En novembre prochain, l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) devra choisir un successeur au sénégalais Abdou Diouf. Six candidats sont en lice. Lequel sera élu ? Qui parviendra à remettre la Francophonie dans le sens de la mondialisation ?
Outre le mauricien Jean Claude de l’Estrac, 66 ans, porté par son pays et par l’Ocean Indien (lire entretien) et actuellement en tournée ouest africaine, il y a cinq autres candidats aux chances inégales. L’ancienne gouverneur général du Canada, d’origine haïtienne, Michaëlle Jean, 56 ans, a dû batailler dur pour obtenir le soutien du Québec et du Canada. Inconnue en Afrique, elle affûte ses réseaux parisiens pour susciter un vaste mouvement de soutien et pour renverser la règle tacite qui veut que le secrétaire général soit du Sud.
Auteur à succès et actuel ambassadeur du Congo à Paris, le congolais Henri Lopes, 76 ans, est soutenu par son pays et particulièrement par Dénis Sassou Nguesso. Déjà candidat en 2002, évincé au profit d’Abdou Diouf dans la succession de Boutros Ghali, l’auteur du « Le pleurer -rire » devra cependant batailler dur pour recueillir tous les suffrages de l’Afrique centrale qui a rarement choisi par consensus. D’autant que l’equato guinéen Agustin Nze Nfumu, 65 ans, candidat silencieux, chasse sur les mêmes terres. Actuellement sénateur, le candidat de Malabo fut par le passé ministre de la Culture, du Tourisme et de la Francophonie.
Quant au malien Dioncounda Traoré, 72 ans, sa candidature tardive requiert un silence circonspect des observateurs qui lui concèdent cependant le mérite d’avoir conduit le bateau de la transition malienne à bon port. Au nombre de ses hics, M. Traoré est originaire de l’Afrique de l’Ouest, à quelques jets de pierre du Sénégal. « Pour qu’il soit élu, il devrait s’appeler Blaise Compaoré » chuchote -t-on dans les cercles politiques ouest africains.
Au nom du principe de la rotation qui anime les grandes organisations, il est peu probable que le Mali succède au Sénégal. Reste Pierre Bouyoya du Burundi. Plus occuppé à honorer sa mission de haut représentant de l’Union Africaine pour le ‘Mali et le Sahel qui l’occupe et le passionne ( Lire son interview), le major part avec un handicap: son coup d’Etat pèsera au moment du vote en dépit de décisions fortes qui ont par la suite changé le cours de l’histoire de son pays et permis d’éviter un bain de sang entre Hutus et tutsis.
Tous ces candidats devront faire montre de capacité à manœuvrer pour préserver le legs de Diouf. Car l’OIF est à un tournant. Du club culturel de Senghor, Houpheit et Bourguiba qu’il fut, l’organisation est tombé dans une sorte d’instrument politique efficace dans les relations internationales mais toujours en arrière plan. Le magistère d’influence né en 1997 sous Boutros Ghali, premier secrétaire général de l’OIF, s’ est révélé pleinement avec Abdou Diouf en dépit d’un rôle et d’un avis souvent symboliques.
Après trois mandats, l’ancien président sénégalais, représentant de l’Afrique de l’Ouest, s’apprête donc à céder les clés d’une institution respectable mais sans contenu pragmatique. En effet qu’elle est la pertinence de la francophonie en ce 21 éme siècle ? Qu’apporte l’identité francophone aux étudiants et aux entreprises à l’heure de l’anglais triomphant, idiome du marché et de la globalisation? La francophonie doit -elle rester dans l’exception culturelle ou s’ouvrir vers l’économie et les réalités de la mondialisation? C’est sûr, un pilier ou une béquille économique aiderait grandement cette organisation à marcher sur ses deux jambes.