Par Gora Diop, diplômé de l’IEDES de la SORBONNE.
En date du 29 juin 2019, les dirigeants de la CEDEAO ont décidé de mettre sur pied l’ECO dans le cadre d’une monnaie unique qu’ils souhaitent créer et lancer dès juillet 2020. Ainsi, l’ECO sera une monnaie unique des quinze pays de la CEDEAO, Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest des années 1960, volonté politique des décideurs étatiques qui doit aller de pair avec un travail de fourmis d’experts économiques de tout horizon, une sérieuse problématique car l’ECO n’est pas seulement l’affaire de le la sous-région mais également de la France qui paye nos angoisses quand on sait que toutes nos transactions financières que nous faisons à l’extérieur transitent par le trésor français garant de nos réserves, lesquelles suscitent une polémique depuis des décennies.
L’Afrique dispose déjà de zones économiques où les échanges sont facilités comme l’UEMOA-qui a remplacé l’UMOA en 1994, année de la dévaluation du franc CFA, conclave dirigée par ministre français représentant du président français alors que tous les pays de la zone étaient emmenés par leurs chefs d’Etat, ou de la zone monétaire (CFA) comme monnaie unique. Initiée d’abord en décembre par les pays membres de la ZMOA-Ghana, Nigeria, Guinée, Gambie et Sierra Leone- ses promoteurs aimeraient qu’elles regroupent à terme l’ensemble des pays de la (CEDEAO). Chercher à parler de l’énigme de la création de l’Eco nous renvoie à chercher à évaluer la performance du système bancaire sénégalais, voire de la sous-région, prétexte pour analyser son rôle et son action dans les économies en développement comme la nôtre afin de pouvoir élaborer quelques suggestions. IL est toujours important de rappeler que l’idée de performance si elle ne cache pas l’idée de vulnérabilité renvoie quand bien même à elle. Le rôle du système bancaire dans l’UEMOA est d’autant plus complexe que son action s’inscrit dans une double logique. En premier lieu, il est à souligner que les entreprises n’ont pas encore accès direct à l’épargne des ménages.
En second lieu, l’inexistence de marché financier véritablement opérationnel ou l’emprunt pourrait se faire à des couts moindres confère au secteur bancaire le rôle de premier plan dans la bonne marche de l’activité économique. Contrairement aux économies développées ou la recherche effrénée d’un système bancaire solide et efficace se justifie entre autres par la hantise d’une crise financière avec tout son cortège de couts économiques et sociaux, donc par la préservation des acquis, dans nos économies en développement, le défi s’incarne dans une perspective d’insertion et d’intégration dans le système mondial ou des réseaux et des groupes prédominent.
Donc le défi est double : s’adapter à la nouvelle donne qui règne dans le système mondial en acquérant les nouveaux instruments des marchés financiers qu’il faudra financer avec des capitaux propres et offrir en même des produits de qualité à une clientèle interne et externe. Vu aussi bien sous l’angle des économies modernes que celui des économies en développement, le dénominateur commun en termes d’importance d’un système bancaire solide et stable est son rôle prépondérant en termes de croissance économique en ce sens qu’il permet une affectation optimale des ressources et une transmission des impulsions monétaires.
GENESE
La politique monétaire est une composante de la politique économique et en tant que telle elle doit apporter sa contribution à la réalisation des objectifs de la politique économique. Ces derniers sont la croissance économique, la lutte contre l’inflation pour préserver la valeur interne de la monnaie qui est l’inverse du niveau général des prix et sa valeur externe qui est son taux de change, le plein emploi objectif illusoire dans les économies modernes et l’équilibre des paiements extérieurs.
Le champ d’application des objectifs de la politique monétaire a été considérablement réduit dans la plupart des économies modernes à niveau de développement économique comparable.
En tant que composante de la politique économique sous ses aspects multiples, la politique monétaire devait assurer ou favoriser la croissance à un niveau le plus élevé possible, donc le maintien du plein emploi et assurer également la stabilité de la valeur de la monnaie ainsi que les comptes extérieurs. Certains théoriciens s’accordent à dire que le rôle essentiel des Banques Centrales ou bien l’objectif de la politique monétaire devrait se résumer à la réalisation de la stabilité des prix.
