Les Comores, Demain
Dans ses interventions, le président des Comores, Azali Assoumani, semble conscient des difficultés propres à chaque étape : il fixe le cap et désigne les obstacles à surmonter. Il a une vision globale du développement des Comores. Celle-ci peut évidemment être discutée en présentant des remarques justifiées et en proposant des alternatives. Il pense qu’il faut réunir au préalable les meilleures conditions avant de se lancer dans la phase de l’investissement.
Dans sa stratégie, Azali Assoumani considère que l’amélioration des conditions de vie des populations, en particulier les plus fragiles, est une condition essentielle. L’amélioration du niveau d’instruction des populations est aussi considérée comme une condition économique, sociale et politique du développement. Pour lui, les meilleures conditions de développement sont dans l’amélioration des conditions de base : la réalisation des grandes infrastructures de transport, routières, portuaires.
En effet, les Iles Comores enregistrent de nouvelles infrastructures qui boostent le développement : des ports bien abrités et bien desservis, de bons réseaux de transport, et un important réseau routier. On cite, entre autres, la réalisation des campagnes d’entretien et de réhabilitation des routes, notamment l’entretien de 288 km de routes pour un montant de 1,6 milliards KMF sur fonds propres, la réhabilitation de 200 km, le lancement des appels d’offres pour Hahaya-Mitsamiouli sur une distance de 23 km et Dindri-Lingoni sur 10,3 km. On note également la signature du contrat pour les axes Fomboni-Miringoni (26km) et Itsinkoudi-Mtsangadjou (13km), les études en cours pour les tronçons Koimbani-Sidjou-Idjinkoundzi, le lancement des travaux pour Moroni-Hahaya (17 km) et Ouani-Bambao (20 km), le lancement appels d’offres pour le suivi des travaux des routes Moroni-Foumbouni sur une distance de 47 km, la route reliant Sima-Moya sur une longueur de 26 km, et la réalisation des études pour les routes circulaires des trois îles, soit 300 km.
Le pays prévoit également investir 7 milliards KMF pour les réhabilitations des infrastructures routières dans le cadre du 11ème FED et la signature de contrat avec un partenaire pour la création d’une société de concassage. Le chef de l’Etat avait fait une visite technique sur le chantier de la route Dindri-Lingoni, lors de son passage à Anjouan où les travaux avancent à grande vitesse. Sur une longueur de 11 km à travers la montagne, ce tronçon est financé par le fonds saoudien d’un montant qui dépasse les 7 milliards de kmf, et sera opérationnel avant la mi 2019.
Facteur humain
Dans cette démarche de développement, le facteur humain a été, à juste titre, considéré comme décisif. La disponibilité d’une main d’œuvre nombreuse et bien formée a été ô combien nécessaire à l’expansion économique que connait le pays.
Le choix stratégique qui a été fait semble avoir tenu compte des expériences vécues par de nombreux pays. En effet, le développement ne doit pas se baser sur une main d’œuvre nombreuse, peu qualifiée et à coût dérisoire. La plus-value et le succès sont dans la part d’innovation et de création de toute production industrielle. Ce qui demande un personnel qualifié, bien formé et ouvert aux technologies de pointe. Dans ce domaine aussi, l’investissement est de la responsabilité des pouvoirs publics qui doivent y consacrer des moyens importants. Ces investissements lourds demandent du temps pour se mettre en place et ne commencent à produire leurs effets qu’à moyen terme. Entre-temps, les besoins sociaux sont colossaux et leur insatisfaction peut être un obstacle majeur à la démarche de développement et à la cohésion sociale. La stratégie mise en œuvre a veillé donc à ce que les besoins sociaux soient pris en charge dans une grande mesure : logement, santé, emploi, le rôle primordial des grandes infrastructures comme facteurs et conditions du développement.
En deux ans, le visage des Comores a beaucoup changé. Les conditions de développement ne se bornent plus à quelques aires jusque-là limitées et favorisées par la présence des ports, d’infrastructures routières ainsi que par l’existence d’universités et de centres de formation fournissant une nombreuse main d’œuvre de qualité.
Transport, tourisme, énergie… des secteurs pour le développement économique
Pour les Comores, le transport demeure une priorité pérenne des politiques d’Etat. Des systèmes de transport efficaces et des réseaux modernes sont, de ce fait, une nécessité pour le développement économique, le bien-être social, la production à grande échelle et la préservation de l’environnement. Le secteur du transport connaît une véritable mutation. Un grand nombre de projets ont été réalisés ou sont en phase de réalisation, afin de rendre ce secteur plus performant et plus efficace dans sa contribution dans le développement économique du pays.
