Le Premier Ministre de la République de Guinée, Mamady Youla, est ravi d’annoncer le lancement du Bureau d’Exécution Stratégique (BES), opérationnel depuis janvier 2017 et financé par le Fonds d’Abu Dhabi pour le Développement (ADFD).
Logé à la Primature, le BES a pour objectif d’accélérer la mise en œuvre de projets prioritaires en Guinée et de renforcer les institutions gouvernementales en prenant une approche axée sur les résultats. La mise en place du BES s’est appuyée sur les meilleures pratiques internationales tout en tenant compte des spécificités du contexte guinéen. Sur la période 2017-2018, le BES jouera un rôle catalytique dans la mise en œuvre de deux initiatives sectorielles, dans l’agriculture et les mines, et dans l’amélioration de l’efficacité de l’action gouvernementale, notamment à travers un appui à la gouvernance et la mise en place d’un programme de leadership dans la fonction publique.
Le Président de la République, le Professeur Alpha Condé, et son Premier Ministre, Mamady Youla, travaillent en tandem pour éradiquer la pauvreté et faire de la Guinée un pays émergent. Le Président a déclaré que « la création du Bureau d’Exécution Stratégique (BES) par le Premier Ministre, avec le soutien de ADFD et du cabinet de conseil Dalberg Global Development Advisors, s’inscrit dans un processus plus large visant à améliorer l’efficacité de l’action gouvernementale dans son ensemble et à accélérer la mise en œuvre des projets phares».
Financial Afrik a eu l’occasion de s’entretenir avec le Premier Ministre guinéen, Mamady Youla, sur cette nouvelle initiative visant à accélérer le développement du pays.
En quoi consiste le Bureau d’Exécution Stratégique et d’où est venue l’idée ?
Le Bureau d’Exécution Stratégique est une initiative phare pour accélérer la mise en œuvre de projets prioritaires en Guinée et pour développer des méthodes efficaces, pérennes et porteuses de résultats qui pourront être diffusées à l’ensemble des institutions gouvernementales. Lors de son accession au pouvoir en 2010, Son Excellence le Président Alpha Condé a eu une vision ambitieuse pour transformer la Guinée. Il a mis l’accent sur une croissance économique accélérée, un renforcement de la politique de responsabilisation des acteurs du gouvernement et une meilleur cohésion sociale. Par ailleurs, la Guinée renforce les capacités de son administration pour mettre en œuvre des projets transformateurs pour l’économie du pays. C’est dans le cadre de ce processus que le Bureau d’Exécution Stratégique (BES), placé sous ma responsabilité, a été mis en place avec l’appui du Fonds d’Abu Dhabi pour le Développement (ADFD) et du cabinet international de conseil en stratégie, Dalberg. Après une phase de planification stratégique en fin 2016, le BES est pleinement opérationnel depuis janvier 2017.
Quelle est la vision du Bureau d’Exécution Stratégique ? Sa mission ? Son mode de fonctionnement ?
Le Bureau d’Exécution Stratégique veut se positionner comme un modèle de référence pour la concrétisation des initiatives phares du Gouvernement à travers le développement d’approches de mise en œuvre et de gouvernance efficaces, pérennes et porteuses de résultats. La mission du BES est d’accélérer la réalisation des projets prioritaires en Guinée et d’accompagner la diffusion de nouvelles méthodes de travail au sein de l’administration. Au cours des deux prochaines années, le BES jouera un rôle de catalyseur dans la mise en œuvre de deux initiatives sectorielles dans l’agriculture et les mines ainsi que dans l’amélioration de l’efficacité de l’action gouvernementale à travers deux autres axes de travail centrées sur la gouvernance et le leadership. Le BES travaille en étroite collaboration avec les structures d’exécution que sont les Ministères, Départements et Agences.