Déjà, au cours des années 80, les pays membres du G7 d’alors (groupe comportant les sept pays les plus industrialisés, à savoir les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et le Canada) attribuèrent à la politique monétaire le seul objectif de stabilité des prix.
Il est à rappeler que le foisonnement de systèmes de change sur le plan international fera de telle sorte que le système monétaire international d’aujourd’hui est dit non-système monétaire international.
En réalité, il n’est pas rare de constater que le cours d’une monnaie chute à une valeur faible en une journée et remonte à une valeur forte en une semaine. Ce caractère erratique et volatile des cours peut poser des problèmes de trésorerie à court terme et de financement à long terme pour des divers agents économiques.
La volatilité des cours de change a pour origine l’effondrement du système des parités fixes de Brettons Woods. Il importe de rappeler que les institutions de Brettons Woods de noms FMI et Banque Mondiale ont été créées respectivement pour l’équilibre de la balance des paiements et la reconstruction de l’Europe. De nos jours, la Banque Mondiale s’attelle à la lutte contre la pauvreté. En fait, ce système de change issu de Bretton Woods assurait la stabilité dans les mécanismes monétaires et la décision prise par les autorités de ne plus assurer la convertibilité du dollar en or mettait fin à la vie du système. Depuis cette date, les systèmes monétaires se juxtaposent. Certains pays maintiennent un système de change fixe par connexion de leur monnaie à une monnaie pilote (zone franc). D’autres pays essaient de maintenir entre eux une zone de relative stabilité des changes (système monétaire européen) et enfin plusieurs pays ont laissé délibérément leur monnaie flotter.
En effet, l’étalon or est le premier système monétaire international organisé et il est également le premier système monétaire des changes fixes. C’est le système monétaire du 19e et du 20e siècle dans lequel l’or joue un rôle prépondérant. Il avait l’avantage des mécanismes automatiques de l’étalon or que J RUEFF[1] dit qu’il aura fonctionné de 1447 à 1922.
Ce premier système avait quatre caractéristiques. D’abord chaque monnaie définie par un poids d’or fixe, chaque monnaie était convertible en or, ensuite les monnaies entaient convertibles entre elles-mêmes et enfin la frappe de la monnaie était libre.
Ce système a connu un essor vertigineux et les libéraux du 19e siècle en ont tiré deux vertus : d’abord, du fait que les monnaies étaient connectées à l’or par un poids d’or fixe, le système assurait en permanence la stabilité des changes, ensuite la deuxième vertu résidait dans le fait que ce système assurait en permanence le rééquilibrage automatiquement des balances de paiement.
Il aura fonctionné jusqu’en 1914, date de l’éclatement de la première guerre mondiale et va se retrouver confronté à des problèmes de taille.
En réalité, dès l’éclatement de la guerre les belligérants ont voulu chacun de leur côté mettre sur pied des mécanismes pouvant leur assurer la victoire. A ce titre ils vont décider de suspendre la connexion de leur monnaie au métal précieux et ce processus mettait fin en même temps à la vie du système d’étalon or.
Dans la période d’entre-guerres les pays ont géré d’une manière autonome leurs monnaies nationales, chaque Etat prenait alors des mesures de politique monétaire internationale et ce fut le début des dévaluations successives.
Dans la période d’entre-deux guerres les conséquences néfastes issues de cette gestion individuelle des taux de change ont poussé les principaux pays de la planète à essayer de remettre sur un pied un système monétaire international cohérent, hiérarchisé à l’intérieur duquel règnerait une stabilité des changes. Ce fut alors la Conférence de Bretton Woods de 1944 et l’émergence du système de l’étalon de change-or.
En effet la conférence de Bretton Woods avait deux objectifs majeurs : permettre la mise sur pied des organisations économiques internationales que sont le FMI et la Banque Mondiale et créer en même temps un système monétaire international véhiculant les vertus que celui de l’étalon-or.
Contrairement à ce dernier à l’intérieur duquel toutes les monnaies étaient convertibles en or, seules quelques monnaies appelées monnaies de réserves (dollar américain et livre sterling anglaise) étaient convertibles en or et les autres monnaies en dollar ou en livre sterling.
Le système de change or a connu trois évènements importants : la pénurie du dollar d’abord, ensuite le déferlement du dollar et l’effondrement du système des parités fixes.
