Par Leon Louw, directeur exécutif The Free Market Foundation
Il est communément admis que moins un gouvernement est interventionniste, plus les individus sont libres. Le prix Nobel d’économie Friedrich Hayek dérangeait lorsqu’il affirmait qu’un gouvernement est d’autant plus utile au bien commun, qu’il intervient modérément. Pourtant, si l’on prend le cas de l’Afrique du Sud, le gouvernement y est plus lourd et plus puissant que jamais. Pourquoi cet environnement coercitif est-il si attractif en particulier pour les intellectuels dont la majorité lutte contre les marchés libres? On se demande foncièrement pourquoi ?
La liberté personnelle est souvent déformée et mal comprise. Ce n’est pas la loi de la jungle ! Elle signifie simplement que les individus et leur propriété sont protégés des abus extérieurs. Le consentement est au cœur de la liberté individuelle. Comment parler de liberté lorsque que des lois sur la santé déterminent ce que vous devez consommer ; lorsque les lois du travail imposent les termes du contrat qui vous lie à votre employeur; lorsque la loi foncière décide à votre place du sort de votre parcelle de terre, etc.
On a tendance à croire que la liberté est dangereuse car les populations ne sauront pas en faire un bon usage. Liberté est souvent synonyme d’exploitation dans l’entendement commun. Etrangement, on considère que les populations sont assez intelligentes pour voter, mais trop stupides pour contrôler leurs vies. En réponse à cette crainte : la réglementation. Tout doit être règlementé, régulé, encadré… Nelson Mandela lui-même, en son temps, n’avait pas eu peur de libéraliser l’éducation. Celui qui est entravé dans la réalisation de ses choix de vie a souvent tendance à devenir hors la loi pour tenter de se construire malgré l’hostilité du contexte.
Les adeptes du pouvoir sont dans un fantasme étonnant que souligne clairement le philosophe David Friedman. Ils pensent que la qualité des dirigeants d’un pays est forcément favorable au bien commun et cela sans dérives, sans excès, sans copinage. Cette vision fait certes rêver mais est loin de la réalité de l’exercice du pouvoir. La mauvaise gouvernance incite plutôt à limiter le pouvoir de l’Etat à ses fonction de base en laissant l’économie entre les mains du secteur privé, malgré ses imperfections.
On se demande pourquoi des gens, animés par ce que Georges Orwell qualifiait de décence ordinaire, peuvent laisser un gouvernement décider à leur place de ce qui est bien ou mal dans leur propre vie. Tous les gens ne sont pas identiques et le bien être ne peut pas être le même pour tous. Chacun connaît ses besoins et ses désirs et c’est au niveau individuel que ce choix peut être fait. Ce n’est pas au gouvernement de faire tous les choix, il doit simplement permettre ces choix et les protéger à travers une justice efficace et égale pour tous.
Alors que la loi n’autorise pas un individu à menacer un autre individu innocent, lorsqu’il s’agit de l’action de l’Etat, on devrait se satisfaire de tous les abus sans se plaindre et en qualifiant en plus ces abus de service public. Où est le service ? Il n’y a pourtant pas d’autre choix que de se soumettre à cette médiocrité étouffante.
Ainsi, d’évidence, malgré des imperfections, la loi d’un marché libre est plus stimulante que l’oppression de l’Etat. C’est aussi la dignité des populations qui est protégée. La liberté est le socle de la création, de l’innovation, de l’entreprise, des échanges et permet à chacun de valoriser ses propres compétences dans son propre environnement. La coercition étouffe tous les rêves et idéaux.
Soulignons aussi que l’interventionnisme étatique a un coût supporté par les contribuables. Rien n’est gratuit. Les gouvernants ont pourtant tendance à parler de cadeaux et de gratuité. Au delà, le problème est que le coût supporté par le contribuable, mis en relation avec la qualité du service rendu, incite vivement à mettre en concurrence services publics et privés de manière à faire un choix éclairé (rapport qualité prix). Cela permettrait, en plus, une réduction du copinage et de la corruption. On a parfois l’impression que les lois sont plus dictées par des lobbyistes que par les besoins des populations.
Malheureusement, les intellectuels qui devraient jouer le rôle d’éclaireurs se laissent éblouir en se nourrissant aux mamelles de l’Etat. Dans un tel contexte, il faut espérer que cette décence ordinaire, évoquée plus haut, puisse coaliser les masses pour avancer sur la voie du changement. La défaillance de l’Etat incite, en Afrique, à voir le développement par le bas (bottom up). Ce sera certes long mais la mission de la société civile est résolument de coaliser cette force positive favorable au bien commun.
Article publié en collaboration avec Libre Afrique