Président Directeur Général Axa Assurance Maroc en charge de l’Afrique subsaharienne, Michel Hascoët (à gauche) évoque la stratégie africaine du groupe Axa. Epaulé par Alioune Ndour Diouf (à droite), Directeur des Opérations Afrique subsaharienne, le groupe compte passer à l’offensive à travers des acquisitions et des demandes d’agrément. Entretien.
Tout d’abord, monsieur le directeur, éclairez nos lecteurs sur la stratégie Axa en Afrique subsaharienne. Y-a-t-il un avenir africain pour Axa ?
De façon très solennelle, je peux vous dire que, dix ans après la vente de nos filiales de l’assurance vie en Afrique, les choses ont bien changé. Axa avait décidé de se consacrer à cette époque-là sur les quatre pays les plus significatifs en termes de parts de marché, en l’occurrence la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Cameroun et le Gabon. Sur la période 2004-2010, cette question du départ nous a été posée à maintes reprises. La meilleure réponse est de constater notre présence forte aujourd’hui à cette assemblée générale et, surtout de rappeler les propos de notre PDG, Henri de Castries, lequel, lors de sa tournée dans les quatre pays cités, l’année dernière, a réaffirmé sans ambiguité «notre volonté de rester non seulement présent en Afrique subsaharienne mais de s’y développer ». Non seulement Axa va être présent, mais Axa affirme sa volonté forte de se développer dans une zone où elle est opère depuis 80 ans. On se développe par la croissance interne, les capacités de souscription plus importantes données aux sociétés, l’inclusion des risques périphériques aux risques pétroliers, etc. La croissance de nos filiales n’est donc pas bridée. Par conséquent, nous allons faire de telle sorte à avoir une croissance interne forte. Nous sommes à l’écoute du marché pour étudier des opportunités d’acquisition dans ces pays-là. Nous regardons aussi les pays dans lesquels le groupe Axa n’est pas présent, en Afrique anglophone. Nous suivons de très près l’évolution des marchés ghanéens et nigérians. En ce moment, nous recevons des propositions d’installation dans un certain nombre de pays.
Est-ce que fondamentalement la cession de vos filiales –vie en 2004 n’était pas une erreur d’appréciation puisqu’on voit aujourd’hui que la branche vie progresse vite en Afrique ?
Dix ans après, il est facile de juger. A l’époque, en 2004, il ne faut pas oublier que nous sortions de la grande crise. C’était le grand marasme sur tous les marchés d’assurance vie avec un retournement considérable de la profitabilité en vie en Europe. Septembre 2011 n’était pas si loin. La vie représentait 60% du chiffre d’affaires du groupe Axa. Compte tenu de la faiblesse et de la possibilité de trouver des supports pour adosser les placements en assurance vie, la sagesse de l’époque a voulu que nous cédions ces filiales-vie en Afrique à d’autres opérateurs. Nous ne regrettons pas ces décisions.
Parmi les installations ou acquisitions futures, y-a-t-il des agréments en assurance-vie ?
Dans notre volonté de développement, nous ne recherchons pas de compagnie vie. Nous recherchons des compagnies IARD. Par contre, c’est tout à fait possible que nous redemandions des agréments en assurance-vie dans les pays où nous sommes présents. Parce qu’il y a toute une partie de l’assurance des personnes répondant à de réels besoins des populations africaines qui nous intéresse : c’est tout ce qui touche à la protection, aux assurances décès etc. Nous sommes en train de préparer les dossiers pour redemander des agréments dans chacun des pays où nous sommes présents pour faire essentiellement de la protection.
Quel est le classement d’Axa au niveau de la zone CIMA. Etes-vous satisfait de votre rang ?
