au Cameroun.
Votre groupe est-il toujours leader du marché ?
Certainement. Sur le marché IARDT, nous sommes largement devant avec 23 milliards de FCFA d’émissions. Le deuxième est à 14 milliards de FCFA. La situation est donc nette entre le premier et le deuxième, beaucoup moins entre les poursuivants qui se suivent dans un mouchoir de poche. Ce rôle de leader que nous assumons est à consolider. Nous avons besoin de moderniser nos procédures, de mettre en place un système d’information pertinent et efficace, une direction de communication et marketing. Nous n’en comptions pas jusqu’ à présent.
Comme toute vieille entreprise, Chanas ne gonfle-t-il pas ses états bilantiels par des immobilisations ?
Cela devrait être le cas. Mais je vous ferai remarquer que nous avons des immeubles hérités de la defunte Socar exclus aujourd’hui de la représentation. Nous avons mis beaucoup de temps à muter les titres fonciers, et certains ne le sont toujours pas d’ailleurs.
Certains de vos concurrents estiment qu’il y a beaucoup de fronting et des acceptations dans vos chiffres. Que leur répondez-vous ?
Le fronting, qui fait partie des activités de l’assureur, est accepté par la loi dans certaines conditions clairement définies. Idem pour les acceptations. On ne le donne pas à n’importe qui. Nous sommes un petit marché qui ne peut absorber tous les risques comme ceux relatifs au transport. Placer une partie des risques dans les proportions définies par la loi nous paraît judicieux. Nous assurons les grands risques du Cameroun depuis plusieurs décennies. Notre portefeuille est solide. Nous devons maintenant allez plus loin pour proposer plus de produits à nos clients et au marché en général, ce que nous allons faire puisque nous avons ces produits.
Continuerez-vous à gérer le marché en direct sans intermédiaire comme ce fut toujours le cas sous la direction de Jacqueline Casalégno ?
Certes, il y aura des changements dictés par le marché et nos priorités selon nos orientations stratégiques validées par le conseil d’administration. Mme Casalegno a hissé Chanas au pinacle. Nous saluons unanimement sa contribution à ce succès. Cependant, notre succès peut renfermer les germes de sa faiblesse. Nous gérions le marché en direct jusqu’à présent. D’où une forte marge de progression en faisant recours au levier des intermédiaires. Mais avant d’aller vers quoi que ce soit, nous avons besoin de nous restructurer pour aller de l’avant. Nous sommes un groupe solide pas sous capitalisé mais qui a besoin de réajustements forts. Il y a des efforts à faire pour diminuer nos frais généraux mais Chanas n’est pas sous capitalisé. La marge de solvabilité et les fonds propres de la Chanas sont largement au dessus du capital minimum. Deuxièmement, les actifs admis en représentation avec le respect des règles de dispersion et des plafonds à ne pas dépasser ne peuvent que nous renforcer.
Allez-vous commencer votre redéploiement en attaquant le marché de l’assurance-vie au Cameroun ou en allant à l’international ?
L’assurance est par essence une activité internationale. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a des choix à faire et des décisions à prendre. Notre vocation naturelle est d’accompagner nos clients dans tous leurs besoins, à l’intérieur du Cameroun comme à l’extérieur. L’assurance-vie est une suite logique à nos activités tout comme l’est, à juste titre, l’implantation dans notre sous-région naturelle de l’Afrique de l’Ouest et du Centre. Je dirai compte tenu de notre potentiel que nous avons perdu beaucoup de temps à ce niveau. Nous avons hésité à un moment où il fallait allait de l’avant. Certainement, c’est dû à un reflexe de répli sur ses acquis. Chanas est malade de ce qui a fait sa force.
L’expansion internationale est donc prioritaire ?
L’expansion ? Nous en avons la passion et la volonté. Je dirai l’Afrique centrale d’abord. Nous sommes déjà présents chez nos voisins et frères en Guinée Equatoriale.
Beaucoup de groupes s’intéressent à Chanas. Quels sont ces groupes ?
Nous avons reçu des manifestations d’intérêt de plusieurs groupes africains et autres. Je ne voudrai pas citer de nom mais je peux dire que Chanas ne laisse personne indifférent. Maintenant, il nous appartient d’apprécier en interne la justesse de tels partenariats et le bien fondé de leurs logiques. Nous ne sommes pas un groupe en difficulté ou à la recherche de fonds, ce qui nous laisse le loisir de choisir.
Quel est le gendre idéal ?
Difficile à dire. Notre conseil d’administration a un large choix sur lequel je ne peux point faire de commentaires au risque de ne pas rester à ma place. Ce qui est certain c’est qu’il analysera les offres avec perspicacité et veillera à ce que les intérêts de la société soient servis au mieux, et que le dynamisme bien connu des entrepreneurs du Cameroun et de la sous-région y trouvent leur compte, au-delà des nos différences culturelles plutôt enrichissantes qu’handicapantes. Chez nous en Afrique centrale, peuple de la forêt, la méfiance est un trait de caractère car chaque arbre rencontré dans la forêt peut être une menace ou une opportunité. A nous de saisir les opportunités. Il n’est d’ailleurs pas interdit de penser que Chanas ambitionne de construire avec des sociétés sœurs un projet important avec lequel il faudra compter. Les jeux sont ouverts !