Les mauritaniens ont voté toute la journée du 22 juin pour désigner un successeur au président Mohamed Abdel Aziz. Après avoir bouclé deux mandats de cinq ans, celui qui défend un bilan sécuritaire sans failles ne peut plus se représenter en vertu de la constitution. Face à son dauphin désigné, le général à la retraite Mohamed Ould Ghazouani, cinq candidats aux aspirations politiques et idéologiques différentes.
Il y a d’abord, Birame Dah Ould Abeid, candidat du mouvement abolitionniste IRA, qui a battu campagne en dénonçant l’esclavage et les inégalités sociales. Ensuite, le revenant Mobamed Ould Sidi Boubacar, ancien premier ministre sous le régime de Maouiya Ould Sid’Ahmed Taya, qui bénéficie du soutien des islamistes de Tewassoul et du milliardaire Mohamed Bouamatou aujourd’hui en exil. L’association de Ould Boubacar au régime d’Ould Taya, accusé d’une purge sanguinaire des officiers et civils negro-africains de septembre 90 à mars 1991, constitue un sérieux handicap selon les observateurs . C’est d’ailleurs sur la base de la dénonciation de ce lourd passif humanitaire que le candidat Kane Hamidou Baba de la Coalition Vivre Ensemble (CVE) a réussi de fortes mobilisations, notamment dans la communauté nègro-africaine, marginalisée par une politique d’arabisation forcée, en reniement du congrès d’Aleg de 1958 qui vit le pacte fondateur de cette improbable république islamique réunissant populations hassanophones (dialecte proche de l’arabe ) et nègro-africaines (poular, Soninké et Wolof).
Deux autres candidats complètent la mosaïque. Il s’agit de Mohamed Ould Maouloud de l’Union des Forces Progressistes (UFP), qui cumule plusieurs décennies d’expérience politique mais doit faire avec la puissance ascension de nouveaux leaders d’une opposition plus tranchante dans le discours et plus active dans la rue. L’inconnu de ce scrutin est Mohamed Lemine El-Mourteji El-Wavi , 40 ans, inspecteur du ministère des Finances. « On doit reprendre le programme éducatif. Entre 4 et 6 ans, on va enseigner les langues nationales. Toutes les langues nationales, on doit les enseigner avec l’arabe et le français, le wolof et le soninké, et le poular », déclare le cadre du Trésor sur les ondes de RFI.
Le vote a débuté depuis 7H du matin. les électeurs sont répartis dans 6907 bureaux de vote dont 2406 à Nouakchott, la capitale, et 74 bureaux à l’étranger. En attendant les premières tendances des élections, voici la revue de de presse consacrée au regard des médias internationaux.
«L’ancien ministre de la Défense, Mohamed Ould Ghazouani, grand favori du scrutin», s’époumone Mediapart. Le journal d’Edwy Plenel est rejoint par la presse main stream. «L’ancien ministre de la défense Mohamed Ould Ghazouani, favori de la présidentielle en Mauritanie», selon Le Monde, qui ajoute que Sidi Ould Boubacar est le rival le plus sérieux du dauphin du président Mohamed Abdel Aziz. «Tout autre choix constituerait un « retour en arrière », a affirmé le président sortant lors de l’ultime meeting de M. Ould Ghazouani jeudi soir, sur le site de l’ancien aéroport de la capitale, devant quelque 10 000 personnes, dont de nombreux jeunes. M. Ould Abdelaziz a prédit une élection de son compagnon d’armes dès le premier tour», écrit Le Monde.
Pour sa part, TV5 Afrique, relaie un communiqué, de l’équipe de celui qu’il présente comme le «principal candidat de l’opposition, Sidi Mohamed Ould Boubacar, ancien chef de gouvernement de transition (2005-2007), qui a dénoncé une série d' »irrégularités dès les premières heures du scrutin » samedi, dont la « diffusion de slogans devant les bureaux de vote ». La Croix abonde dans le même sens: «les cinq adversaires du candidat du camp présidentiel, Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed, dit Ould Ghazouani, lui aussi ex-général – M. Ould Abdel Aziz ne pouvant se représenter après deux mandats – dénoncent une volonté de perpétuation d’un régime « militaire » et des risques de fraude».
Le site Alakhbar met en exergue la petite phrase du président sortant selon laquelle « les Forces armées et de sécurité participent à l’encrage de la démocratie et elles vont continuer à veiller sur la stabilité du pays». Cette sortie du président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, est à opposer à l’appel de quatre candidats contre toute confiscation du vote du peuple.
Radio France Internationale fait le zoom sur le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) qui a fait un dernier point avant la fermeture des bureaux. «Quelques Incidents avec les représentants des candidats ont été signalés, mais tout est rentré dans l’ordre. Il y a une dizaine de bureaux qui ont ouverts avec du retard. Mais aucun bureau n’est allé au delà de 19 heures», relève le média qui a dépêché une équipe sur le terrain.
France Info met l’accent sur l’esclavage, « triste record détenu par ce territoire essentiellement désertique, grand comme deux fois la France, et situé au Nord du Sénégal. La Mauritanie est en effet considérée comme l’un des pays au monde où le nombre d’esclaves est le plus élevé en proportion de la population : entre 1 et 4%», poursuit le premier portail d’informations de la France qui s’appuie notamment sur Amnesty International.
L’Agence de presse APPA Indique quant à lui que «le scrutin pour l’élection présidentielle en Mauritanie, démarré ce samedi à 7h locales et pour lequel 1,5 million d’électeurs sont appelés à choisir entre six candidats, ne suscitait pas en milieu de matinée un réel engouement, notamment à Nouakchott, la capitale, où les rangs devant les bureaux de vote sont clairsemés». Un constat confirmé par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui indiquait que le taux de participation aux élections présidentielles mauritaniennes de ce samedi 22 juin est estimé à 30% à la mi-journée.