En marge du sommet africain sur le pétrole, CAPE VII, tenu à Malabo, du 3 au 5 avril, Financial Afrik s’est entretenu avec Mahaman Laouan Gaya, Secrétaire Général de l’Organisation des Producteurs de Pétrole Africains (APPO). Pour cet ingénieur pétrochimiste, ancien ministre dans son pays, le Niger, les producteurs africains du pétrole et gaz gagneraient à fédérer leurs forces.
Excellence Monsieur le Secrétaire Général, une semaine durant, Malabo a été la Capitale Africaine du Pétrole, avec l’organisation par l’APPO d’une série de réunions et de manifestations. De quoi s’agissait-il?
En effet, du 28 mars au 05 avril 2019, l’APPO a organisé plusieurs manifestations à Malabo en Guinée Equatoriale. Nous avons tenu successivement la réunion du Comité ad’hoc juristes de l’APPO, la réunion des Directeurs Généraux des Sociétés Nationales des Hydrocarbures, la toute première réunion ordinaire du Conseil Exécutif de l’APPO, la réunion ordinaire du Conseil des Ministres et la 7ème édition du CAPE (Congrès Africain sur le Pétrole et Exposition). Ce sont des réunions et autres activités statutaires de l’APPO, qui consacrent aussi la fin de la réforme institutionnelle de notre organisation. Le gouvernement équato-guinéen a aussi souhaité la tenue de ces manifestations à Malabo, pour qu’elles entrent dans le cadre de l’«Année de l’Energie en Guinée Equatoriale». Il y a lieu de rappeler qu’en août 2018, le Ministre des Mines et des Hydrocarbures, SEM Gabriel Mbaga Obiang Lima, a lancé l’initiative ‘’2019, Année de l’Energie en Guinée Equatoriale’’, dont l’objectif est de positionner Malabo comme Capitale Africaine de l’Energie tout au long de l’année 2019. Pour le gouvernement équato-guinéen, cette initiative vise d’abord à promouvoir les opportunités d’investissement dans des projets énergétiques de première importance en Guinée Equatoriale et en Afrique et, ensuite, le gouvernement d’utiliser sa diplomatie énergétique et pétrolière au service du continent africain. Comme vous l’avez constaté, il y a eu une participation record à la 7ème édition du CAPE, dont l’ouverture a été présidée par SEM Obiang Nguema Mbasogo, Président de la République de Guinée Equatoriale, en présence de SEM Thomas Yayi Boni, ancien Président de la République du Bénin, des Secrétaires Généraux de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP), SEM Mohammed Sanusi Barkindo, du Forum International de l’Energie (FIE), Dr Sun Xiansheng et du Forum des Pays Exportateurs de Gaz (GECF), SEM Yury Sentyurin. Etaient également présents, des Ministres et Plénipotentiaires en charge des hydrocarbures des Pays Membres de l’APPO, des Directeurs Généraux des Sociétés pétrolières africaines et internationales, des industriels et experts du secteur des hydrocarbures,….bref comme je l’ai tantôt dit, ces manifestations s’apparentent aux Jeux Olympiques des hydrocarbures africains et ont constituer un véritable point de ralliement mondial des acteurs de l’énergie et du pétrole. Pour 2019, la Guinée Equatoriale, se distingue déjà dans sa diplomatie pétrolière à travers une trajectoire distinguée dans l’organisation d’événements régionaux et continentaux et dans la promotion de liens diplomatiques forts entre partenaires africains et internationaux du secteur de l’énergie.
Quel est le poids de l’Afrique dans les réserves et la production de pétrole dans le monde ?
L’exploitation pétrolière dans le monde a commencé depuis des millénaires ; cependant l’exploitation moderne en tant que telle, à partir des plateformes de forage, a commencé au début 19ème siècle en Amérique et en Asie, un peu plus tard en Europe et beaucoup plus tard en Afrique. Quand vous faites un survol de la géographie pétrolière du monde, l’on se rend compte que certaines régions (Amérique du Nord, pays du Proche et Moyen-Orient, Mer du Nord,…) jadis pionnières de la production pétrolière, sont aujourd’hui soit dans la phase de déplétion, soit dans celle de l’exploitation des hydrocarbures dits non-conventionnels (gaz et pétrole de schiste,…).
Aux Etats-Unis, après près de deux siècles d’exploitation, les gisements de pétrole et le gaz conventionnels sont en voie d’épuisement et depuis quelques années, l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels (pétrole et gaz de schiste) est en plein essor. Au Moyen Orient, le pétrole a été abondamment exploité depuis bientôt un siècle; et aujourd’hui, les estimations des réserves de pétrole de cette région sont sujettes à contestation. C’est un débat qui a cours depuis la fameuse ‘’guerre des quotas’’ au milieu de la décennie 1980-1990.
