Deux mois après des événements tragiques de Ngarbuh, dans la région du Nord-ouest, le Gouvernement camerounais a officiellement admis la participation des soldats dans le massacre des populations civiles dans cette localité. Une quinzaine de personnes, essentiellement des femmes et des enfants avaient été froidement assassins d’après les organisations de défenses de droit de l’homme à l’instar de Human right Watch.
Toujours est-il que le communiqué rendu public le 21 Avril 2020 par le ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence de la République Ferdinand Ngoh Ngoh à la suite de la Commission l’enquête mixte prescrite par le chef de l’Etat Paul Biya est sans équivoque.
« Après des échanges de tirs au cours desquels cinq (05) terroristes ont été abattus et plusieurs armes saisies, le détachement a découvert que trois (03) femmes et dix (10) enfants ont péri du fait de son action. Pris de panique, les trois (03) militaires aidés par certains membres du comité de vigilance ont tenté de masquer les faits par des incendies. Revenu à Ntumbaw, le sergent Baba Guida qui a conduit l’opération, a adressé à sa hiérarchie un compte rendu volontairement biaisé. Compte rendu sur la base duquel le Gouvernement a initialement fondé sa communication » affirme le Gouvernement.
Il s’agit là d’une première victoire pour les organisations de défense des droits humains, de l’Eglise catholique et de la presse qui ont régulièrement mis en cause, l’implication des militaires dans ces massacres intervenues alors que les militaires venaient de démanteler une basé des sécessionnistes.
Ainsi, au plan des responsabilités, la commission a établi que « le chef de bataillon Nyiangono Ze Charles Eric, commandant du 52ème Bataillon d’infanterie motorisée (BIM), connaissant pourtant la sensibilité de la zone de Ngarbuh, où existent de vives tensions intercommunautaires, n’a pas personnellement supervisé l’opération menée par ses hommes; le sergent Baba Guida a associé des civils armés à une opération militaire, n’a pas maîtrisé ses hommes au cours de ladite opération, a ordonné l’incendie de maisons et volontairement travesti le compte rendu de l’opération et son bilan; le gendarme Sanding Sanding Cyrille, a participé à une opération ayant causé la mort de plusieurs personnes et des incendies de maisons; le soldat de 1ère classe Haranga, a participé à une opération ayant causé la mort de plusieurs personnes et des incendies de maisons ».
Par ailleurs, les dix membres du comité de vigilance engagés à Ngarbuh 3, non encore identifiés, ont participé à une opération ayant causé la mort de plusieurs personnes et des incendies de maisons.
Le Gouvernement a annoncé l’arrestation et l’ouverture d’une procédure disciplinaire ainsi que l’ouverture d’une procédure judiciaire contre les soldats impliqués a précisé que les mis en cause sont d’ores et déjà à la disposition du Tribunal militaire de Yaoundé.
Les autorités ont pris un certain nombre de mesures visant autant que faire se peut, pour réparer l’irréparable. Il s’agit notamment de « l’exhumation des corps des victimes afin de leur donner, aux frais de l’Etat, une sépulture digne et de finaliser les constats nécessaires à la manifestation de la vérité ; Le recensement des ayants-droit des victimes par l’autorité administrative aux fins du versement par l’Etat des indemnisations et compensations appropriées. Le renforcement de la sécurisation du village de Ngarbuh, notamment par la création d’une base militaire et l’érection d’autres services publics qui devraient permettre une meilleure protection des civils contre les exactions des groupes armés, le retour des personnes déplacées et l’apaisement des tensions intercommunautaires ».
A la suite de ces évènements tragiques survenus dans la nuit du 13 au 14 février 2020 dans la localité de Ngarbuh, le Gouvernement sous la coordination du Ministre de la Défense avait créé une Commission d’enquête mixte avec pour missions de faire la lumière sur les circonstances de la survenue desdits évènements et d’établir les responsabilités des différents acteurs.
Cette Commission d’enquête a procédé à des descentes sur le terrain, où elle a effectué diverses constatations, collecté et analysé des indices et recueilli des témoignages qui lui ont permis de reconstituer le déroulement de ces évènements tragiques.
Alors que cette crise anglophone a déjà provoqué la mort de plus de 3000 personnes et occasionné les déplacements internes de plus de 400 000 personnes et plus de 60 000 réfugiés « le président de la République réaffirme son attachement à la recherche des voies et moyens de résoudre de manière pacifique la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, conformément aux recommandations du Grand dialogue National », a conclu le Gouvernement dans son communiqué.