En visite à Paris fin octobre 2017, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a évoqué avec Emmanuel Macron les perspectives de développement économique des deux pays, notamment dans les énergies renouvelables. L’Égypte affiche de grandes ambitions dans ce domaine, qui voit éclore de nombreux projets dans le solaire, l’éolien et bientôt le nucléaire.
Les enjeux France-Egypte
Mardi 24 octobre, Emmanuel Macron a reçu pour la première fois son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, pour une rencontre placée sous le signe de la lutte contre le terrorisme. Durant leur entretien, les deux chefs de l’État ont également abordé la relation économique privilégiée des deux pays, qui depuis 2015 ont notamment signé des contrats d’armement pour plus de 6 milliards d’euros. Preuve de son enthousiasme, le président français a annoncé qu’une délégation d’entreprises françaises se rendrait en Égypte début 2018 pour étudier les possibilités d’investissement dans les zones économiques du canal de Suez. « Je partage avec le président Sissi le souhait de voir les échanges économiques entre nos deux pays se développer dans tous les secteurs, a déclaré Emmanuel Macron lors de son discours. Pour réaliser cet objectif, nous avons défini ensemble plusieurs secteurs où la France bénéficie d’une expertise reconnue, où elle est attendue et peut apporter son concours. Je pense notamment au transport ferroviaire ou aux énergies renouvelables. »
La position énergétique de l’Egypte
Deuxième puissance économique d’Afrique derrière le Nigéria, l’Égypte a subi coup sur coup la crise financière mondiale de 2008, puis l’instabilité politique provoquée par la vague des printemps arabes en 2011. La dégradation de son économie n’a toutefois pas changé la donne énergétique dans le pays qui, face à la baisse de sa production de pétrole et de gaz, peine à satisfaire les besoins croissants de sa population. Devant la hausse exponentielle de la demande en électricité, qui a triplé en 1990 et 2010, le gouvernement d’Abdel Fattah al-Sissi, élu à la présidence égyptienne en mai 2014, a poursuivi la politique de diversification et d’efficacité énergétique impulsée par le Conseil suprême de l’énergie en février 2008. D’ici 2022, l’Égypte entend ainsi produire 20 % de son électricité à partir de sources renouvelables grâce à son immense potentiel géographique et ses larges ressources naturelles. Si ses capacités hydroélectriques sont déjà largement exploitées via les cinq barrages opérationnels situés sur le Nil, qui fournissaient 12 % de l’électricité nationale en 2010, la baisse de leur production a incité le pays à se tourner vers les énergies solaire et éolienne, où les perspectives de croissance seraient considérables, selon le rapport de la Banque africaine de développement sur les énergies propres en Égypte.
D’importants projets en cours dans l’éolien, le solaire et le nucléaire
Avec un vent moyen de 10,5 m/s le long du canal de Suez, le pays méditerranéen a commencé à capitaliser son potentiel éolien en 2001 avec l’installation de plusieurs fermes éoliennes d’une capacité de 550 MW à Jebet el-Ziet. Selon l’agence américaine de commerce extérieur, le lancement de plusieurs autres projets seraient en cours afin d’atteindre 7,2 GW de puissance installée et de produire 12 % de l’électricité nationale d’ici 2022. Dans le secteur photovoltaïque, l’Égypte entend également profiter de ses 9 à 11 heures de soleil quasi-quotidiennes pour ajouter 3,5 à 4 GW d’énergie solaire à sa production électrique d’ici 2027. Une première installation d’une capacité de 140 MW a déjà été mise en service à Kuraymat en 2011, suivie d’une seconde plus modeste (10 MW) à Siwa en mars 2015. Plusieurs autres projets seraient en cours, dont la construction de deux centrales d’une puissance cumulée de 100 MW, confiée à EDF Énergies Nouvelles et au groupe égyptien Elsewedy Electric.
Comme annoncé au lendemain de la visite d’Abdel Fattah al-Sissi par l’électricien français, les travaux devraient commencer dès le premier trimestre 2018 au sein du complexe solaire de Benban (1,8 GW). Quelques mois plus tard, fin 2018, débutera ensuite le chantier d’un projet solaire de 25 MW remporté par Voltalia, spécialiste français des énergies renouvelables. Début septembre, la Banque chinoise AIIB avait également annoncé être prête à financer à hauteur de 210 millions de dollars un autre projet de 11 centrales pour une capacité totale de 490 MW. En Égypte, la décarbonation du mix énergétique se poursuit aussi sur le terrain de l’atome, avec la coopération de la Russie. Deux ans après la signature d’un accord pour la construction de la première centrale nucléaire égyptienne à El-Dabaa, Rosatom (agence fédérale russe de l’énergie atomique) s’est déclarée confiante sur son entrée en vigueur avant la fin de l’année 2017. D’une capacité de 4,8 GW, l’établissement comptera quatre réacteurs, dont la construction devrait s’achever en 2022 pour un début de production prévu en 2024.
Ludovic Marèchal