La Banque Mondiale et la SFI sauront-elles tirer les leçons de l’Inde?
D’origine américaine, la Banque Mondiale et la SFI s’évertuent à appliquer les leçons de l’Inde sur l’Afrique Subsaharienne. Pourtant, l’école américaine du Warehouse receipt, la plus performante de toutes, nous enseigne que le récipissé de dépôt doit être géré par le ministère des Finances et la Banque Centrale et non par le ministère du Commerce Intérieur comme en Inde, ou par le ministère de l’Industrie comme en Côte d’Ivoire. Le scandale Jignesh Shah qui a secoué le premier pays végétarien au monde nous enseigne qu’on ne peut pas s’écarter impunément des principes de base du marché.
S’il est mal géré le Warehourse receipt* conduit inévitablement à la catastrophe financière. C’est l’histoire de l’ingénieur informaticien indien Jignesh Shah, fondateur et CEO de la Multi Commodity Exchange of India Ltd (MCX), une plateforme de bourse de Commodities lancée en 2003 et considérée pendant longtemps comme une référence. Plus de 70% du volume d’échange des produits agricoles de l’Inde transitait par le MCX détenue par Financial Technology dont le jeune entrepreneur contrôlait 47%. Un chiffre énorme dans ce qui est considéré comme le premier pays végétarien dans le monde. Également vice-président de Dubaï Golde & Commodities Exchange, vice-président de Singapore Mercantile Exchange, Jignesh Shah se voit tresser des lauriers par la presse internationale et les think tank. En 2007, il est élu Global Young Leader par le World Economic Forum.
Le rêve se brise en mai 2014 quand il est arrêté pour un défaut de 1,5 milliards de dollars de dollars à la National Spot Exchange Ltd (NSEL), plateforme qu’il a fondé en 2008. Parmi les causes expliquant le défaut, des positions longues prises sur le sucre et le blé par certains intervenants sur cette plateforme spot. Ces positions ont été prises sans vérification nécessaire de l’existence des stock sur lesquels sont adossés les reçus. Quelque 13 000 investisseurs dont de grands noms comme Blackstone portent plainte. Le plus grand scandale financier en Inde n’a pas encore livré tous ses secrets. Accusé de fraudes, le jeune aigle est déchu. Suite à ses déboires, les participations de Jignesh Shah dans le MCX sont ramenées de 26 à 2%.
Ce crash renseigne plusieurs choses en direction des pays africains qui travaillent en ce moment pour l’établissement d’un tel système:
-D’abord, la régulation reste le maître mot du principe.
-L’émission du reçu doit correspondre à un dépôt physique vérifiable à tout moment.
-Le passage du Warehouse au marché spot appelle à plus de surveillance des positions prises par les investisseurs.
Compte tenu des enjeux financiers et des risques encourus par le circuit financier, un tel dispositif ne doit pas être laissé au seul ministère agricole mais d’abord et avant tout tout à la Banque centrale, au ministère des Finances et à l’autorité de régulation des marchés financiers. En zone OHADA, le système des Warehouse est faiblement réglementé.
La Côte d’Ivoire est en avance, exigeant des tiers détenteurs une licence et une assurance contre le vol, l’incendie et le dommage. De plus le collatéral manager doit disposer d’un capital minimum de 500 000 dollars pour le café et le cacao et 160 000 dollar pour la noix de cajou. Il faut aussi une garantie bancaire de 170 000 dollars pour les deux premiers produits et approximativement 85 000 dollars pour la noix de cajou.
Note:
Retrouver le dossier complet «Warehouse dans l’Agriculture» dans Financial Afrik du 15 juin au 15 juillet