Par Adama Wade.
La vague d’entrée en bourse à la cote de la BRVM d’entités bancaires a suscité depuis quelques années un engouement réel auprès des investisseurs aussi bien institutionnels qu’individuels. A l’occasion de ces introductions en bourse, certaines banques ont, il est vrai, réalisé des valorisations par la méthode des multiples de fonds propres plutôt significatifs, 2,9 à 3 fois pour les plus élevées.
Mais il est important, en analysant de plus près la performance de ces titres une fois cotés, de faire une distinction claire entre les entités bancaires opérationnelles (BICICI, Ecobank Cote d’Ivoire, SGBCI, Coris Bank, etc…) et les holdings de groupes bancaires, la plus significative d’entre elles à la BRVM étant Ecobank Transnational Inc (ETI).
Cette distinction tient, entre autres, à deux raisons essentielles :
D’une part, au fait que très peu d’investisseurs, et notamment ceux non institutionnels, font vraiment la différence entre les comptes consolidés des holdings qui leur sont présentés pour leur faire miroiter de belles performances futures et ceux intrinsèques aux sociétés holding elles-mêmes.
Les comptes de ces dernières, faut-il le rappeler, ne comportant pour principales sources de chiffre d’affaires que les dividendes reçus de leurs filiales et les frais d’assistance technique facturés à ces dernières, qui font désormais l’objet d’une attention toute particulière de la part des régulateurs.
Du côté de leurs charges, outre celles liées à leurs salaires, les frais financiers relatifs à l’endettement de ces holding,soit pour capitaliser leurs filiales soit pour le leur rétrocéder, constituent souvent le principal poste. De ce fait, il peut arriver qu’un groupe bancaire présente des comptes consolidés avec les résultats nets largement positifs et que la société holding, elle, soit en situation de perte, entrainant ainsi son incapacité à verser des dividendes sur leurs titres cotés. Cette situation a souvent été à la base de la frustration, de la désillusion et quelque fois même du désespoir de petits porteurs qui n’ont pas su faire cette distinction.
D’autre part, à la difficulté de ces groupes a élaborer une «histoire » cohérente pour le titre coté et surtout à leur incapacité à exécuter la stratégie susceptible de délivrer cette histoire dans la durée. Même si la faiblesse de la liquidité des marchés de capitaux en zone UEMOA peut être perçue comme un facteur de distorsion, il convient en effet de ne jamais perdre de vue que le cours d’un titre coté reflète d’abord et avant tout les anticipations de performances de leurs détenteurs. Il leur faut par conséquent bien comprendre les facteurs réels de performances des entités cotées, et apprécier la capacité des équipes dirigeantes à excéder leurs attentes, de façon consistante, au risque d’avoir une déconnexion totale entre la performance du titre et celle de ces groupes. Les entités opérationnelles (banques) étant plus localisées et plus proches de la réalité de leurs investisseurs, sont de ce fait plus avantagées que les sociétés holdings, couvrant plusieurs zones géographiques, perçues comme complexes et donc plus difficiles à décrypter.
Il résulte de tout ce qui précède une situation plutôt classique: certaines introductions en bourse se font à des prix très élevés, offrant ainsi à leurs émetteurs l’opportunité d’encaisser des plus-values importantes, et ensuite le cours du titre ne connait, en moyenne, qu’une pente descendante, laissant de nombreux investisseurs sans possibilité de réaliser le moindre gain dans la durée.
A l’échelle de l’UEMOA, quelques banques opèrent encore dans le cadre de holdings régionales en dehors de ETI : c’est le cas de Coris, du groupe Banque Centrale Populaire, de Oragroup, pour ne citer que quelques-unes.
Nous apprenons d’ailleurs que ORAGROUP envisage une entrée en bourse bientôt pour la sortie partielle de ses actionnaires actuels de son capital : UNE FAUSSE BONNE IDEE ?
Il reviendra aux investisseurs d’apprécier.