La COP22 avait été annoncée comme la COP de l’action pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris. Elle aura surtout été la COP de la préparation de l’action, en initiant la préparation d’un cadre de mise en œuvre. Elle aura été largement consacrée aux pays les plus vulnérables notamment africains. Les négociations ont été lentes et difficiles, tout en permettant certaines avancées.
Deux documents officiels sortent de cette COP (http://unfccc.int/2860.php) :
– Les décisions du CMA1 (Parties ayant ratifié l’Accord de Paris) et de la COP22 ;
– La proclamation de Marrakech pour le climat et le développement durable : une déclaration politique reprenant les points essentiels de l’Accord de Paris, en réaction à l’élection du nouveau Président des Etats-Unis.
L’organisation de cette COP et l’accueil marocain ont été salués par tous et ont facilité les dialogues entre représentants du monde entier.
Résultats des négociations
Les discussions sur le « dialogue de facilitation » qui aura lieu en 2018 et qui vise à clarifier la manière dont seront rehaussés et évalués les engagements des Etats, n’ont pas permis d’arriver à un consensus. Les débats à ce sujet sont repoussés dans la perspective de la COP23 prévue à Bonn en fin d’année 2017.
Le mode de fonctionnement de cette COP de Marrakech et le rythme des négociations semble être redevenu celui qui prévalait avant l’Accord de Paris.
Un décalage évident a été ressenti entre les déclarations politiques lors du segment de haut-niveau du 15 au 17 novembre qui appelaient à une accélération de l’action et les résultats des négociations. Un autre décalage a existé entre le foisonnement des activités de la société civile, notamment marocaine, et les négociateurs. La séparation hermétique entre la zone bleue (Etats et négociateurs) et la zone verte (société civile) apparaît comme un frein pour faciliter la prise en compte des messages de la société civile.
Parmi les points transversaux à retenir qui vont impacter le domaine de l’eau :
– Les pays développés ont réitéré leur volonté d’atteindre les 100 milliards USD par an à partir de 2020. Cependant, de sérieuses divergences subsistent entre les attentes des pays du sud et la réalité des crédits mis en place ainsi que concernant la répartition de ces fonds entre adaptation et atténuation.
– L’adaptation a été au cœur des débats du fait des pays en développement. Une décision a été prise en ce qui concerne la recapitalisation du Fond d’Adaptation à hauteur de 80 millions d’euros pour l’année à venir, principalement par l’Allemagne.
– Concernant l’atténuation, les négociations sur le prix du carbone ont été vives et prendront du temps avant qu’une décision puisse être prise.
– Les discussions pour la préparation d’un programme de travail sur l’agriculture, seul secteur pris en compte dans les négociations, n’ont pas permis de trouver un consensus. Aucun autre programme de travail sectoriel n’a été initié.
– La révision du mécanisme de Varsovie sur les pertes et dommages liées aux catastrophes naturelles a permis d’avancer, avec la prise en compte des pertes humaines liées aux catastrophes et des pertes culturelles liées aux migrations. Ceci étant, aucune décision n’a été prise sur les financements pouvant être mis en place dans ce secteur.
– Un réel avancement est à noter sur le renforcement des capacités avec la définition de termes de référence. L’attention a été fortement portée, en particulier par les pays africains, sur la nécessité d’un appui de la communauté internationale pour améliorer les capacités des acteurs à transformer les contributions volontaires en programme d’actions climatiques et à concevoir des projets répondant aux critères de bailleurs de fonds. Ces derniers, en particulier l’AFD, ont tous annoncé leur volonté de mieux soutenir les pays dans ce sens.
