Il y a les intentions et les actes. L’Afrique est championne mondiale des belles décisions et des déclarations d’intention. En 2016, les projets du programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) n’ont pas démarré. Quatre ans après leur adoption par l’Union Africaine et deux ans après le sommet de Nepad de Dakar, ces ouvrages, ponts et barrages semblent perdus en route.
Le PIDA se compose d’un programme de réalisation de 51 projets nécessitant un investissement de 360 milliards de dollars d’ici 2040 dont 68 sur la période intérimaire 2010-2020. Le gap non couvert s’élève à 38 milliards de dollars. Les 16 projets prioritaires identifiés en juin 2014 lors du sommet de Dakar accordent la part belle à l’eau, à l’énergie hydroélectrique, au transport et aux TIC. Par secteurs, l’énergie absorbe 59% des investissements. Par répartition géographique, l’Afrique centrale a la part du lion avec 33% des projets, suivie de l’Afrique de l’Est (30%), de l’Afrique Australe (21%) et de l’Afrique de l’Ouest (9%).
1-Barrage hydroélectrique Ruzizi III: encore sous terre malgré le début des mobilisations de fonds
Situé en Afrique de l’Est. Le coût global de ce projet est de 625 millions de dollars. En septembre 2014, un accord est scellé entre les pays des grands lacs (EGGL) et le consortium conduit par Sithe Global, filiale du fonds d’investissement américain Blackstone Group, et Industrial Promotion Services (IPS), filiale du groupe Aga Khan Fund For Economic Development (AKFED). A la fin 2015, ce projet qui devra alimenter le Burundi, la République Démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda (qui forment la Communauté économique des pays des grands lacs (CEPGL)) avait reçu 138 millions de dollars de financement de la BAD. L’Union Européenne et la Banque Mondiale devraient compléter le financement. Des prospections sont en cours pour trouver des fonds concessionnels. D’une capacité de 147 MW, ce barrage hydroélectrique fait suite aux programmes Ruzizi I (1958) et Ruzizi II (1989). Le démarrage de ce projet était prévu en 2016. La construction du projet n’a pas encore démarré.
2. Expansion du port de Dar Es Salam (Tanzanie): chantier en rade
Un projet de 690 millions de dollars. La Banque Mondiale vient d’accorder, en août 2016, un financement de 600 millions de dollars pour l’élargissement de cette infrastructure essentielle pour l’Afrique de l’Est. Le ministère britannique pour le développement international (DFID) et TradeMark East Africa (TMEA) contribueront ensemble à hauteur de 30 millions. Quant à l’apport du gouvernement tanzanien, il se situera à hauteur de 60 millions $. L’agrandissement devrait porter le tirant d’eau à 14 mètres et faire passer le trafic de 13 millions de conteneurs en 2015 à 28 millions en 2020. Le chantier qui n’a pas encore commencé est déjà un sujet de friction entre Dar Es Salam et Nairobi. La concurrence avec le port de Mombassa sera rude. Pourvu que le projet démarre réellement.
3-Barrage hydroélectrique de Sambangalou (Sénégal): toujours dans l’attente du démarrage des travaux.
Un projet complexe (barrage de 128 MW et réseau d’interconnexion de 1677 km) qui réunit les pays de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie (OMVG). En octobre 2015, un financement de 1 milliard de dollars a été mobilise auprès de 10 bailleurs. Il s’agit de la Banque africaine de développement (BAD), de la Banque européenne d’investissement (BEI), de la KfW, de l’Agence française de développement (AFD), de la Banque islamique de développement (BID), de l’Agence japonaise pour la coopération internationale (JICA), du Fonds Koweitien pour le développement économique arabe, de la Banque ouest-africaine de Développement (BOAD), de la Banque mondiale et de l’Exim-Bank de Chine. Pour rappel, les Etats membres de l’OMVG avaient décidé à l’occasion de la septième session extraordinaire du Conseil des ministres, qui s’était tenue à Dakar les 3 et 4 juillet 2013, de retenir China Gezhouba Group Corporation (CGGC) comme adjudicataire provisoire dudit marché. Le délai d’exécution des travaux était fixé pour une durée de cinquante mois. La pose de la première pierre était prévue au troisième trimestre de cette année. Problème, une faible gouvernance de l’OMVG qui subit les mauvaises retombées des tensions politiques sous régionales. Le projet n’a pas encore démarré.
4-Serenje –Nakone Road , Nord-Sud Corridor (Zambie): encore à l’état de projet
600 km entre Serenje (province de Nakonde en Zambie centrale) et la frontière Tanzanienne. Le projet est estimé à 600 millions de dollars. A notre connaissance, les bailleurs ne se bousculent pas au portillon.
5-Liaison ferroviaire Dakar-Bamako-Niamey- Ndjamena-Djibouti: encore dans les power points.
