Morose depuis avril, la place financière kényane est tirée à la baisse par les désengagements massifs des investisseurs institutionnels étrangers.
Marché « frontière », la bourse de Nairobi a les deux principales caractéristiques attachées à ces places financières en devenir : un potentiel de croissance important et… une forte volatilité à la baisse. Une performance erratique que les investisseurs positionnés sur les valeurs cotées kényanes redécouvrent, bien malgré eux : principal indice de la place de Nairobi, le Nairobi All Share Index (NASI) entame son troisième mois consécutif de baisse depuis ses plus hauts d’avril. Rien qu’en mai, il a cédé près de 4 %. Une contre-performance qui est néanmoins sans commune mesure avec la déroute constatée (-11 %) sur la même période par le NSE 20 Share index, l’indice suivant les vingt premières valeurs boursières kényanes (EABL, Equity Bank, KCB, Barclays Kenya, Safaricom…).
Pour expliquer cette désaffection boursière, la Standard Investment Bank (SIB), dans sa dernière étude de marché, relève que « les investisseurs étrangers ont été vendeurs nets de plus de 4 milliards de shillings (40 millions de dollars). de titres au cours du mois de mai, conduisant à une érosion des grands indices […]». Résultat, sur la période écoulée, la valorisation boursière des valeurs kényanes s’est évaporée de plus de 95 milliards de shillings (945 millions de dollars).
Les analystes de la firme Cytonn Investments, cités ce mardi par notre confrère Business Daily, abondent dans le même sens lorsqu’ils soulignent qu’il y a eu « une forte pression vendeuse exercée par les investisseurs institutionnels internationaux, ces derniers s’étant désengagés du marché après la fin de la saison des divdendes », qui courrait précisément jusqu’en mai. Davantage, « ce fléchissement intervient dans un contexte où le volume de transactions est en hausse significative (18,4 milliards de shillings échangés en mai, contre 15,1 milliards en avril), un signe de mouvements baissiers lourds », décrypte Olivier Muneza, courtier chez MBEA Brokerage.
Pour Cytonn Investments, il s’agirait cependant d’une prise de profit normale et temporaire, « la plupart des investisseurs étant sortis de leurs positions en haut de cycle, avec la possibilité de ré-entrer dans le futur à un niveau de valorisation plus faible », conclut la société dans sa note. Un optimisme relatif que ne partagent pas tous les opérateurs de marché. « Depuis avril, c’est près de 15 % de valorisation qui ont été perdus », rappelle ainsi Isidore Mutabazi, analyste financier chez CDH Capital à Kigali, pour qui « on peut craindre un début de marché baissier, avivé par l’accroissement actuel de l’incertitude économique ».
Par Jacques Leroueil, correspondant à Kigali.
Evolution boursière du Nairobi All Share Index depuis le 1er avril 2018
Source : Bloomberg
Capitalisation boursière totale de la bourse de Nairobi au 1er avril 2018 :
2893 milliards de shillings (28,6 milliards de dollars)
Capitalisation boursière totale de la bourse de Nairobi au 5 juin 2018 :
2546 milliards de shillings (25,2 milliards de dollars)
Variation en % sur la période : – 11,99 %
Source : Nairobi Securities Exchange