La Samir, principal raffineur marocain, est en liquidation judiciaire. La demande de protection judiciaire introduite par les avocats n’a guère convaincu le juge. La société qui emploie 900 personnes dans son site de Mohammedia (30 km au Nord de Casablanca) avait dix jours pour faire appel de cette décision prononcée le 21 mars par le tribunal de commerce de Casablanca.
A quatre jours de l’échéance et en dépit d’un appel qui aurait été interjeté (manoeuvre tactique pour gagner du temps?) rien n’indiquait que la maison mère, à savoir la Corral Petroleum Holdings AB, détentrice de 67% du capital, et son président, l’ethiopien Cheikh Hussein Al-Amoudi, bougeront le petit doigt pour empêcher ce nouveau Titanic retentissant auprès des gestionnaires d’OPCVM (qui ont placé 280 millions de dirhams dans des obligations Samir), des banques (qui devront provisionner) et des petits porteurs qui se retrouvent nus avec cette décision judiciaire.
L’Autorité marocaine du marché des capitaux qui vient de faire sa mue devra sans doute faire évoluer les normes de gestion et de monitoring du risque pour éviter aux acteurs individuels de telles déconvenues.
Peu d’analystes misent sur un changement d’attitude de la part d’Amoudi. Jusqu’à présent, l’homme d’affaires s’en tient à sa tactique de départ, à savoir fixer des échéances et négocier pour gagner du temps
Déjà en octobre 2015, le milliardaire avait fait faux bond en n’honorant pas son engagement pris devant le conseil d’administration de renflouer la Samir à hauteur de 6 milliards de dirhams.
Aujourd’hui, tout porte à croire que le capitaine du bateau Samir est tenté de prendre l’échelle de coupée. Non, l’homme à la fortune estimée à 11 milliards de dollars (Forbes) ne coulera pas avec son navire mais imitera sans doute le capitaine de la Costa Concordia en sautant sur le quai, abandonnant son équipage, ses employées et ses créanciers.
En tout cas les dégâts sont énormes selon la presse marocaine qui fait état d’une dette dépassant 23 milliards de dirhams (2,3 milliards d’euros) répartis entre 20 créanciers dont Attijariwafa Bank, la BCP et Saham Assurances. Cette dernière assure par la voix de son PDG, Mehdi Tazi, avoir provisionné l’emprunt à hauteur de 77% contre, assure-t-il, une moyenne de 50% chez les autres créanciers. Quant à la BCP, elle limite la casse grâcz à une hypothèque sur un terrain de la Samir.
L’Administration marocaine des Douanes (ADII) réclame plus de 13 milliards de dirhams au raffineur. De leur côté, la BNP Paribas et l’International Islamic Trade Finance Corporation font partie des entités qui ont lancé une procédure de saisie conservatoire sur le fonds de commerce et les biens meubles de la compagnie débitrice.
D’autres créanciers comme BB Energy, BP Oil International Ltd, ou encore le Crédit agricole Corporate and Investment Bank, ont vu leurs demandes rejetées par la Cour», précise le quotidien L’Economiste.
Egalement rejetée, la requête des agents et cadres du raffineur qui réclamaient un redressement judiciaire et non pas une liquidation, précise le site 360.ma. Seule consolation, le plan de continuation de 3 mois renouvelable, préalable à la liquidation.
Tout dépendra maintenant des traders internationaux. Accorderont -ils du crédit à la demande de quotation introduite par la Samir pour une livraison immédiate de brut? Le fait que Glencore (qui réclame 230 millions de dollars) ou encore le fonds Carlyle (qui exige 429 millions de dollars à la Samir) figurent parmi les créanciers complique la donne.