En ce début d’année, Euler Hermes se prête à l’exercice traditionnel du bilan et des résolutions. Le leader mondial de l’assurance-crédit revient sur ce qui a marqué l’économie mondiale en 2017, et dessine le portrait macroéconomique international de 2018. Quels enseignements tirer de l’année écoulée, et qu’attendre de celle qui s’annonce ? Financial Afrik propose à ses lecteurs le contenu édifiant du texte publié par la firme ce 18 janvier.
Une croissance mondiale record en 2017 malgré un contexte politico-économique inédit
Enseignement #1 : Croissance mondiale globalisée, commerce mondial régénéré
2017 a été marquée par une rare synchronisation des cycles économiques, permettant à la croissance mondiale de dépasser la barre des +3% pour la première fois depuis 7 ans (+3,2%). La croissance américaine a accéléré (+2,3%), la zone euro a fait un retour remarqué (+2,4%), et la Chine surprend chaque jour par sa transition économique réussie (+6,8%). En conséquence, après deux années décevantes et malgré un renforcement du protectionnisme, le commerce mondial en volume a cru de +4,3% en 2017.
Enseignement #2 : L’inflation aux abonnés absents ?
L’absence d’inflation dans cette phase favorable du cycle économique mondial a étonné plus d’une banque centrale, d’autant que le rebond du prix des matières premières n’a pas suffi à raviver les prix. En 2017, les nouvelles technologies ont gagné du terrain dans les chaines d’approvisionnement et les habitudes de consommation à l’échelle mondiale, ce qui a certainement contribué à maintenir les prix à un faible niveau. De plus, l’agressivité concurrentielle de certains pays sur la scène internationale, dont la Chine, n’a rien arrangé.
Enseignement #3 : Le risque politique ne suffit plus à faire dérailler l’économie mondiale
Elections aux Etats-Unis et en Europe, tensions dans la péninsule coréenne, au Moyen-Orient et dans certains pays sud-américains et africains, négociations du Brexit, résurgence du protectionnisme (plus de 400 nouvelles mesures en 2017), … Malgré un renforcement du risque politique en 2017, la croissance a dépassé la barre des +3%. La complaisance des marchés financiers et la plus grande tolérance aux risques des multinationales prouvent que le risque politique ne suffit plus à enrayer la croissance.
Enseignement #4 : La fin du modèle unique de politique économique ?
De la Chine à la Turquie, en passant par la Russie et l’Europe, les politiques économiques coordonnées, parfois même dogmatiques, n’ont pas donné les résultats escomptés. Pire, elles ont contribué à renforcer les déséquilibres économiques entre les pays. Désormais, la divergence semble être devenue la norme : plus d’interventions de l’Etat, moins d’ouverture commerciale, et des politiques monétaires et budgétaires moins traditionnelles. Cette évolution nécessitera un suivi des risques pays plus marqué pour anticiper les retournements.
Enseignement #5 : Un trésor de guerre abondant pour les entreprises
Dans le monde entier, les entreprises sont assises sur un confortable matelas de trésorerie de 7 000 Mds USD. Beaucoup d’entreprises, n’ayant pas trouvé la bonne société dans laquelle investir ou avec laquelle fusionner, ont dû se résigner à des programmes de rachat de leurs propres actions. Ce montant de richesse record s’est constitué dans un contexte d’optimisme prudent pour les entreprises.
« La grande leçon de 2017, c’est que l’allumage synchronisé des trois moteurs principaux de la croissance mondiale, à savoir les Etats-Unis, l’Europe et la Chine, a été suffisant pour contrer un environnement politico-économique peu favorable. Malgré une inflation qui ne redécolle pas, des tensions politiques exacerbées et une certaine tendance à la thésaurisation des entreprises, la croissance mondiale a atteint en 2017 un plus haut en 7 ans, et percé un plafond de verre que l’on pensait difficilement franchissable », résume Ludovic Subran, Chef économiste d’Euler Hermes.
Perspectives encourageantes pour 2018, vigilance pour 2019
Perspective #1 : Un renforcement de l’économie mondiale attendu cette année
Aux Etats-Unis, la croissance devrait accélérer de manière significative en 2018 (+2,6%), soutenue par la réforme fiscale. La décélération chinoise (+6,4%) semble sous contrôle, et l’Europe tiendra bon (+2,2%) si elle réussit sa percée institutionnelle, une fois l’incertitude électorale italienne passée. Ainsi, la croissance mondiale est attendue à +3,2% en 2018, comme en 2017. Les échanges commerciaux en volume devraient continuer de croître, légèrement sous les +4%.
Perspective #2 : Les conditions de financement resteront avantageuses
Même si toutes les banques centrales vont continuer à resserrer leurs politiques monétaires (hausse des taux aux Etats-Unis, fin de l’assouplissement quantitatif en zone euro, règles macro prudentielles en Chine), les ménages et les entreprises devraient à nouveau bénéficier de conditions de financement favorables. Malgré le retour progressif attendu de l’inflation, les effets de second tour sur les salaires devraient être limités.
Perspective #3 : Le calendrier politique restera soutenu
De nombreuses élections seront organisées en Amérique du Sud, en Asie, ou encore en Italie et en Russie. Le Brexit continuera de peser sur le contexte économique international, les velléités isolationnistes des Etats-Unis ne devraient pas disparaitre et les tensions dans le Golfe pourraient persister. L’économie mondiale devrait toutefois résister à ces vents contraires.
Perspective #4 : Au final, le plus grand risque, c’est d’être déçu
En 2018, de nombreuses (bonnes ou mauvaises) surprises viendront ponctuer l’actualité. En ce sens, les agents économiques devront se montrer vigilants, dans un contexte où les marchés financiers sont dopés à la confiance. Les incertitudes politiques – dette américaine, fenêtre d’action réduite pour l’Europe, atterrissage en douceur de la Chine – combinées aux attentes extrêmement élevées des entreprises, ménages et marchés boursiers, qui espèrent beaucoup des allégements fiscaux annoncés, pourraient accroître la volatilité économique et financière mondiale.
« S’il est peu probable que la conjoncture se retourne en 2018, la situation pourrait se compliquer en 2019. La décélération attendue aux Etats-Unis (+2,2%) et en zone euro (+2%) pourrait mettre l’économie mondiale sous pression d’ici 2 ans. De plus, si les marchés se mettent à douter de la valorisation des entreprises de la Tech, et se rendent compte que trop d’entreprises sont valorisées à un trop haut niveau, un choc financier n’est pas à exclure. On peut aussi s’inquiéter du développement croissant du shadow banking, et des grands pays qui hésitent à se lancer dans des réformes structurelles d’envergure. Tous ces éléments incitent à la prudence pour 2019. Une renaissance économique a commencé, et les nouvelles technologies indiquent la route à suivre. On connait la destination, mais le parcours est semé d’embûches », conclut Ludovic Subran.
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