Coté tourisme, la relance du secteur est une des priorités du président de la république, à savoir la signature d’un protocole avec un opérateur Tanzanien (VIGOR) pour l’extension de l’Hôtel Itsandra, la construction d’un nouvel hôtel dans la capitale Moroni, la construction d’un front de mer (Water Front), et la négociation en cours avec le Groupe ARMADA pour la reprise de l’hôtel Galawa.
Dans le secteur de l’énergie, le gouvernement ne lésine pas sur les moyens : il a notamment investi 10 millions d’euros avec la société émiratie pour les groupes électrogènes. A ce sujet, le palais présidentiel précise qu’une solution durable vers les énergies renouvelables reste à l’étude, la relance des activités de la centrale à fuel lourd de 18MW et établissement d’une feuille de route. Parmi les autres activités sectorielles, on note la négociation avec le FIDA d’un programme de relance du secteur pour un montant de 4 milliards KMF, l’élaboration d’un plan de relance de la société nationale de pêche pour un budget de 2 milliards KMF, la mobilisation de fonds pour l’opérationnalisation de l’office nationale de la vanille (PNUD) et l’instruction en cours d’un vaste programme de relance des Centres ruraux de développement économiques (CRDE).
Le chemin vers le développement
La stratégie de développement économique adoptée par les Comores apparaît aujourd’hui très nettement. Ses contours se précisent ainsi que les étapes prochaines. Le bilan des réalisations durant les deux années est suffisamment révélateur de la démarche choisie, comme les projets qui sont annoncés dessinent les contours de la nouvelle phase de développement qui complète et suit les précédentes. Les conditions financières extrêmement favorables qu’a connues le pays ont permis la mise en œuvre d’une stratégie en plusieurs étapes qui s’est mise progressivement en place. Elle a consisté en la création, au préalable, des meilleures conditions de développement du pays, afin d’éviter que les actions entreprises soient entravées par des insuffisances qui auraient constitué de véritables goulots d’étranglement et auraient sérieusement compromis les résultats attendus. On a vu que dans les pays en développement, les insuffisances en matière d’infrastructures de transport ont constitué de véritables obstacles au décollage économique. Il fallait d’abord assurer les meilleures conditions objectives de développement en réalisant des travaux importants en infrastructures. Dans ce sens, les moyens financiers dont a disposé les Comores ont été consacrés à réaliser des travaux lourds et coûteux qui serviront sur le long terme et que seul le budget public pouvait supporter.
Les Comores Emergent en 2030, une prospérité partagée par tous
Le partage des fruits de la croissance sera un facteur critique d’appréciation de l’émergence. En effet, la croissance n’a de sens que si chaque citoyen en ressent les bienfaits. Dans ce cadre, les Comores Emergent devra se traduire par une amélioration concrète des conditions de vie des populations, avec un niveau de revenu élevé, une répartition plus équitable et une classe moyenne désormais dominante. Le plein emploi sera assuré, grâce à la création de 80 000 emplois bien rémunérés, qui permettront d’absorber les nouveaux arrivés sur le marché du travail. Les indicateurs sociaux seront en phase avec le niveau de richesse du pays. Les citoyens Comoriens bénéficieront d’une couverture santé universelle et d’un accès généralisé au logement. Une politique ciblée d’aide permettra de réduire de façon significative le niveau de pauvreté et de bâtir une société plus juste et plus solidaire. L’émergence se traduira également par un niveau d’éducation plus élevé, donnant à chaque citoyen des opportunités pour se prendre en charge et assumer sa vie de façon responsable, ainsi que par une amélioration du bien-être physique et moral des citoyens. Elle favorisera une vie culturelle plus riche et plus épanouissante.
Plaçant la dimension humaine au centre, les Comores Emergent s’appuiera sur une population éduquée, ouverte et tolérante. Au niveau mondial, les Comores seront reconnu comme un acteur important de la paix, ainsi qu’un pionnier et un modèle de l’économie verte, assumant un rôle primordial dans la lutte contre le changement climatique et la promotion de l’économie verte.
Par Youcef MAALLEMI, envoyé spécial à Moroni (îles des Comores)