La Sous-estimation par certaines institutions et multinationales pétrolières des réserves et du potentiel en hydrocarbures de l’Afrique dénote d’une plaisanterie néo-coloniale.
En mer du Nord, le pétrole communément appelé Brent est pratiquement en voie de disparition, physiquement parlant. Quant au continent africain, entré tardivement dans l’ère du pétrole moderne, seuls quatre (4) pays ont commencé une modeste exploitation pétrolière dans les années 60. Aujourd’hui, environ 20 pays sont identifiés comme producteurs de pétrole (les 18 pays membres de l’APPO, le Soudan du Sud et la Tunisie) et une trentaine d’autres mènent des opérations de prospection et de recherche. Il faut reconnaitre que le continent est essentiellement constitué de bassins sédimentaires ; tous les pays africains, à l’exception du Burkina Faso et du Cap-Vert, font l’objet de nombreuses activités de prospection menées par des compagnies pétrolières étrangères pour la plupart.
Des bassins offshore et onshore, tant au large de l’Afrique de l’Est, de la partie africaine de l’océan indien, de l’Afrique de l’Ouest, que des pays de l’hinterland sont peu explorés et présentent de très bonnes perspectives (ils sont situés pour l’essentiel en Tunisie, Maroc, Mozambique, Kenya, Ouganda, Tanzanie, Sénégal, Sao-Tomé et Principe, Niger, Mali, Madagascar, Comores,…). Le continent peut peser entre 13 et 15% des réserves mondiales d’hydrocarbures, et presque le même ratio en termes de production (même si les statistiques occidentales tendent à sous-estimer et dévaloriser le potentiel du continent noir), et mieux, ces 15 dernières années, 1/3 des découvertes de pétrole dans le monde l’ont été en Afrique. La sous-estimation par certaines institutions et multinationales pétrolières des réserves et du potentiel en hydrocarbures de l’Afrique dénote d’une plaisanterie proprement néo coloniale ! Les informations les plus contradictoires circulent sur le niveau du potentiel pétrolier africain. Des chiffres aussi fantaisistes qui parlent d’une Afrique ne disposant que de 4% des réserves mondiales, pendant que certaines sources évoquent 6%, d’autres 8 ou 12%, parfois 13% pour les plus ‘’généreux’’.
Pour le moins, il convient de dire que les auteurs de ces estimations ne s’accordent pas entre eux. Et pourtant, les ressources en hydrocarbures africaines sont sous exploitées, voire sous explorées et leur potentiel global est là…très abondant et il n’y a l’ombre d’aucun doute que ce potentiel peut rivaliser aujourd’hui avec celui de n’importe quelle autre région du monde. Cela m’amène d’ailleurs à affirmer que si l’Afrique devait être considérée comme un seul producteur, il est certain que notre continent défiera un jour l’Arabie Saoudite, la Russie et les États-Unis. Avec donc, la quasi-totalité des pays africains qui sont dans la phase de recherche et/ou d’exploitation d’hydrocarbures, il est certain que la politique mondiale du pétrole et du gaz, va se tourner dans les années à venir vers le continent africain.
Mais comment les statistiques pétrolières sont-elles produites et pourquoi les pays africains n’y ont-ils aucune emprise ?
Il faut d’abord reconnaître que l’histoire des recherches pétrolières a toujours été engluée dans une sorte de huis clos, particulièrement dans les pays du Sud. A ce niveau, il est clair que beaucoup de nos Etats sont très loin de disposer d’un minimum d’information crédible sur leur potentiel en hydrocarbures. Ce sont les sociétés étrangères qui détiennent toutes les informations sur les gisements miniers et pétroliers à partir des études géologiques, géophysiques et géochimiques entreprises souvent depuis l’époque coloniale. Du point de vue des données géo-scientifiques, les informations sont totalement asymétriques : les Etats producteurs africains n’ont pas accès à toutes les informations dont disposent les compagnies pétrolières ; ces dernières étant les seules à connaître la valeur réelle de notre sous-sol.
Beaucoup de nos Etats sont très loin de disposer d’un minimum d’information crédible sur leur potentiel en hydrocarbures.