– Le 4ème pilier de la COP mis en place à Paris en 2015, l’Agenda de l’Action, a constitué un segment intéressant. Les deux Championnes pour le climat, Hakima El Haite et Laurence Tubiana, ont lancé le « Partenariat de Marrakech pour l’Action Globale pour le Climat » (http://unfccc.int/files/paris_agreement/application/pdf/marrakech_partnership_for_global _climate_action.pdf) entre les Parties et les acteurs non étatiques pour la mise en œuvre des NDCs. Elles ont annoncé qu’aurait lieu en début d’année une réunion destinée à faire un bilan des priorités et que seraient établis des dialogues régionaux entre acteurs. Le mandat de Laurence Tubiana s’est achevé et la Ministre de l’Agriculture des îles Fidji lui succède.
Quelle place pour l’eau dans cette COP ?
Pour la première fois dans une COP, l’eau a été réellement visible, avec une journée dédiée le 9 novembre en zone bleue (http://unfccc.int/paris_agreement/items/10038.php) et une demi-journée dédiée la veille en zone verte.
Les points essentiels soulevés lors de la restitution en plénière devant les deux championnes :
– Water is climate and climate is water;
– L’eau et l’énergie (leur accès et leur sécurisation) doivent être traitées en commun ;
– Les bassins hydrographiques sont l’échelle pertinente pour la gestion des ressources en eau ;
– Une approche multi-secteurs est nécessaire ;
– Finance, connaissance et gouvernance sont les piliers nécessaires pour un accès à l’eau efficient et durable ;
– Plusieurs initiatives ont été engagées, dont Water for Africa et la mise en place d’un réseau international de parlementaires pour l’eau.
De très nombreux évènements se sont tenus sur la thématique de l’eau, tant en zone verte qu’en zone bleue, organisés par de nombreux acteurs du monde entier.
Le slogan « ClimateIsWater » a été largement repris dans les deux enceintes la COP, assurant une forte visibilité de cette initiative et de l’eau.
L’action du PFE à Marrakech
Le PFE a lui-même organisé 6 évènements sur des thématiques variées et porteuses de perspectives : l’eau et le climat dans les territoires insulaires ; l’évaluation des solutions d’adaptation dans le domaine de l’eau ; les conséquences humanitaires du changement climatique dans le Sahel ; eau et climat, mieux connaître pour mieux gérer ; les solutions des acteurs de l’eau français face au changement climatique ; les coopérations entre organismes de bassin français et étrangers pour une meilleure gestion des ressources en eau.
En outre, le PFE disposait d’un stand en zone société civile qui a été visité par des centaines de visiteurs très concernés par l’eau et le changement climatique. La plaquette « mieux connaître pour mieux gérer » du PFE, publiée à l’occasion de la COP22 a été très appréciée.
La riche mobilisation des acteurs de l’eau français présents à Marrakech a largement participé au succès de ces activités et à la visibilité de leurs savoir-faire.
Le PFE a pu exprimer ses attentes auprès du Président de la République française et de la Ministre Ségolène Royal pour que la France porte le sujet de l’eau dans les négociations de Marrakech et à l’avenir. L’échange d’information entre les membres de la délégation gouvernementale française et les autres acteurs français concernant les avancées des négociations mériterait à l’avenir d’être renforcé.
Le PFE s’est efforcé d’être un messager entre la zone verte et la zone bleue. Il a engagé des discussions informelles avec les négociateurs de différents pays et avec des membres du Comité de l’Adaptation. En amont de cette COP, le PFE a plaidé pour la nomination d’un représentant français au sein de ce Comité. Cela est désormais chose faite.
Conclusion
Cette COP22 a constitué une COP de transition qui a vu une prise en compte renforcée de l’adaptation et une visibilité forte de l’eau. Ceci étant, les négociations n’ont pas permis de définir un cadre concret pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris. L’objectif fondamental des négociations d’ici 2018 sera de fixer ce cadre afin de mettre en place les outils nécessaires à cette mise en œuvre.
On peut s’interroger à nouveau sur l’efficacité de ce type de processus onusien face à l’urgence climatique. Fort heureusement, le dynamisme des acteurs non-étatiques constitue d’ores et déjà une force d’action très positive pour l’atteinte des objectifs définis à Paris.
Enfin, les COP se révèlent être un lieu incontournable d’action pour le PFE et ses membres à l’avenir.