Interview exclusive avec Moussa Sylla, directeur de la BID en Afrique de l’Ouest
Le 4e forum international sur la finance islamique en Afrique de l’Ouest s’est ouvert le 2 juin 2016 au Centre international Abdou Diouf de Diamniadio de Dakar (Sénégal). Ce forum de deux jours a pour thème : la finance islamique au service du PSE (Plan Sénégal Emergent). L’occasion pour Financial Afrik de s’entretenir avec Moussa Sylla, directeur du bureau régional de la Banque islamique de développement (BID) en Afrique de l’Ouest.
Quel est le montant que la BID a injecté à ce stade dans le financement du PSE ?
La BID s’est engagée très fortement dans le financement du PSE. L’engagement s’est établi à un peu plus d’1 milliard de dollars. A ce stade, nous avons injecté environ 850 millions de dollars dans le financement du PSE. Mais la finance islamique demeure jusqu’à présent un segment sous exploité en Afrique. Pour pallier à cela, la BID envisage de créer au Sénégal une académie de la finance islamique pour former les acteurs financiers aux investissements islamiques.
Quels sont les pays les plus dynamiques par rapport aux émissions de sukuks en Afrique ?
Cela a démarré avec le Sénégal qui a émis un premier sukuk de 100 milliards de FCFA. Ensuite, la Côte d’Ivoire avec un emprunt de 150 milliards de F CFA.
Comment les banques islamiques font face aux problèmes de liquidités que connaissent souvent les banques classiques?
Il n’ya pas de spéculation en finance islamique. Les transactions financières sont basées sur des actifs réels. En finance conventionnelle, par exemple, le client qui souhaite acheter une voiture part dans une banque classique pour emprunter de l’argent. Maintenant, il paie ce prêt selon un taux d’intérêt. La banque classique ne se préoccupe pas si l’achat a été effectué ou non. Dans les banques islamiques, ce n’est pas la même démarche. Ici, on ne vous donne pas de l’argent directement. On s’assure d’abord que vous avez la voiture à votre disposition. Parce que c’est la banque islamique qui achète pour revendre au client. En sus, c’est au client de rembourser. Ces genres d’opérations font que les banques islamiques ne sont pas exposées comme leurs consoeurs classiques.
Cela veut dire qu’il n’y a pas de risque dans la finance islamique ?
Si, il y’ a des risques mais ils sont calculés. Le financier partage les risques avec l’emprunteur.
Les sukuks peuvent-ils être une alternative aux problèmes de liquidités ?
En effet, les obligations islamiques peuvent être une alternative aux problèmes de liquidités surtout pour les Etats. Parce que ce sont des montants énormes qu’on peut mobiliser au lieu d’aller sur le marché des capitaux. Les sukuks sont plus directs et plus éthiques. Mais aussi, elles sont conformes à la charia. Ce sont de véritables alternatives pour le financement des infrastructures notamment en Afrique.
La finance islamique peut-elle booster le mobile banking ?
Effectivement, la finance islamique est une finance qui peut bel et bien booster le mobile banking. Mais cela demande que les populations disposent des comptes dans les banques islamiques et qu’elles effectuent des transactions via le mobile banking. Vous imaginez ce que cela devrait représenter pour les pays africains notamment le Sénégal où la majeure partie de la population est musulmane.
Propos recueillis par Ablaye Modou Ndiaye