Un projet qui n’a pas du tout avancé. Bien au contraire, la ligne Dakar-Bamako datant de l’ère coloniale fait face à d’énormes difficultés suite à une privatisation infructueuse. Les difficultés à assurer la liaison Dakar-Bamako font oublier la future extension Bamako-Ndjamena ou encore Ndjamena-Djibouti.
6-Gazoduc Algérie –Nigeria: projet en rade
Le projet trans-Sahara Gas Pipeline (TSGP) a fait l’objet d’un Mémorandum d’entente entre Sonatrach et la Nigerian National Petroleum Company (NNPC). En mai 2005, les deux entreprises ont confié la réalisation de l’étude de faisabilité du gazoduc à la société britannique Penspen/lPA laquelle a confirmé la faisabilité du projet. Le gazoduc intercontinental d’une longueur totale de 4128 Kilomètres, dont 1037 kms traverseront le territoire du Nigeria, 841 kms parcourront le Niger et le plus long tronçon, soit 2310 kms, traversera le territoire algérien jusqu’ à la côte méditerranéenne. Le projet prévoit la construction d’une vingtaine de stations de compression. Estimé à plus de 10 milliards de dollars, il est destiné à acheminer 20 à 30 milliards de m3 de gaz naturel du Nigeria vers l’Europe via le Niger et l’Algérie. Jusque-là, pas d’avancée concrète. L’effondrement des cours du pétrole et les difficultés économiques auxquelles font face Alger et Abuja en rajoutent à la complexité de l’ouvrage. Bref, ce projet n’a pas encore commencé.
6- Pont de chemin de fer Brazzaville-Kinshasa et du chemin de fer Kinshasa Illebo
Sur le terrain, ce projet de 100 millions de dollars n’a pas avancé depuis 2014. Il s’agit de la construction d’une route, d’un pont de chemin de fer combiné et d’un poste d’arrêt unique à la frontière dont la ligne ferroviaire sera connectée à Lumbumbashi-IIlebo. Déjà d’actualité en 1990, ce projet rencontre des obstacles politiques. Des sources estiment à Kinshasa qu’un tel pont va favoriser le port de Pointe Noire au détriment de celui de Matadi.
7. Corridor Abidjan-Lagos
C’est le plus important corridor en Afrique de l’Ouest, reliant cinq capitales économiques sur 1028 km. L’autoroute reliant Abidjan à Grand-Bassam, ouverte à la circulation le 14 septembre 2015, sur une longueur totale de 42,7 km pour un coût global d’environ 139 million de dollars, peut être considérée par les optimistes comme la première partie de ce corridor. Le projet fait l’objet d’interventions de plusieurs parties prenantes et bailleurs de fonds. La Banque mondiale a mis en place un financement en deux phases : la première phase, pour laquelle 228 millions de dollars sont accordés, couvre le Ghana, le Togo et le Bénin ; la deuxième phase estimée à 89,5 millions de dollars couvrira la Côte d’Ivoire et le Nigeria.
8- Lusaka-Lulongwe câble terrestre
Pas d’avancées majeures. En attendant, les opérateurs locaux renforcent leurs réseaux
9. North Africa Power Transmission Line :
Une ligne électrique de 2 700 km du Maroc en Egypte, en passant par l’Algérie, la Tunisie et la Libye. Le projet est porté par le Comité maghrébin d’électricité (COMELEC), membre de l’Union du Maghreb Arabe. Cette ligne de transmission ne fait pas partie des priorités des Etats de la région qui conduisent chacun son programme de développement.
10-Liaison ferroviaire Abidjan, Niamey, Ougadougou, Cotonou
La «Boucle ferroviaire » qui s’étend sur 2 970 km dont 1176 km de construction neuve et 1794 km de réseau à réhabiliter, nécessite des investissements de l’ordre de 1 000 milliards de francs CFA (1,5 milliard d’euros) que le Groupe Bolloré s’est engagé à réunir, en promettant d’assurer le portage des actions non libérées. Ce projet qui échappe au contrôle du PIDA connaît beaucoup de développements spéculatifs. Le groupe Bolloré parviendra-t-il à trouver tous les financements nécessaires via sa filiale, Africarail, en service depuis 2012, et confrontée à plusieurs contentieux juridiques et administratifs?
11- Le projet hydroélectrique de Batoka Gorge.
Le projet hydroélectrique de 2400 MW et d’un coût de 3,5 milliards de dollars entre la Zambie et le Zimbabwe devrait démarrer l’année prochaine. Les études d’impact ont été achevées en juillet de cette année. Ce projet peut potentiellement alimenter 60% de la consommation du continent. A condition toutefois de boucler les financements et de commencer vite. Il faut 10 à 13 ans pour finir les ouvrages.
