C’est sous la chapelle d’un ancien couvent, reconverti en centre d’hébergement d’urgence et lieu de troc de livres ou de vêtements en fin de semaine, que la Nef a choisi d’annoncer ses nouvelles ambitions ce jeudi. « C’est une phase décisive qui s’ouvre pour la Nef.
Après avoir obtenu l’extension de notre agrément bancaire l’année dernière, nous lançons aujourd’hui des services de banque au quotidien pour les entrepreneurs », explique Frédéric Moukarim, directeur du développement de la coopérative financière. Née il y a plus de vingt-cinq ans, la coopérative devient ainsi une véritable « banque éthique ». Une première en France.
Certes, en Europe, quelques « banques éthiques », ont réussi à percer, à l’image du néerlandais Triodos Bank, qui affiche un total de bilan de plus de 7 milliards d’euros. Mais, en France, dans un marché bancaire très concentré, la Nef s’est jusqu’à présent cantonnée à un petit marché. Adossée au Crédit Coopératif, la Nef se limitait à octroyer des comptes à terme et des crédits aux associations et entreprises solidaires. Son bilan ne dépasse pas 400 millions d’euros à fin 2014. Désormais, elle espère changer d’échelle.
Première étape pour la banque, le lancement de son offre de compte courant en ligne pour les professionnels au mois d’avril. Avec, en parallèle, le lancement d’une offre de placement de trésorerie. A cela, la Nef va ajouter la mise à disposition d’une enveloppe de crédits à court terme de 45 millions d’euros pour trois ans, garantie en partie par le Fonds européen d’investissement. La nouvelle banque veut doubler ses encours de crédit d’ici à cinq ans pour les porter à environ 250 millions d’euros et convaincre au moins 5.000 clients professionnels d’ouvrir un compte bancaire à la Nef.
Ce n’est qu’un début. En effet, si les clients sont réceptifs, la banque envisage de muscler ses services aux professionnels dans les moyens de paiement et de lancer des comptes courants en ligne pour les particuliers après 2017 grâce à des outils digitaux. Cela sous réserve de l’accord des régulateurs. « Nous accompagnons aussi bien Biocoop que les producteurs locaux, nous pouvons mettre à profit cet écosystème dans les services de paiement », estime le président du directoire de la Nef, Jean-Marc de Boni.
Contexte de marché
Pour la coopérative, ce virage est rendu nécessaire par le contexte de marché. « Nous sommes en train de changer de modèle économique, nous ne pouvions pas continuer à miser exclusivement sur des revenus d’intérêts mis à mal par la faiblesse des taux », confirme Jean-Marc de Boni. Preuve de cette pression : en 2015, les encours de crédit de la Nef ont progressé de 6 % mais ses revenus ont reculé de 3 %. Du fait des investissements mis en oeuvre pour développer ses nouvelles activités, la Nef affiche une perte de 1 million d’euros en 2015. En 2016, elle anticipe une perte équivalente et un retour à l’équilibre en 2017. Le temps de roder son nouveau modèle économique…
Source: Les Echos