Propos recueillis par Dia El Haj Ibrahima, Rabat
Pourquoi l’Indice Africain de Développement Social(IADS) ?
L’IADS a été testé à partir de 2012 sur la base d’une requête des Etats africains pour avoir un outil qui puisse les orienter dans la mise en place des politiques sociales plus inclusives. Le tout sur la base d’un constat très simple, c’est que la croissance du continent durant ces dernières années n’a pas été inclusive,bc’est-à-dire qu’elle n’a pas bénéficié à toutes les couches de la population de la même façon.
Cet outil qui se veut simple et intuitif suit le cycle de vie de l’individu et permet aux décideurs politiques d’identifier là où se trouve les couches exclues pour pouvoir mettre en place des politiques englobant ces populations marginalisées.
Aujourd’hui, vous êtes à quel stade d’expérimentation de l’indice
Nous avons développé l’indice en 2012/2013, nous l’avons testé dans cinq pays africains pour pouvoir affiner aussi sa méthodologie. En 2014, nous l’avons testé avec le Maroc, le Kenya, la Zambie, le Cameroun et le Sénégal et l’année dernière, nous avons commencé une série d’ateliers régionaux de formations. Nous avons formé deux représentants de chaque pays africains et avons pu couvrir jusqu’à 46 pays et dix communautés économiques régionales.
En Afrique, les écarts entre les individus très riches et ceux qui sont très pauvres se creusent de plus en plus. Comment réorienter les programmes de développement afin de s’atteler à résoudre efficacement les différentes questions d’exclusion humaines ?
On reconnait tous qu’il y a des écarts qui dans certains pays se creusent de plus en plus entre les riches et les pauvres. Ces inégalités-là ne sont pas seulement liées à une question de justice sociale mais compromettent également les efforts faits en matière de réduction de la pauvreté.
Cet outil se veut justement un instrument de réorientation des politiques sociales pour aller vers un développement plus inclusif. Il permet d’identifier les inégalités à l’intérieur de chaque pays. On ne veut pas comparer les pays Africains à travers cet indice mais juste aider chacun d’entre eux à combler les écarts qui existent entre les riches et les pauvres.
L’IADS sera-t-il à terme un outil de mesure du niveau de bonheur des populations Africaines ?
Parler du bonheur c’est comme parler de La pauvreté ou de l’exclusion. C’est un phénomène complexe, multidimensionnel mais surtout subjectif. Ce qu’on souhaite avec cet indice est que les gens se sentent plus intégrés dans les processus de développement et de la croissance économique que leurs pays sont en train de vivre. Car souvent lorsqu’on parle avec les individus, experts, décideurs politiques ou simples citoyens, l’on sent que ces personnes ne se sentent pas impliquées dans le développement de leur pays. A partir du moment que l’on se sent directement impliqué et partie intégrante de la société de l’économie, l’on deviendra naturellement plus heureux.
Pensez-vous qu’un jour les gouvernements Africains arriveront-ils à mettre en place des Ministères complétement chargés du bonheur ?
J’espère que cela sera une composante du développement. Mais comme je viens de le dire, le bonheur est vraiment un indicateur subjectif. Une personne peut avoir très peu mais se sentir heureuse parce qu’il y a un réseau social autour d’elle qui l’aide. Et d’ailleurs, c’est vraiment le cas, on voit très souvent des personnes beaucoup plus heureuses dans les pays qui font face à des défis de développement alors que dans les pays développés, ayant des mesures de protections sociales pour chaque individu, les populations ne se sentent pas heureuses. Je pense qu’il y a toute une série, une batterie de facteurs qu’il faut tenir compte lorsqu’on parle de bonheur. Souvent, même dans les pays développés et riches, il y a une pression sociale très forte sur chaque individu qui fait que cet individu même, en ayant toutes les ressources matérielles disponibles, ne se sent pas en bonheur. Le bonheur est un élément subjectif et c’est vraiment à chaque individu de trouver ou de créer son propre bonheur.
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