La démocratie africaine avance à son rythme variable d’une contrée à l’autre.
A Brazzaville, l’interruption des services SMS et des réseaux sociaux auront été nécessaires pour «sécuriser» des présidentielles anticipées du 20 mars où le principal protagoniste du président sortant, accusé de coup d’Etat sur la base d’une vidéo diffusée dans les réseaux sociaux, a été convoqué la veille même du vote.
A Niamey, l’opposant Amadou Hama, prisonnier dans le cadre d’une affaire controversée de trafic de bébés, a suivi le deuxième tour du scrutin organisé dimanche depuis l’hôpital parisien où il est évacué d’urgence. A l’inverse du Niger, le Bénin a tenu son deuxième tour des présidentielles dans une sérénité qui tranche avec le ton quasi-raciste de ceux qui reprochaient à Lionel Zinsou de n’être pas suffisamment noir.
Quant au président Macky Sall du Sènégal, organisateur d’un référendum devant ramener le mandat présidentiel de 7 à 5 ans, il voit ce qui devait être une simple consultation se transformer en un sondage grandeur nature sur sa popularité et sur sa manière de gouverner. Le message est suffisamment clair pour l’emmener à des ajustements plus que nécessaires.
En clair, l’ambiance vécue par les observateurs dans ces quatre pays traduit l’état de la démocratie africaine du 21 ème siècle. À Dakar comme à Niamey, force est de constater que les maigres acquis démocratiques ne sont pas irréversibles. Ce sont les mêmes forces de l’inertie qui reprochent aujourd’hui à Zinsou son métissage qui avaient hier accusé Patrice Talon d’avoir voulu empoisonner le président Yayi Boni. Ces mêmes lobbys qui vivent de rente de situation ont poussé Sassou Nguesso à verrouiller internet et conduit sans doute le President Macky Sall à opter pour le pari de la légalité constitutionnelle en lieu et place du respect de la parole donnée, qui équivaut à constitution dans les traditions orales africaines.
Quoi qu’il en soit, une analyse de ces scrutins, réalisés en même temps dans des contextes différents montrent, que les africains, fatigués de la politique politicienne (les taux d’abstention élevés à Dakar le démontrent) aspirent plus que jamais au changement démocratique et au progrès. Attention seulement à ce que certains désirs de changement ne nous fassent retomber la quadrature du cercle.
Albert Savana