Un comité de pilotage, composé des ministres clés et d’autres membres du gouvernement, oriente les travaux du BES. Le comité de pilotage sert également de plateforme de discussion pour lever les goulots d’étranglement potentiels dans la mise en œuvre du plan d’actions du BES. Un Directeur Général, issu du secteur privé, est à la tête du BES. En plus de superviser l’équipe, il entretient une communication régulière avec les parties prenantes au sein du gouvernement et à l’extérieur afin d’assurer l’adhésion et de faciliter les partenariats.
Bien que le BES soit opérationnel depuis janvier, vous avez mentionné une phase de planification stratégique qui a précédé son lancement. Pouvez-vous nous donner plus détails sur ces travaux ?
La première étape de cette phase de conception consistait à analyser les Delivery Unit existants à l’échelle mondiale afin d’identifier les meilleures pratiques et d’en tirer des leçons sur le modèle à adopter pour la Guinée. À ce jour, il existe plus de 20 Delivery Unit dans le monde. Les Delivery Unit en Afrique et dans d’autres régions sont de plus en plus reconnus comme un moyen efficace de travailler au sein du système gouvernemental pour accélérer la mise en œuvre de projets, notamment parce qu’ils appliquent des méthodes issues du secteur privé en matière de responsabilisation des acteurs, de suivi et de reporting. L’objectif d’un Delivery Unit n’est pas de déresponsabiliser l’administration ou de créer des doublons. Les Delivery Unit travaillent en étroite collaboration avec les principaux ministères, départements et agences gouvernementales pour veiller à ce que les politiques et les ambitions soient mises en œuvre de façon efficace et contribuent à améliorer le bien-être des citoyens. La mission et l’organisation du Bureau d’Exécution Stratégique de la Guinée ont été définies en s’appuyant sur les enseignements d’une analyse comparative de douze Delivery Unit et en tenant compte du contexte local.
La seconde étape a consisté à définir les secteurs spécifiques d’intervention du BES. L’équipe du cabinet Dalberg a mené un exercice de hiérarchisation pour identifier les secteurs prioritaires sur la base de facteurs tels que la contribution au PIB, la contribution à l’emploi ainsi que les opportunités pour le BES d’apporter de la valeur ajoutée. C’est au terme de ce processus que les mines et l’agriculture ont été ciblés comme secteurs prioritaires. Deux autres axes de travail centrés sur la gouvernance et le leadership ont été pris en compte afin d’améliorer l’efficacité de l’action gouvernementale.
Quelles sont les principales priorités dans chacun de ces secteurs et comment comptez-vous y faire face ? Pouvez-vous nous citer quelques résultats obtenus ?
Dans le secteur agricole, l’objectif principal est de relancer la filière ananas, de révolutionner le secteur et de positionner la Guinée comme un exportateur d’ananas leader sur les marchés internationaux. Dans les mines, l’accent est mis sur la formation pour augmenter l’employabilité des jeunes guinéens ainsi que sur le renforcement des capacités des PME nationales pour une meilleure participation aux appels d’offres du secteur minier.
Dans le secteur minier …
… Le BES et les acteurs du secteur visent, d’ici 2020, à offrir une formation de qualité à 5 000 jeunes par an dont 3 000 ouvriers spécialisés, 1 600 techniciens supérieurs et 400 ingénieurs. Dans ce cadre, le BES soutient trois interventions clés : (i) le renforcement du système de formation des ouvriers spécialisés avec la mise en place d’Unités de Formation Mobile (UFMo) ; (ii) l’appui à la transformation de l’Institut Supérieur de Mines et Géologie (HIMG/ISMG) en une École d’Excellence en Mines et Géologie ; et (iii) l’appui aux initiatives de renforcement des capacités des PME locales qui évoluent dans le secteur minier.
