Alors que la mission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a été arrêtée sine die et que Conakry compte, contre vents et marées organiser un double scrutin contesté le 22 mars prochain, les langues se délient. En coulisses, Alpha Condé dit ne pas comprendre que tout le monde ait les regards tournés vers la Guinée alors que l’un des donneurs de leçons d’aujourd’hui, Muhammadu Issoufou,président en exercice de la CEDEAO, intransigeant sur la question de la limitation des mandats, s’était présenté lors des deuxièmes tours organisées au Niger face à un prisonnier et que Alassane Ouattara s’apprête à changer la constitution de son pays dans la quasi-indifférence de l’instance communautaire. Y-a-t-il deux poids deux mesures, nargue-t-on dans les parages du palais Sékhoutouréya où régne, c’est le lieu de le souligner, un incessant ballet diplomatique entre constitutionnalistes de 25 èmes heures et anciens dirigeants du monde renconvertis en renard des affaires.
Ces critiques acerbes proférées en coulisses au camarade de l’internationale socialiste et au chantre du monde libéral se reflètent dans l’interview que le président guinéen a accordé au journal français Libération, consacrant une tradition bien africaine en matière de communication. « Chaque pays a ses réalités. Est-ce qu’il n’y a pas beaucoup de présidents en Afrique qui ont fait plus de trois mandats ? » Et le professeur de fustiger une opposition guinéenne constituée selon lui d’anciens gestionnaires et anciens premiers ministres qui ont gouverné le pays. « Et on sait dans quelle situation ils l’ont mis », ironise-t-il, avant de se tourner vers le président ivoirien, son « conseiller économique » comme le surnommait-il du temps de la belle entente. « Alassane Ouattara avait lui-même dit qu’il n’allait pas laisser le pays à ceux qui l’avaient mal géré».
Interpellé sur le renoncement de celui-ci à un éventuel troisième mandat, le leader guinéen déclare agacé qu’il n’a de leçons à recevoir de personne. « Mais lui-même (Ndlr, Alassane Ouattara) a fait une nouvelle Constitution ! Alors pourquoi me pose-t-on la question à moi ? », interroge-t-il. Je n’ai de leçon de démocratie à recevoir de personne. Et je ne vois pas ce qu’il y a de plus démocratique qu’un référendum », a estimé le président guinéen.