12-Corridor Douala-Bangui-Ndjamena
Long de 1500 km, ce corridor ne connaît pas d’avancées. La situation actuelle de la zone CEMAC montre que la mobilisation des fonds ne viendra pas de la sphère publique.
13- Projet de transmission Zambie, Tanzanie Kenya
Les trois gouvernements ont signé un protocle récent pour la mise en place d’un projet d’interconnexion électrique. Le budget fixé est évalué à 1,4 milliard de dollars. Le projet va connecter le réseau électrique zambien au réseau électrique kényan en passant par la Tanzanie, sur une distance de 2 206 km. L’interconnecteur sera construit comme une ligne de transmission d’énergie bidirectionnelle de 400MW.
14-Route Kampala –Jinja
Cette route constitue une liaison vitale entre Juba, le Sud Soudan et KampalaOuganda. Reste à passer au concret.
15 : Route Eldoret-Nadapal- Kenya et Sud Soudan
Il s’agit de la modernisation de la route Nadapal-Juba (365km). L’objectif de ce projet est d’améliorer la connectivité au niveau des Etats et de la région. En outre, le projet facilitera l’intégration du Sud Soudan sur les marchés régionaux et permettra de soutenir l’Etat du Sud Soudan. Pour l’heure, c’est un vœux pieux.
16 Projet de rehabilitation de la ligne ferroviaire Abidjan –Ouagadougou
Le groupe français Bolloré a débuté les travaux de régénération de 1 260 km de rail entre Abidjan (Côte d’Ivoire) et Ouagadougou (Burkina Faso). Le chantier, d’un montant de 400 M€ sur 5 ans, vise à rénover en profondeur puis à développer cette ligne ferroviaire économiquement stratégique pour les deux Etats africains. Pour mémoire, la gestion de la ligne a été confiée à Sitarail, filiale du groupe Bolloré qui détient 67% des parts, le reste étant partagé à hauteur de 15% respectivement par le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire.
2 commentaires
Voilà le problème de l’Afrique. Les moyens ne manquent pas mais la Volonté n’est pas » la chose la mieux partagée »sur notre continent.
Bonjour,
Je découvre « Les moyens ne manquent pas » ! …. mais la volonté n’est pas.
Alors que dois-je faire du projet Autour du Soleil Développement – filière bois Innovations (PME) France et Afrique lequel devait créer un site industriel en Afrique Centrale dans la filière bois représentant pour l’Usine ultra moderne, la création du site industriel avec le Quartier Positif Vert qui recevra 1000 familles de collaborateurs, un Investissement de 450 millions d’euros ?
Utikisation des ENR à tous les niveaux.
Ce Pôle Production permettait de réaliser notre produit : « Le Quartier Positif Vert » lequel est prévu en Afrique mais aussi en Europe et en France. Nous avions programmé dans le projet la création d’un centre de formation sur tous les métiers de la filière bois dans la construction, dans l’ameublement et dans la décoration en relation avec la France et l’Europe et une demande de soutien financier à Bruxelles puisque le projet Africain serait complété par un double en France, à Saint Nazaire. Cela permettrait des échanges réguliers au niveau des formateurs mais aussi de ceux qui sont en formation et qui préparent leurs examens allant du CAP jusqu’à sans limite …
Il était programmé la création d’une entreprise commerciale basée dans un pays de l’Union Européenne laquelle aurait pour objet objectif de vendre nos produits semi-finis aux entreprises européennes de constructions, d’ameublements et de décoration.
Un cluster devait prendre naissance sur le territoire africain d’accueil de notre projet avec la création à notre niveau de 80/100 entreprises au niveau du projet (cela touche l’hostellerie-restauration-spa, la Maison de la santé, le Quartier Seniors, les Crèches, le Garage conseil….
Enfin, nous devions faire un double en France à Saint Nazaire pour 200 millions d’euros ce qui représente 600 emplois à terme avec 80 entreprises constituées dans le cadre du fonctionnement de la PME France.
450/500 millions d’ euros en Afrique / 200/300 d’euros en France = C’est un projet ambitieux mais qui mérite de s’y arrêter !
Sachez que j’ai déjà reçu des demandes pour la réalisation de chantier en Afrique (12 000 maisons) comme en France.(25 Quartiers Positifs Verts).
Nous avons besoin de recevoir des soutiens même financiers afin de poursuivre les travaux = Avez vous des organisations gouvernementales, banques d’affaires, banques d’états, réseaux (…) qui, comprenant que l’Afrique a une chance de conserver ICI son Made in AFRICA dans l’exploitation de la filière bois.
Même du bois français sera importé vers l’Afrique et ce, dans les mêmes règles que les Chinois = C’est toute une question d’organisation et de moyens !
Je reste dans l’attente de vos propositions
Patrice ARMUSIEAUX