Parce que le combat pour la liberté n’est pas un compte d’exploitation rationnel, Nomzamo Winifred Zanyiwe Winnie Madikizela-Mandela plus connue sous le nom de Winnie Mandela a incarné jusqu’à son ultime souffle, les honneurs et les désillusions du camp qui a combattu l’odieux système de l’Apartheid.
Sa disparition, annoncée ce 2 avril 2018, dans une Afrique du Sud libérée mais en proie, aujourd’hui plus que jamais, aux inégalités et à la pauvreté, rappelle au président Cyril Ramaphosa, nouvellement élu, les nombreuses attentes d’un peuple trompé par des politiciens qui confondent politique et business.
Disparue à l’âge de 81 ans, Winnie Mandela s’était mariée avec Nelson Mandela en 1958. Le couple s’est séparé en 1992 dans ce qui était un divorce aussi politique.
A l’inverse du réalisme de Mandela, Winnie incarnait une option plus radicale. Militante de l’ANC, elle restera aux côtés de son mari et le soutiendra sans faille durant les vingt-sept années de prison de celui-ci.
Pendant les années de lutte, Winnie est associée aux fameux supplices du pneu consistant à brûler les supposés traîtres noirs. Les témoignages accablants de ses complices devant la Commission Vérité et Réconciliation achèveront d’isoler définitivement Winnie Mandela. Celle qui donna tant à la lutte de l’Apartheid a pour ainsi directeur assumé le côté sombre de toute lutte révolutionnaire.
Un divorce familial et politique
En avril 1992, Nelson Mandela annonce sa séparation d’avec sa femme et met fin à leurs 38 ans de mariage. Le divorce est prononcé en mars 1996.
« J’ai été l’homme le plus seul qui soit », dira Mandela alors que des rumeurs d’infidélité entouraient son ex-femme. Celle qui est devenue Madikizela-Mandela présidera la ligue des femmes de l’ANC de 1993 à 1997. Vice -ministre des Arts, de la Culture, de la Science et des Technologies, elle démissionne en 1994 à la suite d’accusations de corruption. Elle reste populaire auprès de la base radicale de l’ANC, celle qui refuse la collaboration du gouvernement noir avec les colons blancs.
Femme complexe en dépit de son discours radical contre les Blancs, elle montre une réelle tristesse lors de l’assassinat de Marike de Klerk, l’ancienne épouse du dernier président blanc Frederik de Klerk, qu’elle qualifia de grande amie.
En 2003, elle est reconnue coupable par la justice sud-africaine de 43 accusations de fraudes, de 25 accusations de vols et est condamnée à quatre ans de prison. Récemment, Winnie fustigeait le train de vie des dignitaires de l’ANC: «Ce qui se passe contredit totalement ce pourquoi nous nous sommes battus. Maintenant, notre combat porte sur le nombre de voitures au garage et l’épaisseur de notre portefeuille d’actions dans l’industrie minière». Il y avait manifestement deux Winnie Mandela. L’histoire reconnaîtra la sienne.