En effet, à la fin de la 2e guerre mondiale les nations européennes étaient totalement détruites et en plus elles étaient dépendantes de la nation américaine en ce qui concerne les produits de première nécessité et stratégiques. Mais étant donné que l’Europe était détruite par la guerre, elle n’avait pas les moyens de paiement pour régler ses factures aux américains.
C’est dans cette optique que les autorités américaines pour aider le continent européen mirent sur pied un plan d’aide dit plan Marshall chargé de canaliser le dollar américain vers le vieux continent. Cependant, une fois que les dollars arrivaient en Europe, les européens les réutilisent immédiatement pour payer leurs importations. C’est en cela qu’il y avait une pénurie de dollars en Europe. Autrement dit la balance des paiements américaine était structurellement excédentaire.
Le déferlement des dollars au Japon et en Europe sera dû au fait que ces pays et continent reconstruits vont commencer à concurrencer les américains mais sur les marchés mondiaux non seulement mais également ils n’importaient plus des Etats Unis. Ils vont inverser la tendance en y exportant.
La balance des paiements américains commença à être déficitaire. Au total on peut dire que l’utilisation abusive du seigneuriage international par les américains a fait de telle sorte qu’à la fin des années 60 les déficits de leur balance des paiements atteignaient des niveaux importants.
Les déficits de la balance des paiements américains durant et s’accumulant, il va en naitre une perte de confiance des non-résidents à l’égard de la monnaie américaine. La conséquence qui va en découler est que ces non-résidents en 1971 vont s’adresser à la Reserve Fédérale pour demander la conversion de leurs billets verts en de l’or. Il faut comprendre par leur attitude qu’ils avaient très tôt compris que l’or est une monnaie refuge et l’on bat monnaie qu’à partir de l’or et des devises.
Eu égard à la masse de dollar en circulation en Europe, la Reserve Fédérale était néanmoins dans l’impossibilité de satisfaire cette demande. Pour mettre fin à ces problèmes, le président NIXON prend le 15 août 1971 la décision de non convertibilité du dollar en de l’or et ce fut la mort de ce système. On passa ainsi à l’émergence d’un non système monétaire international.
C’est partir de ce moment que le flottement des monnaies a vu le jour et on est passe d’un flottement généralisé dit encore pur à un flottement contrôle dit encore flottement impur, le flottement généralisé signifiant que les monnaies fluctuent les unes par rapport aux autres.
Il convient de souligner qu’un tel système de flottement pur s’accompagne d’inconvénients de taille. Pour les limiter certaines nations vont s’organiser à l’intérieur de ce régime. C’est ce qui est à reste à l’origine de l’émergence du flottement impur.
Deux raisons expliquent ce flottement contrôlé. D’abord il a aura des pays qui ont décidé unilatéralement de rattacher leur monnaie à une monnaie pilote (exemple franc CFA et ex franc français), ensuite il y aura des zones de pays qui décidèrent entre eux des parités de relative stabilité des changes (exemple le système monétaire européen).
Ce foisonnement de systèmes de change sur le plan international fera de telle sorte que le système monétaire international d’aujourd’hui est dit non système monétaire international.
Ce dernier véhicule également des inconvénients. C’est la raison pour laquelle les principaux pays de la planète ont essayé de réorganiser le système monétaire international sous la forme d’un système multipolaire, ou encore multidevises ou encore polycentrique.
L’expression multipolarisation du système monétaire international voudra dire tout simplement que le système ne s’organise plus aujourd’hui autour d’une monnaie principale à savoir le dollar américain.
En fait à côté de ce dernier nous avons actuellement la présence d’autres monnaies principales qui concurrencent fortement la monnaie américaine dans ses fonctions internationales. Il s’agit de l’Euro et du Yen japonais principalement. Ces trois monnaies se partagent le seigneuriage sur le plan international. Avec le partage du seigneuriage, le principe qui en résultera est la multiplication du droit de seigneuriage. Cela voudra dire que le droit qu’avaient seuls les américains de battre monnaie ne sera plus un monopole exclusif. Ils devront maintenant le partager avec l’Europe et le Japon. Et dans ce domaine qui dit partage, dit conflit, un facteur qui est à la base de l’instabilité du système monétaire international. L’on rappelle par ailleurs que le président NIXON dans son allocution télévisée du 15 aout disait que, l’on cite, ‘la stabilité et l’équité sont dans le meilleur intérêt de tout le monde’.