Axa est le premier assureur mondial, et aussi la première marque mondiale d’assurance. Dans la zone CIMA, nous occupons notre rang en notoriété et en crédibilité mais pas en chiffre d’affaires. Nous vivons avec. C’est la conséquence de notre politique, de nos choix. Notre stratégie n’est pas de redevenir leader dans la zone CIMA mais d’y augmenter nos parts de marché. Ce n’est pas dans cette zone que nous trouverons des sociétés à racheter. Notre stratégie c’est de regarder le Ghana, le Nigeria, l’Angola , l’Afrique de l’Est et l’Ethiopie.
Sur le Maroc, le décroisement Axa ONA a-t-il été bien digéré ?
En 2007, Axa et ONA se sont séparés à l’amiable. ONA rachète Attijariwafa Bank dans laquelle il y a la compagnie Wafa Assurance. Nous perdons 30% de notre chiffre d’affaires au profit de Wafa Assurances. A l’époque, nous étions le premier assureur du Maroc. A la fin 2013, nous avons le même chiffre d’affaires que Wafa Assurance et RMA Wataniya en assurances dommages. La différence se fait en bancassurance. Bien que nous gérions un gros portefeuille de retraite collective, nous ne sommes pas un assureur vie. Nous ne sommes pas adossés à une banque mais nous sommes quasiment au même niveau que les groupes Wafa Assurances et RMA Wayanya. Et sur la partie risque d’entreprise, nous sommes devant ces deux groupes.
La gestion de l’Afrique subsaharienne depuis le Maroc découle-t-il d’un choix durable ?
Le Maroc et le Sénégal constituent le binôme de l’axe de développement en Afrique subsaharienne. Le Maroc est appelé à devenir totalement le hub de nos activités en Afrique.
Il a été question de l’article 13 et de la date butoir du 31 décembre 2014. Etes-vous prêts ?
Effectivement, nous avons modifié les règles d’encaissement et fait tout ce qu’il fallait pour recouvrer le maximum de créances en souffrance. Nous avons annulé les créances non recouvrables, soit à peu près 5 milliards de FCFA. Nos chiffres d’affaires sont réels. Nous souhaitons que l’ensemble des acteurs observent la même diligence vis-à-vis de l’article 13. Il y avait des efforts à faire. Il est bien entendu hors de question que nous acceptions un report de l’application de toutes les dispositions de l’article 13 au-delà du 31 décembre 2014
Comment voyez-vous l’évolution du marché des assurances dans votre pré-carré ?
La reprise économique est très forte en Côte d’Ivoire. En 2013, Axa Côte d’Ivoire a fait une croissance supérieure à 20% en concordance avec la croissance du pays. Nous bénéficions pleinement de la reprise dans ce pays. Au Cameroun, notre chiffre d’affaires n’a pas été marqué par un développement considérable. Le Gabon a eu une croissance remarquable (30%) en 2013 grâce à l’ouverture d’Axa sur certaines souscriptions, sur la santé et l’automobile et des sociétés qui gravitent autour du secteur pétrolier. Au Sénégal, plus de 40% du chiffre d’affaires était traditionnellement dédié au transport. Le transport a diminué mais le niveau de vie a augmenté. Il y a une demande en automobile, qui est l’expression de l’augmentation du niveau de vie. La branche automobile va représenter 40% de notre portefeuille au Sénégal.
Quelles sont les grandes évolutions réglementaires souhaitables dans la sous –région ?
Nous souhaitons qu’il y ait plus d’ouverture avec les autorités de contrôle. Que la CIMA, très conservatrice, puisse permettre, tout en contraignant les entreprises à être financièrement responsables, l’évolution de la réglementation en donnant aux compagnies la possibilité d’investir en dehors de la zone. Le groupe Axa est le premier gestionnaire d’actifs au monde. Actuellement, nos filiales africaines ne peuvent pas faire appel à l’expertise développée par le groupe. Si la réglementation s’ouvrait un peu plus, la possibilité d’investir en dehors de la zone serait profitable à tout le monde.
Cet entretien est paru dans Financial Afrik numéro 5