Le secteur privé ivoirien en est encore tout à sa surprise, ce jeudi 9 avril 2020 ! Les mesures fiscales dans le cadre du plan de riposte à la pandémie du Covid-19 ne bénéficieront pas à tous comme l’avait laissé entendre le Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, dans son annonce du 31 mars 2020.
En effet, réuni en conseil des ministres le mercredi 08 avril 2020, le gouvernement a finalement décidé non seulement de ne restreindre qu’aux seules «entreprises qui éprouvent des difficultés de trésorerie» le bénéfice «d’un moratoire de trois mois pour le paiement (de certains) impôts et taxes». Mais qui plus est, que ces potentiels éligibles devront faire la preuve de cette mauvais santé en satisfaisant des conditionnalités «déterminées par arrêté du ministre chargé du Budget » ! Et comme si cela ne suffisait pas, l’ordonnance relative aux mesures fiscale, adoptée par le Conseil laisse aussi entrouverte la possibilité que la suspension des contrôles fiscaux pour une durée de trois ne s’applique pas à certains contribuables.
Au nom du réalisme économique…
Pourtant, réelle disposition-phare du Plan de soutien économique, social et humanitaire annoncé par le gouvernement, -de l’analyse du secteur industriel ivoirien-, la mesure de « différé, pour une période de trois mois, de paiement des impôts, taxes et versements assimilés dus à l’Etat… » se trouve vidée de sa substance. Un rétropédalage astucieusement menée. Mais dans les couloirs de l’immeuble SCIAM, siège du ministère auprès du Premier ministre chargé du budget, on assimile la manœuvre à du « réalisme économique ». Et on l’explique, aisément, par « l’impérieuse nécessité de préserver la solidité du cadre macroéconomique et de ne pas accroître le déficit budget ramené, au terme de l’année 2019, à 3% du PIB conformément aux critères de convergence de l’Uemoa et aux engagement de notre pays dans le cadre l’accord avec le Fmi au titre de la Facilité élargie de crédit… ».
… contre le dynamisme économique ?
En période de crise, comme celle que connaît le monde actuellement, les liquidités tendent à devenir essentielles. Notamment pour maintenir, tant soit peu, le dynamisme de l’économie. En différant pour une période déterminée, le paiement des impôts, taxes, cotisations sociales, versements assimilés, l’Etat, sans délier la bourse, fournit une précieuse aide aux entreprises en flux de trésorerie. Raison pour laquelle cette mesure est un des classics de l’arsenal des instruments économiques déployés à travers le monde actuellement pour contrer l’impact économique de la pandémie du Covid-19. « De limiter, après coup, la portée et restreindre le bénéfice par les entreprises de cette possibilité par des conditionnalités administratives n’est pas la meilleure des manières d’aider le secteur privé à faire face aux perturbations réelles et générales de l’activité économique découlant prioritairement des mesures prises par les États pour lutter contre la propagation du Coronavirus » déplore-t-on, dans le landerneau industriel ivoirien, un brin désabusé !
Albert Savana