La 29 ème édition du Forum du Club des Banques et Établissements de crédit d’Afrique s’est ouverte le jeudi 8 février à Dakar(Sénégal) en présence d’une centaine de représentants de la profession.
Sous le thème de «la banque de demain, de son contexte réglementaire, des grands enjeux de l’innovation et de la digitalisation», la rencontre a été le lieu d’un débat technique et stratégique entre de grands économistes, invités à présenter une vision hélicoptère du secteur et les praticiens, «topographes» d’une activité confrontée à des enjeux technologiques, financières et réglementaires.
Le débat, posé d’abord par l’économiste Dhafer Saidane, s’est intéressé au rôle des banques étrangères ( (définies comme établissements de droit national ou non mais dont la maison mère est à l’étranger), qui représentent 60% des actifs bancaires de la région. Faut-il limiter cette trop grande influence des acteurs internationaux, lesquels sont porteurs certes de plus values, mais aussi, comme l’a si bien rappelé M. Saidane, amplificateurs potentiels de risques systémiques ?
Doit-on encourager la concurrence dynamique entre les locales et les étrangères ou, au contraire, insister sur la restriction prudente prônée par une vision sécuritaire de la réglementation ?
En attendant, l’on note différentes tendances qui décrivent un environnement en forte mutation. La recomposition actuelle du secteur bancaire de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest-Africaine) laisse entrevoir une importante réduction de la voilure des banques françaises et européennes en général comparées aux panafricaines. La part des banques de l’UE est de 14,8% sous l’effet de la montée en force des banques marocaines et panafricaines.
Ce renouveau n’a pas pour autant atténué le risque de concentration. Ainsi, «treize groupes détiennent 80% des actifs bancaires de l’UEMOA», relève le professeur Babacar Sène, autre économiste intervenant, qui attire l’attention sur la trop forte concentration des prêts et des titres publics».
Actuellement, quelque 27% des titres publics des États (jusqu’à 40% dans certains pays ) sont détenus par les banques, ce qui provoque un effet d’éviction au détriment des PME et des entreprises en général.
Abordant le risque systémique de façon générale, le professeur Sène interroge l’arsenal réglementaire mis en place par la Banque Centrale. La mise en place de règles de contrôle sur une base consolidée, les test de contrôle et la surveillance de 28 groupes bancaires transfrontaliers à caractère systématique, sont autant de mesures prises par le régulateur pour contenir ces risques systémiques.
Pas de risques systémiques
Afin de faire face à de telles catégories de risques, la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a mis en place, en plus de l’encadrement en amont, un fonds de stabilité financière et un fonds de garantie de dépôts. Autant de dispositions salutaires qui n’apportent pas cependant de réponse par rapport à la capacité du régulateur à résorber un gros risque systématique. Avec 4 mois d’importations, la BCEAO dispose d’une marge de manœuvre limitée.
La rencontre des banquiers Africains qui se termine le 9 février est le cadre idoine pour traiter des grandes questions de l’heure. De Bocar Sy, président de la BHS et de l’APBEF, qui estime indispensable la maîtrise du couple innovation et risques dans ses différents volets, en passant par Patrick Mestrallet, président du Club, qui est revenu sur les principales missions de cette association à but non lucratif fondé en 1989, la rencontre de Dakar est un laboratoire d’idées entre praticiens, théoriciens et représentants de l’Etat. Pourvu que le régulateur s’inspire des nombreux points de vue et remarques soulevés lors de ces échanges riches rendus possibles par l’implication de Thierno Seydou Nour Sy, vice président de l’Association des banques du Sénégal, également vice-président du Club des banques et établissements de crédit d’Afrique et directeur général de la Banque nationale pour le de développement économique (BNDE).