Par Valentine F.
À l’approche de la fin de l’année, le Qatar multiplie les déclarations de choix stratégiques pour atteindre la diversification de son économie et l’autosuffisance, impulsée par son récent plan quinquennal de développement.
La compagnie aérienne du Royaume du Qatar a annoncé sa possible séparation de l’alliance Oneworld. Qatar Airways pourrait ainsi voler de ses propres ailes. Akbar al Baker, président depuis 1997 a tenu un discours remarqué mardi 13 novembre à Madrid lors d’une conférence organisée par l’Association internationale du transport aérien (IATA). L’origine de cette prise de position viendrait du refus des compagnies fondatrices de l’alliance Oneworld de nouer des accords avec Qatar Airways ainsi que d’« attaques » répétées de celles-ci, d’après un article écrit par Fabrice Gliszczynski dans La Tribune. La compagnie semble bien décidée à muscler sa stratégie commerciale et ce malgré la crise diplomatique qui l’empêche de survoler l’espace aérien de l’Arabie saoudite et des Emirats arabes unis. La compagnie entend également renouveler et améliorer sa flotte par l’achat de 50 Airbus au printemps dernier incluant une dizaine de long-courrier A321LR. Ne voulant pas s’arrêter là, le PDG a également exprimé son souhait de commander un supersonique plus puissant et doté de 250 places (contre 100 pour le Concorde) pour un retour sur investissement optimal. Des choix tactiques pour une compagnie possédée à 100% par le Royaume du Qatar.
Muscler son positionnement économique avec le Qatar National Vision 2030
Et le pays ne compte pas en rester là. Pour soutenir son développement, le Qatar a entamé une politique de diversification économique. Et pour faire face au blocus, notamment, il a décidé de diversifier ses exportations (hors hydrocarbures). Ainsi le 17 septembre dernier, le pays a annoncé vouloir produire d’ici 2023 des voitures électriques de fabrication nationale. Un projet unique au Moyen-Orient. Pas moins de six usines sortiront de terre avec pour objectif de produire 500 000 voitures d’ici 2024.
Autre atout de ce pays, le gaz. Le Qatar l’a bien compris et souhaite en produire davantage. Fin septembre, une autre entreprise d’Etat, Qatar Petroleum, envisageait de porter à 110 millions de tonnes par an la production de gaz. Une hausse qui fait suite à une précédente de 30% décidée en 2017, sur fond de crise diplomatique entre le pays et ses quatre voisins arabes.
Une politique en réaction au blocus imposé mais pas uniquement. En effet, elle tire aussi ses racines en 2008 au moment où le pays songeait déjà à sortir de son pré carré. Le Secrétariat Général pour le développement lançait le Plan « Qatar National Vision 2030 » qui se destinait à construire un « pont entre le présent et le futur » et dans lequel il envisageait son développement économique et celui d’une justice sociale pour tous, en harmonie avec la nature.
Un plan quinquennal de développement pour atteindre l’autosuffisance
Situé en zone désertique, le pays ne bénéficie que de très peu d’atouts naturels. Ce qui le place 66e sur la liste des pays émetteurs de CO2. Le 14 mars dernier, le pays lançait un plan quinquennal de développement exclusivement destiné à rationaliser la consommation d’énergie et à encourager le développement des énergies renouvelables. Le tout devant aussi permettre d’augmenter son niveau d’autosuffisance pour l’agriculture et la pêche. Un vœu pieu lorsqu’on connaît les conditions climatiques extrêmes du pays.
Mais l’enjeu d’autosuffisance alimentaire est beaucoup trop important pour l’écarter. Le pays multiplie les contacts afin de nouer des partenariats avec des pays étrangers comme lors de la visite début novembre, d’une délégation d’opérateurs économiques algériens. Des responsables du groupe Hassad Food à Doha, fonds d’investissement spécialisé dans les produits agricoles et directement rattaché à la Qatar Investment Authority, le fonds souverain du Qatar les a reçus en vue de nouer des partenariats.
En 2012, le Sahara Forest Project Facility sort du sable au Qatar après un premier succès dans le désert jordanien. Il s’agit alors de favoriser la recherche et d’optimiser les technologies environnementales permettant la « croissance réparatrice dans les zones désertiques du monde entier » peut-on lire sur le site du projet. Dès la fin de l’année 2012, des concombres poussaient grâce à l’énergie solaire et à l’eau issue de la mer.
Le Qatar maintient donc ses objectifs à l’approche de la Coupe du Monde sur son sol pour dépasser les inconvénients liés au blocus économique qu’il subit. Après la récente prise de position de la compagnie nationale Qatar Airways ainsi que le choix de muscler les importations gazières de la Qatar Petroleum, la voie semble désormais ouverte pour que d’autres entreprises étatiques renforcent leur compétitivité à l’international.