L’on avait cru à un fake news quand Donald Trump avait évoqué l’hypothèse. Puis à une attaque médiatique coordonnée de l’Occident contre Pékin quand, quasi-simultanément, le président français Emmanuel Macron dans les colonnes de Financial Times, le secrétaire d’Etat américain aux Affaires Etrangères, Mike Pompéo dans Fow News et une enquête (à charge) dans le Washington Post n’accréditent, le doute pour les moins hardis, la certitude pour les plus engagés, d’un virus échappé du laboratoire de Wuhan. Jusque-là, rien de nouveau sous le ciel.
Cela participe des mêmes scènes de désinformation entre l’Empire du Milieu d’une part, les Etats-Unis et ses alliés d’autre part. Mais quand un scientifique, en l’occurrence Prix Nobel de Médecine, co-découvreur du virus HIV1 à l’origine du Sida, sort de sa retraite pour affirmer que le virus du Covid-19 était manipulé, alors le monde s’emballe. D’après Luc Montagnier, 88 ans, le virus SARS-CoV-2 serait en fait issu d’un tentative de fabrication d’un vaccin contre le virus du sida. Les chinois ont fauté.
En atteste, selon lui, la présence d’éléments du VIH dans le génome du nouveau virus, et même d’éléments du « germe de la malaria », argumente-t-il dans un entretien aux sites frequencemedicale et pourquoidocteur. Les caractéristiques du nouveau coronavirus ne peuvent être survenues de façon naturelle. L’accident serait intervenu dans le laboratoire de haute sécurité de la ville de Wuhan, ajoute le Prix Nobel.
Sauf que beaucoup d’observateurs ont vite fait de s’intéresser à la personnalité controversée du professeur luc Montagnier. Après avoir été porté aux cimes de la médecine par son Prix Nobel obtenu en 2008, l’homme, atypique, s’est attiré les foudres de ses collègues en développant un certain nombre de théories comme celle sur les ondes électromagnétiques émises par l’ADN ou encore celle sur les bienfaits de la papaye fermentée. Dénonçant la « terreur intellectuelle » qui règne en France, Luc Montagnier s’était « exilé » à Shangaï, d’ où il dirigeait un laboratoire tout en développant des « théories nouvelles » comme la « mémoire de l’eau ». Habitué à la polémique, Luc Montagnier dénonce depuis quelques années la dangerosité des vaccins , ce qui lui a valu une condamnation en novembre 2017 rédigée par 106 académiciens des sciences.
Tout comme hier quand il expliquait que l’on pouvait guérir du sida par une bonne hygiène de vie, les nouveaux propos du professeur Montagnier, sur la manipulation du Covid-19, ont déclenché les critiques de la communauté scientifique: « Cela n’a pas de sens. Ce sont de tout petits éléments que l’on retrouve dans d’autres virus de la même famille, d’autres coronavirus dans la nature, explique à l’AFP le virologue Étienne Simon-Lorière de l’Institut Pasteur à Paris. « Si on prend un mot dans un livre et que ce mot ressemble à celui d’un autre livre, peut-on dire que l’un a copié sur l’autre ? »
De son côté, Jean-Paul Stahl, professeur d’infectiologie au CHU de Grenoble et ancien président de la SPILF, la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française, répondant aux questions de Pourquoidocteur, critique sévèrement le Prix Nobel 2008: « je pense que cela accrédite cette « fake news » qui circule, c’est à dire la théorie du complot, c’est-à-dire le refus de l’évidence : un virus animal a été transmis à l’homme par une promiscuité que l’on peut discuter, qui est peut-être condamnable, mais une promiscuité entre ces animaux et l’être humain, avec une modification du virus qui lui permets de devenir virulent chez l’homme. Le reste ce sont des fausses nouvelles et le complotisme habituelle ».
En tout cas, le débat est relancé sur l’origine, vraie ou fausse, de ce coronavirus cause e du confinement de la moitié des habitants de la planète dans 70 pays.