Dans une lettre énergique du 9 octobre 2019 adressée au président turc Recep Tayyip Erdogan, le président américain, toutes griffes dehors, dégaine: «Ne jouez pas au dur ! Ne faites pas l’idiot !». Et Donald Trump, adepte de l’effet d’annonce dont le fil Twitter est le canal le plus approprié, de préciser sa pensée en ces termes, catapultant la bonne vieille diplomatie dans les cordes:
«Vous ne souhaitez pas être responsable du massacre de milliers de personnes, et je ne veux pas être responsable de la destruction de l’économie turque – ce que je ferais (si nécessaire) », ajoute Trump dans cette courte lettre écrite pour persuader son homologue turc de revenir sur sa décision d’envahir le nord de la Syrie à l’assaut des Kurdes. La lettre écrite le jour même où l’armée turque franchissait la frontière syrienne pour combattre la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG).
Ankara considère les YPG comme une« organisation terroriste » pour ses liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) qui livre une sanglante guérilla en Turquie.
Loin de passer à l’acte le président américain semble avoir opéré un revirement étonnant, mercredi avant le départ de ses émissaires dans la région «Si la Turquie va en Syrie, c’est une affaire entre la Turquie et la Syrie, ce n’est pas notre problème». Et de poursuivre encore avec un sourire malicieux«Les Kurdes ne sont pas des anges ».
La réponse de la Turquie a été beaucoup plus méditerranéenne. «Nous n’arrivons plus à (suivre)», a répété Recep Tayyip Erdogan, cité par le quotidien turc Hürriyet, en faisant allusion à la versatilité du locataire de la Maison Blanche.
L’objectif affiché de l’opération turque est la création d’une « zone de sécurité » de 32 km de profondeur le long de sa frontière. Elle permettrait de séparer celle-ci des zones YPG et de rapatrier une partie des 3,6 millions de réfugiés syriens installés en Turquie. L’invasion turque est la réponse à la décision américaine de retirer ses troupes du Nord de la Syrie.