Que l’on ne s’y trompe pas. Derrière la chasse aux africains devenue un sport saisonnier en Afrique du Sud, c’est l’héritage de Mandela qu’on brûle. L’Ubuntu c’est pour la carte postale. La réalité est tout autre comme l’ont eu à le constater les milliers d’hommes d’affaires qui ont participé au World Economic Forum à Cap Town, ville des jet-setteurs et des privilégiés en front de mer, au milieu d’un Océan de misère où la vie ne vaut pas un smartphone.
Le slogan de la «Rainbow Country», cette Nation Arc en Ciel qui devait s’ériger sur les décombres de l’Apartheid, sonne aujourd’hui creux dans les rues de Johannesburg et de Pretoria où l’extrême pauvreté côtoie l’extrême richesse. D’un côté la futuriste Sandton, « le kilomètre le plus riche d’Afrique » comme l’appelle-t-on, toute honte bue. Ce lieu d’organisation de forums internationaux dont celui, à venir, de la Banque Africaine de Développement intitulé « Invest in Africa » est la vitrine écarlate d’un pays extrêmement riche qui a tourné le dos au reste du pays et à la la miséreuse Alexandra, un nouveau Far West ou, plutôt, une Calcutta en réalité augmentée. Cinq kilomètres séparent ces deux zones de Johannesburg. Autant dire un gouffre d’inégalités, de frustrations distendues par le poids de l’histoire.
Il n’en pouvait pas être autrement. Le pays le plus inégalitaire du monde (de par son coefficient de Gini qui est de 63 contre une moyenne continentale de 45 et une moyenne mondiale de 38) en est aussi le plus violent et, on le voit, le plus xénophobe. La violence de ces derniers jours est le cri de colère d’une masse noire analphabète dans sa majorité, aux cellules familiales détruites depuis l’Apartheid, surclassée par une immigration africaine plus entreprenante.
Il faut le dire, la majorité sud-africaine n’a vu que les mirages d’un programme Black economic empowerment (BEE) qui, au final, a fabriqué des milliardaires comme Cyril Ramaphosa, l’actuel président, qui a ses mines juteuses, et promu des fantoches leaders comme Jacob Zumba qui ont fini d’éteindre la dernière lueur d’espoir d’un héritage qui porte aussi les idéaux de Walter Sisulu et de Steve Beko alias Bantu Stephen Biko. Un combat universel pour, en reprenant la définition de Nelson Mandela, « la libération de l’homme », qui n’aurait pas triomphé sans l’aide décisive de tout le continent africain dont le Nigeria et tous les pays dits de la ligne de front.
Une amnésie collective? L’on ne peut blâmer l’homme de la rue d’avoir oublié cette solidarité décisive mais l’on peut, sans coup férir, reprocher à une élite sans rêve et sans idéal d’avoir sacrifié l’idéal révolutionnaire qui devait libérer l’Afrique du Sud politiquement, économiquement et socialement. Que restera-t-il encore du rêve d’unité et d’intégration africaines après ces terribles scènes de chasse à l’homme ? Quid du mince espoir suscité par la récente adoption de la Zone de libre-échange continental (ZLECA) à Niamey?
Après vingt cinq ans de gouvernement ANC, les désillusions sont grandes pour le reste du continent qui pensait avoir trouvé enfin sa locomotive, cette Chine qui ferait de lui ce que l’Empire du Milieu et avant lui, le Japon, tous deux adeptes de la théorie du vol des oies sauvages de l’économiste Kaname Akamatsu, ont fait de l’Asie du Sud Est.
Du monopole du racisme anti-africain en Afrique
L’Afrique du Sud n’assume pas son leadership de première économie du continent ni son rôle de catalyseur de l’émergence. L’immense Mandela n’a pas encore un successeur digne de son combat et de son humanisme intégral, contre, disait-il, la domination de l’homme blanc mais aussi contre la domination de l’homme noir. Les réactions tardives des leaders sud-africains montrent à tout le moins que leur capacité d’indignation est largement entamée.
Cela dit, il serait contre-productif de déclencher en retour, comme tend à le suggérer certains nigérians, un boycott des marques nigérianes (MTN, Shoprite). Ce serait ignorer largement que l’Afrique du Sud n’a pas le monopole du racisme anti-africain en Afrique. Dans la plupart des pays du continent, la présence d’africains est tolérée mais pas acceptée administrativement. Qui aurait pu penser qu’au Zimbabwe de Robert Mugabe, il est plus facile à un européen d’obtenir un visa qu’à un Africain?
Nous l’écrivions à notre corps défendant, les cas de Sibeth Ndiaye en France et Barack Obama aux USA n’arriveront pas de sitôt dans un continent où les codes de nationalité sont libellés sur l’origine, le sang, l’ethnie ou le groupe élus, et non sur le sentiment de vouloir vivre ensemble. Il est temps de tenir des Etats généraux sur l’intégration africaine et sur le sens de la nationalité, du droit de citoyenneté, de résidence et d’établissement en Afrique. Autrement, l’on se condamne à de telles violences qui tuent à petit feu ce cher panafricanisme qui luit en chacun de nous et qu’on ne doit pas laisser s’éteindre.
Un commentaire
pitoyable hypocrisie ,mandela aussi avait échoué avant de prendre le pouvoir tout juste libérè il rassurait les juifs et anglo-saxons notamment les oppenheimer en renoncant au programme de nationalisations des terres et mines sous l’influence également du terne et couard thabo mbeki,et puis survint l’assassinat à ,point nommé de son dauphin charismatique et courageux chris hani,sans doute plus honnête que les autres apparitchiks de l’anc prêts a se laisser acheter et corrompre par les sirénes de l’establishment boer