Disposant seules de moyens financiers et techniques colossaux pour établir des estimations fiables, elles ne s’en cachent pas pour tricher sur le traitement et l’interprétation des données géologiques et géophysiques, la sous-estimation de la qualité du pétrole, des réserves, de la production et la surestimation du cost-oil (coûts d’investissement et coûts de production),….Cette escroquerie est très défavorable aux pays africains non seulement dans l’enlèvement frauduleux de quantités inestimables de pétrole brut (cas de cargaisons fantômes), mais aussi dans le partage de rente pétrolière. Les pays hôtes restants ainsi dramatiquement sous-informés, ils constituent des proies faciles de ces compagnies prédatrices ultraspécialisées et bien informées.
Le manque d’autonomie stratégique, politique et économique des pays africains est dû en partie à l’insuffisante prise en compte du contenu local dans leur gestion pétrolière et à un manque criard de compétences en quantité et en qualité sur toute la chaîne de valeurs de l’industrie pétrolière. Aujourd’hui, plus qu’hier, le développement de l’industrie des hydrocarbures dans n’importe quel pays africain suppose la montée en puissance des compétences locales et aussi des compagnies africaines à grande expérience (NNPC du Nigéria, Sonatrach d’Algérie, Sonangol d’Angola,…). Je rappelle aussi que dans le cadre de son Programme d’action, l’APPO vient de sortir un ‘’Guide de promotion de Contenu Local dans l’industrie pétrolière et gazière en Afrique’’.
Le but de ce Guide est d’identifier les actions et étudier la faisabilité de leur mise en œuvre à l’effet d’accroître progressivement le Contenu Local dans l’industrie pétrolière des Pays Membres de l’APPO avec un objectif d’atteindre une moyenne de 30% à l’horizon 2030. Ce document a été largement diffusé lors de nos réunions de Malabo et je profite pour demander encore à tous les Pays Membres de l’APPO son appropriation et sa mise en œuvre dans le cadre de leur politique nationale pétrolière, et particulièrement dans les législations pétrolières.
Comment expliquez-vous le paradoxe africain, producteur du pétrole brut souvent en pénurie de pétrole raffiné ?
Votre question soulève le sempiternel problème de la sécurité des approvisionnements énergétiques en Afrique ; particulièrement l’électricité et les produits pétroliers. En fait, ce n’est pas le secteur pétrolier uniquement qui en souffre. La situation énergétique globale de l’Afrique est rigoureusement le reflet de son très faible niveau de développement économique et social. Le déficit énergétique criard dont souffrent les pays africains ne reflète nullement la rareté des ressources énergétiques, puisque l’Afrique dispose à l’état virtuel d’un potentiel considérable en énergies fossiles (hydrocarbures, uranium) et renouvelables (solaire, éolien, hydraulique, géothermie, biomasse…et même déchets urbains). Les ressources énergétiques naturelles que possède le continent lui offrent une chance unique de favoriser son développement humain et économique.
Cependant, comme vous le dites, l’Afrique souffre du ‘’paradoxe de l’abondance’’, à savoir que l’abondance de ces ressources ne se traduit pas en niveaux équivalents en matière de prospérité et de développement économique et social. En effet, l’Afrique dispose de plus de 13% de réserves mondiales d’hydrocarbures (pétrole brut, gaz naturel et charbon), plus de 20% de réserves mondiales d’uranium, d’une des plus grandes réserves hydroélectriques exploitables mondiales avec un potentiel de plus de 300 GW et un productible de 1100 Twh (le continent malheureusement n’exploite que 8% de ce potentiel). Par ailleurs, l’Afrique a 15% de réserves mondiales de géothermie (15 GW), 38% en potentiel éolien (110 GW), plus de 300 jours d’ensoleillement par an (soit 11.000 GW), sans oublier les 40 milliards de m3 de gaz torchés des sites pétroliers annuellement rejetés dans l’atmosphère. Et dire que toute cette manne n’a jamais ou très peu servie à nos populations.
C’est en cela justement que ceux qui qualifient notre situation de “paradoxe de l’abondance’’ n’ont pas tout à fait tort. Avec une population qui avoisine le milliard d’habitants, la consommation d’énergie primaire per capita de l’Afrique reste la plus faible du monde avec 0,63 tep (tonne équivalent pétrole) contre 1,76 tep au niveau mondial (4,31 tep pour l’Europe de l’Ouest, 8,46 tep pour l’Amérique du Nord). Si l’on exclut l’Afrique du Nord et l’Afrique du Sud, ce taux de consommation d’énergie primaire tombe entre 0,2 et 0,4 tep pour le reste de l’Afrique, c’est-à-dire l’Afrique Subsaharienne. La consommation annuelle de pétrole du citoyen africain moyen équivaut à un tiers (1/3) de la consommation individuelle moyenne mondiale et à un vingtième (1/20ème) de la consommation d’un américain moyen.