Le programme phare du BES porte sur la création d’Unités de Formation Mobiles (UFMo). Les entreprises minières ont exprimé des besoins urgents en main d’œuvre qualifiée dans quatre domaines principaux (électricité, maçonnerie, mécanique et conduite d’engins). Cependant, le système de formation professionnelle existant ne peut répondre à ces besoins compte tenu des contraintes auxquelles il fait face, à savoir le manque d’équipements pour la formation pratique, la pénurie de formateurs et l’absence d’infrastructures modernes de formation. Les UFMo, structures légères composées de deux salles de classe et d’un grand atelier pour la formation pratique, pourront répondre aux besoins à court terme des entreprises minières. Le BES prend également une approche systémique pour s’assurer que les actifs des UFMo (curricula, méthodologies de formation, équipements, etc.) sont progressivement réintégrés au système de formation professionnelle existant. La première UFMo sera établie dans la région de Boké et aura une capacité annuelle de formation de 1 200 ouvriers spécialisés. Depuis le lancement du BES, je n’ai ménagé aucun effort pour faire de l’insertion professionnelle dans le secteur minier une priorité tel qu’indiqué dans la Politique de Contenu Local.
Dans l’agriculture …
… En collaboration avec le Ministère de l’Agriculture, le BES soutient la relance de la filière ananas. En plus d’être considéré comme l’un des meilleurs fruits tropicaux au monde, l’ananas de Guinée pourrait tirer parti de la demande régionale croissante et du positionnement géographique stratégique du pays pour développer l’exportation internationale. Les exportations d’ananas guinéens sont aujourd’hui désespérément faibles, malgré le potentiel latent du secteur et des avantages comparatifs significatifs de la Guinée. Le BES, en parfaite synergie avec le Ministère de l’Agriculture, a adopté une approche chaîne de valeur pour analyser les contraintes pesant sur la filière et proposer des interventions ciblées pour y remédier.
D’ici 2020, le BES et les acteurs de la filière visent l’augmentation des superficies cultivées de 400 à 800 hectares, l’augmentation des rendements moyens de 30 à 50 tonnes par hectares et l’augmentation des exportations par voies aériennes à 2 500 tonnes par an. Pour atteindre ces objectifs de production et d’exportation, le BES compte accompagner l’extension des terres cultivées, favoriser la production de rejets de qualité, améliorer l’accès à l’irrigation et soutenir la commercialisation.
Le BES, en collaboration avec le Ministère de l’Agriculture, a récemment distribué des motopompes à deux coopératives agricoles et supervisé la livraison, la commercialisation et la distribution de 800 tonnes d’engrais spécifiques à l’ananas en collaboration avec les coopératives agricoles. Le BES a également lancé une étude visant à mettre en place un système de financement innovant et abordable du matériel d’irrigation pour les producteurs d’ananas. En effet, les produits financiers actuels ne sont pas adaptés aux flux de trésorerie ni aux niveaux de revenus des agriculteurs. Pour favoriser l’accès aux équipements d’irrigation, les agriculteurs ont besoin de produits financiers avec des conditions de remboursement flexibles et plus adaptées à leurs flux financiers. Grâce au BES, ces derniers pourront bientôt se procurer des kits d’irrigation en leasing, en partenariat avec des institutions financières et des fournisseurs d’équipements.
Les efforts de coordination du BES autour de la filière ananas ont conduit à une collaboration sans précédent entre les acteurs du secteur agricole en Guinée. Ainsi, trois bailleurs, l’USAID, la Coopération belge et la Banque mondiale, participent désormais à la relance de la filière. L’approche intégrée, coordonnée par le BES, a permis de renforcer les échanges d’informations et favorise la collaboration entre les producteurs, les ONG sur le terrain, les bailleurs et les structures gouvernementales. Le partenariat récent avec le programme « Feed the Future » de l’USAID en est un parfait exemple. Plus de 50 agriculteurs, dans les régions de Maférénya et Kindia, ont été formés à la production et à la commercialisation de l’ananas grâce à un financement de l’USAID et au matériel pédagogique développé par l’équipe du BES. Le BES a également soutenu le lancement d’un programme de radio rurale axé sur les techniques de production de l’ananas et financé par l’USAID.
