Robert Mugabe a démissionné mardi soir remplacé par Emmerson Mnangagwa rentré dans son pays jeudi, après un court exil. Celui-ci prêtera serment ce vendredi.
Le désormais ex-président, 93 ans, cède la place à un autre vétéran de la guerre de libération qui a arraché l’ex Rodhésie des griffes de l’Apartheid.
Réputé brutal et adepte de la force, le nouvel homme fort du pays, Emmerson Mnangagwa, bénéficie du soutien de l’armée, des vétérans, du parti au pouvoir, la ZANU PF, de l’opposition et des hommes d’affaires. Un consensus rare dans ce pays divisé par une éternelle réforme agraire qui divise les adeptes de la justice sociale aux partisans de l’efficacité économique.
Conscient de ces enjeux, Emmerson Mnangwa, président par intérim jusqu’aux élections générales de 2018, arrive au point culminant d’une carrière qui a commencé dans le maquis. Tout comme Mugabé, il a fait beaucoup de pays africains,arme à poing. de la Tanzanie en Egypte, de la Chine au Mozambique, le « crocodile » s’est spécialisé dans le renseignement.
Arrêté puis torturé (il y a perdu l’usage de son oreille gauche), l’adolescent d’alors a échappé plusieurs fois à la mort avant de rencontrer Robert Mugabe en prison. Il sera son secrétaire particulier, menera avec lui la résistance depuis le Mozambique, se spécialisera en Droit puis, une fois l’indépendance, héritera presque naturellement des services de renseignement. Plus d’une bavure est signalée à son encontre.
Dans les années 80, il écrase la faction dissidente de Joshua Nkomo. La répression fera 20 000 morts. A la fin des années 90, l’armée zimbabwéenne intervient en République Démocratique du Congo et se signale dans la mise à sac du Kasaï. A la fin des années 2010, le « crocodile » soutient son camarade Robert Mugabe et réprime l’opposition dans une élection difficilement gagnée.
Ironie du sort, c’est sur cet homme au passif lourd que repose la survie de la démocratie zimbabéenne. Le pays qui a évité le coup d’Etat est au bord de l’abîme, avec une armée plus que jamais omniprésente.