Pire, le bilan énergétique de certains pays africains fait ressortir un taux de consommation de la biomasse (déchets agricoles et forestiers et le bois) de plus de 60% ; le reste étant constitué d’énergies dite modernes (produits pétroliers et électricité). Pour revenir à votre question, et comme je le disais tantôt, l’Afrique pèse pour plus de 13% des exportations pétrolières mondiales, mais à contrario ne consomme en produits pétroliers qu’à peine 4% de la part mondiale. Les pays d’Afrique restent encore très tributaires de leurs exportations de pétrole brut, tant en termes de devises que de recettes. Paradoxalement, les infrastructures de raffinage (quelques 50 raffineries de pétrole dont certaines en arrêt) ont des capacités très limitées et fonctionnent avec des coûts élevés vu qu’elles sont relativement anciennes (30 ans en moyenne).
D’où une part importante des besoins de l’Afrique en produits raffinés, importée majoritairement d’Asie et d’Europe. Les explications à cette situation vont au-delà du seul secteur pétrolier, pour concerner la structure de nos systèmes socio-économiques. Le constat amer, est que dans le secteur des hydrocarbures (tout comme d’ailleurs dans tout notre système socio-économique) l’Afrique est plus liée au marché mondial qu’à elle-même; et pourtant les tendances actuelles du marché international d’hydrocarbures semblent jouer en sa faveur.
Pour tirer profit de cet environnement favorable, nous sommes appelés à créer et sécuriser des marchés physiques pétroliers (régionaux et continental) notamment les flux entre les zones de production et les zones d’approvisionnement et de consommation. C’est ainsi que dans le cadre de son 9ème Programme d’actions, l’APPO est dans la dynamique d’une étude sur la création d’un marché physique africain de pétrole brut et de produits pétroliers. Pris individuellement, les marchés africains sont inefficients et la voie de salut se trouve donc dans une économie fortement intégrée. C’est le sens de cette étude qui au terme de la création de ce marché physique, nous pensons déjà à sa financiarisation.
Il est aujourd’hui inadmissible qu’avec l’abondant potentiel en hydrocarbures, un pétrole d’une très bonne qualité et un positionnement géographique très stratégique, l’Afrique ne puisse pas disposer de sa propre bourse de valeurs pour la cotation de son pétrole.
Donc, la raison d’être de l’APPO c’est de pousser à une démarche commune en matière de pétrole et de gaz ?
A sa création, l’APPA (Association des Producteurs de Pétrole Africains) devenue APPO (Organisation des Producteurs de Pétrole Africains) à la suite de sa réforme institutionnelle, avait pour objectif de servir de plateforme de coopération et d’harmonisation des efforts, de collaboration, de partage des connaissances et de compétences entre les pays africains producteurs de pétrole. Pour être plus précis, l’APPO est une organisation intergouvernementale africaine, sectorielle, spécialisée, visant à la coopération entre ses Pays Membres, à l’unification et la coordination de leurs efforts afin de trouver les meilleurs moyens pour le développement de l’industrie pétrolière en Afrique avec entre autres l’établissement d’études et de projets communs et à la création d’une industrie pétrolière intégrée dans le cadre plus général de l’intégration économique africaine. Si la libre circulation des personnes et des biens constitue une des réussites de la coopération entre les pays de certaines régions d’Afrique, le manque de convergence des politiques macroéconomiques est un frein important à l’intégration.
La sécurité énergétique permet d’établir les conditions de la croissance économique et de la paix sociale, car elle est nécessaire au fonctionnement des économies et plus largement des sociétés.
L’APPO peut être à terme une base de l’intégration économique et de la coopération africaine dans le domaine de l’industrie du pétrole. La coopération et l’intégration énergétiques en général et pétrolières en particulier peuvent jouer un rôle important dans le devenir des Etats Membres de l’APPO et à terme de toute l’Afrique. Le développement de l’Afrique dépend de la volonté de nos pays de mettre en commun leurs capacités respectives et il ne s’agit nullement pour eux de renoncer à leurs intérêts propres, mais de se servir de la coopération pétrolière comme tremplin vers une indépendance stratégique, politique, économique et énergétique plus sûre.
La production pétrolière suffirait-elle à sortir l’Afrique des pénuries énergétiques chroniques ?