En matière de leadership…
… Dans le cadre de l’amélioration de l’efficacité de l’action gouvernementale et de la promotion des talents guinéens, le BES compte développer et lancer un programme de formation au leadership et d’encadrement de jeunes diplômés guinéens talentueux. Ces jeunes seront recrutés au sein des ministères et des agences gouvernementales et bénéficieront de la formation sur une période de deux ans. Le lancement de ce programme de leadership permettra d’attirer les jeunes guinéens dans la fonction publique et de concrétiser l’ambition du gouvernement guinéen d’améliorer la qualité des services publics pour stimuler la croissance économique et le développement. La première promotion de jeunes professionnels sera recrutée début 2018.
En ce qui concerne la gouvernance…
… Dans le domaine de la gouvernance, le BES vise à renforcer les capacités de coordination et de suivi du gouvernement en soutenant le Groupe thématique Développement Rural au sein du Cadre de Concertation et de Coordination (CCC). L’action du BES sur un groupe thématique servira de modèle à répliquer dans d’autres groupes et de pilote à l’approche système vers laquelle le BES souhaite progressivement aller.
Quelles sont les priorités pour financer la croissance Guinéenne ?
Le gouvernement actuel est déterminé à améliorer les perspectives économiques du pays et à attirer les investisseurs. En novembre 2013, le gouvernement a organisé à Abu Dhabi une table ronde des bailleurs sur le thème « Guinea is back ». Cette table ronde qui s’est tenue en prélude de la stratégie de réduction de la pauvreté du gouvernement pour 2013-2015, a rassemblé des partenaires au développement et des acteurs du secteur privé. Elle a permis de montrer que la Guinée était stable et prête à accueillir des investisseurs. Cette nouvelle dynamique a été renforcée en 2014 par la restructuration de l’Agence de Promotion des Investissements Privés (APIP) et en 2015 par ma nomination en tant que Premier Ministre (je suis issu du secteur privé). Le Président a également rajeuni le gouvernement, nommé des femmes à des postes clés et intégré dans l’administration des personnes compétentes ayant une expérience professionnelle avérée au niveau national et international.
Le gouvernement met l’accent sur des politiques visant à capitaliser sur les ressources naturelles abondantes du pays, y compris dans l’agriculture, l’énergie et les mines, tout en améliorant l’environnement des affaires afin de favoriser la participation du secteur privé et de promouvoir les investissements étrangers. Au cours des derniers mois, nous avons accueilli des investisseurs de divers pays, y compris des Emirats Arabes Unis, de la Turquie et de la Chine. Nous comptons poursuivre cette dynamique et positionner la Guinée comme un hub d’investissements émergent, transparent, et avec des opportunités et retombées intéressantes pour les investisseurs. Avec un taux de croissance solide de 6,6% en 2016 et estimé à 6,7% en 2017, l’économie guinéenne offre des perspectives prometteuses. Le Plan National de Développement Économique et Social (PNDES 2016-2020), finalisé et adopté, définit le cadre de cette croissance et prévoit un taux de croissance de plus de 10% d’ici 2020.
Quel est votre message aux guinéens qu’ils soient en Guinée ou à l’étranger ?
La Guinée est totalement engagée dans un processus de changement. Le pays est déterminé à valoriser son immense potentiel et à initier une transformation économique et sociale. Pour relever ce défi, la Guinée a besoin de tous ses talents et de toutes ses compétences. Nous, les membres du gouvernement, voulons travailler main dans la main avec nos concitoyens pour nous assurer que les engagements pris sont respectés. Nous tenons également à ce que les guinéens prennent connaissance des initiatives en cours et n’hésitent pas s’impliquer dans la construction collective de notre nation.
J’aimerais remercier l’ADFD pour son soutien inestimable dans la conception et l’opérationnalisation du BES au sein de la Primature. Notre partenariat avec l’ADFD témoigne des excellentes relations qui existent entre la Guinée et les Émirats Arabes Unis. C’est aussi une manifestation de notre ouverture aux investissements étrangers.
Nous tenons aussi à remercier nos autres partenaires pour leur soutien au Bureau d’Exécution Stratégique. A nos futurs partenaires, nous voulons que vous sachiez que la Guinée est prête à collaborer avec des organisations qui l’aideront à réaliser sa vision.