Par Isidore Kwandja Ngembo, Politologue
Pour la première fois de son histoire, le Forum social mondial (FSM), un de plus grand rassemblement de la société civile mondiale, se tient actuellement en Amérique du Nord. Des dizaines de milliers de militants du monde entier ont convergé vers le Canada pour réfléchir activement sur un certain nombre de solutions possibles pour bâtir un monde juste, pacifique et un meilleur environnement habitable pour les générations actuelles et futures.
Lors de ce FSM, la diaspora marocaine au Canada, réunie au sein du Forum des compétences canado-marocaines, a organisé une table ronde portant sur « les migrations climatiques : tendances et enjeux », qui est en fait une suite logique d’un colloque international qui s’était tenu le 20 mai dernier à Rabat, pour réfléchir sur la problématique des « réfugiés climatiques ». L’objectif étant d’attirer l’attention et sensibiliser la société civile mondiale réunie à Montréal, sur les conséquences catastrophiques souvent engendrées par le réchauffement climatique. Notamment, la situation des communautés entières et souvent vulnérables qui sont contraintes de migrer, soit temporairement soit définitivement, vers d’autres régions du monde pour trouver un refuge.
L’occasion était belle pour promouvoir la 22ème conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP22) qui se tiendra, cette fois-ci, au Maroc et d’exiger l’intégration de la problématique des « réfugiés climatiques » à l’agenda de ce sommet. Aussi, de sensibiliser l’opinion publique internationale aux conséquences dues au réchauffement climatique, afin que celle-ci interpelle les décideurs politiques de leurs pays respectifs qui se réuniront en novembre prochain à Marrakech, pour que cette question figure à l’ordre du jour.
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C’est dans ce contexte que nous avons été invité à présenter une conférence qui a porté sur : « Le régime international des droits de l’homme à l’épreuve du changement climatique ». Cette conférence faisait suite à celle que nous avions présenté au colloque international sur « les migrations climatiques : tendances et enjeux » à Rabat, sur le même sujet. C’était donc un grand honneur de venir partager nos connaissances avec les militantes et militants préoccupés par les conséquences du réchauffement climatique mondial.
Au cours de cette conférence, nous avons mentionné le fait que le droit international des droits de l’homme reconnait à tout être humain le droit à un niveau de vie suffisant qui se matérialise par le droit à la santé, à l’alimentation, à l’eau potable, à un environnement sain, à un emploi, à l’éducation, à un logement décent, etc.
Nous avons démontré à quel point ces droits sont successibles d’être violés à cause des effets des changements climatiques. Ce qui nous a amené à en déduire que les changements climatiques contribuent à la violation des droits de la personne, dans la mesure où ils ont des répercussions négatives sur la jouissance effective des droits mentionnés ci-hauts.
Nous avons aussi mentionné qu’à ce jour, il n’y a pas d’instruments juridiques spécifiques, au niveau international, qui protègent suffisamment les personnes victimes des effets des changements climatiques, lorsque celles-ci franchissent la frontière internationale.
Le statut de réfugié tel qu’il est défini par la Convention relative au statut des réfugiés, adoptée le 28 juillet 1951, est entièrement basé sur une approche individuelle des droits de l’homme et ne s’applique qu’aux personnes qui craignent avec raison d’être persécutées par les autorités de leur pays, du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques. Or, les migrations climatiques sont souvent des exodes massifs d’individus qui craignent pour leur vie, qui fuient pour les mêmes raisons et qui ne sont pas forcément persécutés par les autorités de leur pays. En définitive, cette Convention ne s’applique pas aux migrants climatiques.
Notre argumentaire présenté en faveur de la protection internationale des « réfugiés climatiques » semble avoir reçu un accueil favorable de la part de militantes et militants présents dans l’auditoire. Gageons que les membres de la société civile mondiale ici présents à Montréal vont, au retour dans leurs pays respectifs, mener des activités de plaidoyer efficaces pour la reconnaissance d’un statut juridique des réfugiés climatiques, sur le même principe que celui des réfugiés politiques.
Nous sommes néanmoins très conscients du fait que le chemin à parcourir pour parvenir à l’adoption d’une Convention internationale relative au statut des réfugiés climatiques est parsemé de beaucoup d’embûches, mais nous avons toutefois bon espoir que les autorités marocaines feront de leur mieux, pendant la COP22, pour à la fois faire avancer les négociations internationales sur les changements climatiques et parvenir à un consensus pour la protection juridique des droits de migrants climatiques.