Depuis quelques années le monde de l’énergie a changé et les enjeux à relever sont aujourd’hui la sécurité d’approvisionnement en énergie, la lutte contre le changement climatique et l’accès à l’énergie pour tous à un coût abordable pour toutes les classes sociales. De nombreuses réflexions sont en cours et la communauté internationale s’active depuis quelques années pour permettre à tous les pays du monde d’opter pour un développement durable avec à la clé une politique énergétique durable.
Toute politique énergétique et particulièrement en Afrique doit aller dans le sens des grandes orientations pétrolières et énergétiques mondiales énoncées par les Nations Unies (Initiative SE4All…), l’Union Africaine (Vision Minière de l’Afrique), le NEPAD, la Banque Africaine de Développement (avec le ‘’New Deal for Energy in Africa’’), le Conseil Mondial de l’Energie (avec la Résolution du Trilemme Energétique Mondial), etc…Le Conseil Mondial de l’Energie et les Nations Unies sont aujourd’hui à la pointe de ce combat avec la politique de résolution du ‘’Trilemme Energétique Mondial’’ et l’Initiative Energie Durable Pour Tous (Initiative SE4All – Sustanaible Energy For All) dans le cadre de la Décennie Internationale de l’Energie Durable Pour Tous (2014-2024). Il faut noter que le programme d’actions de l’Initiative SE4All couvre l’ensemble du secteur de l’énergie (les hydrocarbures compris), et est doté d’une feuille de route jusqu’en 2030, pour répondre à trois objectifs liés qui sont l’accès universel aux énergies modernes, le doublement du taux global de l’efficacité énergétique et le doublement de la part des énergies renouvelables afin de la porter à 30% dans le bilan énergétique de chaque pays.
Depuis son lancement, plus de 80 gouvernements dans le monde se sont formellement engagés, parmi lesquels on compte environ 45 adhésions volontaires de pays africains, dont pour l’essentiel les Pays Membres de l’APPO. Aussi, au-delà du mix énergétique que les pays doivent promouvoir dans leurs politiques énergétiques, il faut viser une diversification des économies nationales afin d’éviter de retomber dans les travers de la mono production pétrolière, comme le vivent aujourd’hui la plupart des pays africains producteurs de pétrole.
Peut-on comprendre que l’essor du continent africain dépende de sa problématique énergétique ?
La sécurité énergétique permet d’établir les conditions de la croissance économique et de la paix sociale, car elle est nécessaire au fonctionnement des économies et plus largement des sociétés. Près de soixante (60) ans après les indépendances, l’énergie apparaît comme un enjeu stratégique majeur du développement de l’Afrique. Il est pourtant reconnu de tous que le sous-sol regorge d’abondantes ressources énergétiques fossiles et celles d’origines renouvelables comme je le mentionnais ci-haut. Mais le paradoxe, c’est que malgré cette abondance en ressources énergétiques, le niveau de consommation annuelle énergétique du citoyen africain est le plus faible du monde, avec une efficacité énergétique des plus faibles.
Aujourd’hui, l’Afrique consomme deux fois plus d’énergie que l’Europe pour produire un (1) dollar de richesse. Il ne fait aujourd’hui aucun doute que l’énergie moderne est un puissant vecteur de développement à la fois économique et social, comme l’a d’ailleurs toujours démontré la corrélation entre la consommation énergétique et la croissance du PIB. Alors, je doute fort qu’une économie puisse prétendre émerger à fortiori se développer avec l’énergie de la biomasse (le bois et la paille pour l’essentiel) ou avec une moyenne de consommation énergétique annuelle par habitant aussi ridicule…que 0,4 tep. Un véritable développement économique suppose de l’énergie en grande quantité issue des grands complexes raffinerie-pétrochimie, des grands barrages hydro-électriques ou des centrales nucléaires…pas celle du bois de feu. Si l’Afrique veut connaître une croissance économique durable et éviter de sombrer dans un délabrement économique fatale, elle doit dans les décennies, voire les années à venir, devoir relever les défis énergétiques…essentiels pour sa survie.
De manière simplifiée, ces défis consistent, d’une part, à assurer les besoins des africains en une énergie moderne, abondante, à moindre coût, soucieuse des impacts environnementaux et, d’autre part, à veiller à une bonne gouvernance de nos ressources extractives. Répondre à des défis d’une telle ampleur implique une très forte volonté politique, des stratégies énergétiques bien conçues, une coopération internationale, inter-africaine et régionale beaucoup plus significative, la constitution des capacités stratégiques et institutionnelles, la formation de compétences dans le secteur énergétique et la capacité des pays à attirer les investissements requis.