Sommet extraordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO sur le terrorisme à Ouagadougou, 9 au 14 septembre 2019
Alors que les chefs d’Etats et de gouvernement de la CEDEAO se réunissent le samedi 14 septembre en sommet extraordinaire sur le terrorisme, les organisations signataires, qui travaillent au côté des communautés locales affectées par l’insécurité dans les pays du Sahel alertent sur l’importance de placer la protection des civils au cœur des réponses à l’insécurité dans le Sahel et rappellent le coût humain de la lutte sécuritaire contre le terrorisme.
Les civils sont les premières victimes des conflits qui sévissent dans le Sahel, touché par une crise humanitaire sans précédent. En un an, le nombre de personnes déplacées dans la région frontalière entre le Niger, le Burkina Faso et le Mali a été multiplié par cinq. Malgré les différentes mesures mises en place par les Etats de la région, la situation sécuritaire continue de se dégrader, provoquant une augmentation considérable des besoins humanitaires au cours de l’année 2019, où 13 millions de personnes ont actuellement besoin d’assistance. Aux besoins alimentaires chroniques dans la région, viennent désormais s’ajouter des besoins massifs et continus en assistance alimentaire, en eau potable, hygiène et assainissement, en abris, en santé, en protection et en éducation.
Au Burkina Faso, « la situation devient de plus en plus préoccupante. Le nombre de personnes déplacées internes a bondi de 60.000 personnes au début de l’année à plus de 271.000 à la fin du mois d’août. Les projections parlent désormais de plus de 300.000 personnes déplacées d’ici à la fin de l’année. Les acteurs humanitaires sont dépassés par l’ampleur et la dégradation rapide de la crise. » a déclaré Omer Kabore, le directeur pays d’Oxfam au Burkina Faso.
Au Mali, outre les quelques 310.000 personnes déplacées ou réfugiées répertoriées officiellement, 920 écoles sont restées non-fonctionnelles à la fin de l’année scolaire 2018 – 2019 dans les régions affectées par la crise. A la veille de la prochaine rentrée scolaire, plusieurs centaines de milliers de jeunes filles et de garçons risquent une fois de plus d’être privés de l’accès à l’éducation en raison principalement de l’insécurité grandissante en dépit de la mobilisation des moyens militaires et sécuritaires au cours des dernières années.
Face à une situation d’insécurité généralisée qui se traduit aussi par une augmentation des conflits intercommunautaires, le tout sécuritaire ne parviendra pas à endiguer la crise dans le long-terme. Il est dès lors primordial d’impliquer les communautés dans la recherche de solutions au conflit, en donnant une place égale aux hommes, aux femmes et aux jeunes, dans le respect de leurs droits. Des solutions politiques, qui répondent aux revendications et aux besoins des communautés, notamment autour de l’amélioration de la gouvernance, d’une justice de genre et de la lutte contre les inégalités doivent être menées par les chefs d’Etats et de gouvernement de la CEDEAO.
Par ailleurs, « l’aide ne doit pas être utilisée à des fins sécuritaires, mais pour permettre aux populations vulnérables de sortir de la pauvreté et vivre dignement » précise Ibrahima Coulibaly le Président du Réseau des Organisations Paysannes et de Producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA). Les objectifs sécuritaires restent différents des objectifs de l’aide et le respect des principes humanitaires, qui permet notamment l’accès aux populations les plus vulnérables, doit être garanti.
La priorité doit être donnée aux besoins des communautés à travers une approche de sécurité humaine, qui ne prend pas seulement en compte les menaces sécuritaires perçues par les Etats, mais plutôt les menaces de protection identifiées par les communautés elles-mêmes, à travers un processus participatif et inclusif. Pour ce faire, l’espace d’expression et de participation des communautés et de la société civile doit être protégé.
Alors que la crise humanitaire au centre du Sahel ne cesse de s’aggraver et de s’étendre, les chefs d’Etats et de gouvernement de la CEDEAO mais également les bailleurs de fonds et la communauté internationale doivent impérativement continuer à investir pour apporter une réponse aux besoins des populations et faire de la protection des civils une priorité afin que la lutte contre le terrorisme ne vienne pas empirer la situation humanitaire et de protection des milliers de civils déjà impactés par l’insécurité.