Le professeur Didier Raoult a répondu aux conclusions de l’étude Recovery sur l’inefficacité de hydroxychloroquine dans le traitement du covid-19 dans une nouvelle vidéo datée du 9 juin. Recovery, la plus grande étude clinique jamais menée à ce jour, tombée vendredi, moins de 24 heures après la rétraction de trois des quatre auteurs de l’article paru dans The Lancet et concluant à une surmortalité due au dérivé de la chloroquine dans le traitement du covid-19, affirmait qu’il n’y avait aucun bénéfice de l’usage de ce traitement chez les « patients hospitalisés ». Contrairement à la publication de The Lancet, qui avait fait recours aux Big Data, cette nouvelle étude se fondait sur le suivi de 11 000 patients dans 175 hôpitaux du Royaume-Uni.
L’absence de suivi virologique rigoureux en limite la portée selon Didier Raoult. Réagissant à cette étude, le célèbre médecin soulève plusieurs curiosités dont un taux de mortalité de 25%, soit plus du double de ce qui est constaté ailleurs ( à rapporter au taux de 15,5% de la mortalité en réanimation de 28 jours à Marseille) : « dans Recovery, l’essai a été mené sur des patients qui présentaient des symptômes similaires mais on ne connaît pas la proportion des patients dépistés de ceux qui n’ont pas été dépistés ». Également, selon le professeur, qui a toujours insisté sur l »a précocité, » les différents stades de la maladie n’ont pas été pris en compte dans l’étude.
Didier Raoult rappelle que c’est au premier stade qu’il faut intervenir avec la chloroquine, le second est traité grâce à des médicaments comme des corticoïdes et le troisième est du ressort du réanimateur ». « On ne peut pas prévoir le même médicament pour ces 3 stades » conclut-il. L’étude britannique a le mérite pour le moins, avance le professeur marseillais, de prouver la non toxité de la chloroquine puisque, remarque-t-il, les doses administrées chez les anglais sont 4 fois supérieures à celles utilisées dans l’essai européen Discovery. « Les Anglais ont utilisé des doses jamais prescrites auparavant, 2,4g de chloroquine (contre 600 mg par jour, utilisé par l’IHU de Marseille et 400 mg par l’essai Discovery), soit quatre fois la dose habituelle. « Cela démontre enfin que la molécule n’est pas toxique et n’entraine pas de troubles du rythme cardiaque », remarque le professeur persuadé que dans cette guerre mondiale autour des traitements, le vrai faiseur de paix est le taux de mortalité.
En clair, les partisans et adversaires de la chloroquine ne trouveront pas de sitôt un terrain d’entente. A ce propos, quelle analyse faire des 95 000 morts enregistrés en France, Italie et Espagne comparés aux moins de 2 000 morts de l’ensemble Maroc, Algérie Egypte ? Une sorte de ligne Maginot entre les deux rives de la Méditerranée que la seule chloroquine ne saurait expliquer.
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Il y a surtout un conflit majeur d’intérêt lié à l’origine de l’étude : elle est menée par l’université d’Oxford qui est justement celle qui a une longueur d’avance sur le développement du premier vaccin contre le Covid-19 ! Oxford est en liens avec AstraZeneca qui a récemment proposé à Gildas une fusion (très clairement pour noyauter ce qui serait le plus gros hold-up pharmaceutique du siècle). C’est énorme et pas soulevé par les commentateurs.
Les résultats d’une étude sur les effets de l’hydroxychloroquine, associée ou non à l’azithromycine, dans un modèle d’infection expérimentale chez le macaque par le virus SARS-CoV-2, l’agent infectieux responsable de la pandémie de la COVID-19, font l’objet d’une prépublication[1] sur la plateforme Research Square, en parallèle de sa soumission à la revue Nature. Réunissant des scientifiques du CEA, de l’Inserm, de l’Institut Pasteur, de l’Université de Paris-Saclay, de l’AP-HM, de l’Université Claude Bernard Lyon 1 et Aix-Marseille université, l’étude a été réalisée sous l’égide du consortium multidisciplinaire REACTing[2].
Cette étude, lancée en février 2020, visait à évaluer le potentiel effet antiviral in vivo de l’hydroxychloroquine (HCQ), en traitement prophylactique contre le virus SARS-CoV-2 (avant l’infection pour réduire la charge virale) et lors des premiers jours après infection. Les effets antiinflammatoires potentiels de l’HCQ n’ont pas été analysés.
La première étape avait pour objectif de démontrer la pertinence du modèle animal retenu. Elle a permis de montrer que la maladie observée chez les primates non humains est très similaire à celle observée chez la majorité des patients atteints de la COVID-19 n’ayant pas besoin d’une hospitalisation.
La deuxième étape concernait la caractérisation de la pharmacocinétique de l’HCQ, c’est-à-dire l’analyse de sa concentration dans le sang et les tissus pour s’assurer qu’elle atteignait bien un niveau comparable à celui observé chez les patients humains traités avec le médicament.
Enfin, différentes stratégies de traitements ont été testées en prévention (avant l’infection des animaux), immédiatement après l’infection, et enfin à distance de l’infection (J+5 après l’infection – au moment de l’apparition des symptômes), avec ou sans azithromycine, un antibiotique également utilisé dans le traitement du COVID-19. Des doses de traitement différentes ont également été testées chez certains groupes d’animaux.
Les résultats indiquent que l’HCQ n’a pas protégé pas les animaux lorsqu’elle était utilisée en prévention de l’infection. Aucune des stratégies n’a par ailleurs démontré d’effet significatif sur les quantités de virus SARS-CoV-2 circulant dans l’organisme par rapport à celles détectées chez des animaux traités par un placebo. L’étude montre donc que l’HCQ, qui possède des propriétés antivirales dans certains tests in vitro (à l’aide de cellules en culture), n’a pas d’efficacité antivirale in vivo chez le macaque dans les conditions spécifiques de ces travaux, et ce malgré une exposition pulmonaire importante.
Cette étude préclinique est complémentaire des études cliniques sur l’HCQ. En effet, elle a permis de mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques du virus SARS-CoV-2 et d’obtenir des informations précises sur la biodistribution de la molécule HCQ dans l’organisme d’un animal modèle.
[1] Preprint
[2] REACTing est un consortium multidisciplinaire réunissant les partenaires de l’Alliance pour les sciences de la vie et de la santé Aviesan (CEA, CNRS, INRAE, Inria, Inserm, Institut Pasteur, IRD, CPU et Conférence des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires) et coordonné par l’Inserm.
https://www.pasteur.fr/fr/espace-presse/documents-presse/etude-preclinique-montre-que-hydroxychloroquine-n-pas-effet-antiviral-contre-sars-cov-2-vivo