PORTEE ET LIMITES
En décidant de se départir du franc CFA longtemps arrimé au FF puis à l’euro, les autorités publiques sont entrées dans l’histoire. Mais la volonté publique ne suffit pas pour appréhender cette nouvelle donne que l’on peut qualifier avec des pincettes « d’african new deal ». Pourquoi une telle appellation ? Parce qu’en interrogeant l’histoire, il est aisé de se rendre compte qu’avant dévaluation le défunt FF équivalait à 50 francs CFA. Dès la dévaluation de 1994, en termes d’équivalence un FF égale 100 francs CFA. Avec l’avènement de l’EURO, une monnaie qui concurrence rudement le dollar américain et remet par la même en cause l’hégémonie américaine, la parité a été plus que quintuplée. Est-ce une dévaluation nouvelle ? La plume de certains experts arguent non car selon eux la parité a été maintenue fixe. Que dire de toutes les transactions financières qui transitent par le trésor français si l’on prend l’exemple d’un pays comme le Sénégal.
Maintenant si un franc CFA équivaut à un ECO et que les africains ont main mise sur leurs réserves comme voulu par une frange de la population intéressée par le débat, l’objectif de souveraineté internationale en termes de monnaie serait obtenu.
A une échelle basse, il convient de souligner que la politique de réserves obligatoires a pour objectif de contraindre les établissements de crédits à détenir, sous forme de monnaie centrale une fraction des éléments inscrits à l’actif et/ou au passif de leur bilan. En effet, le dispositif des réserves permet, par son maniement, de réduire ou de développer la capacité de distribution de crédit du système bancaire.
Cependant les pays membres cités en début de lignes partageant l’ECO ne doivent pas négliger l’aspect budgétaire car la politique monétaire et la politique budgétaire sont liées. Le pacte qu’ils ont signé pour la création d’une nouvelle monnaie unique l’ECO doit les pousser à coordonner leur politique monétaire qui doit les propulser sur le sentier de croissance économique, l’objectif recherché étant la convergence économique pour ne pas dire l’état stationnaire. Les règles du jeu doivent être claires et bien définies.
Ainsi, si l’on raisonne dans le cadre de l’Union Européenne par exemple, en 2002 quand l’Allemagne n’a pas pu respecter le Pacte de stabilité étant donné son déficit budgétaire d’alors, un avertissement lui fut adressé par la commission européenne. Cela peut se comprendre dans une certaine mesure car si ce premier partenaire de la France connaitrait une récession, comment ce dernier vendrait-il. Cette situation serait moins alarmante si cela fut le cas du Portugal moins interdépendante avec la France.
On peut bien adapter l’expression fort célèbre de Robinson selon laquelle ‘’ quand les USA s’enrhument, le reste du monde attrape une pneumonie’’ au contexte de partenariat entre la France et l’Allemagne qui est elle aussi dépendante des USA.
En amont de la création de l’ECO, il serait intéressant de passer en revue quelques régimes de change en vigueur dans les espaces économiques. Aussi peut-on citer le taux de change fixe, régime qui va être vraisemblablement applique dans la zone, les régimes intermédiaires et enfin les flottements purs et impurs. Le choix d’un régime de change résulte donc à la fois des objectifs économiques du pays et des contraintes qu’il doit supporter.
A Taux de change fixe
- L’union monétaire : elle est la forme la plus stricte. Les taux de change des différents participants sont fixes de manière irrévocable, les monnaies locales pouvant être remplacées par une monnaie commune.
- Les currency board ; ce sont des caisses d’émission ou conseils monétaires où la création monétaire va dépendre des réserves de change dans la monnaie de rattachement, et la politique monétaire n’a aucune autonomie. Ces types de régime ont la particularité d’autoriser une double circulation monétaire. Exemple peso et dollar en argentine.
- Les régimes de changes fixes plus traditionnels : ils définissent une parité fixe, qui peut toutefois être modifiée de manière exceptionnelle pour restaurer l’équilibre du solde courant. Des bandes de fluctuation peuvent être définies. Ces bandes de fluctuations peuvent être étroites (régime de Bretton Woods) ou bien plus larges (SME après 1993).
B Régimes intermédiaires
On peut dans ce cas-ci distinguer :
- La parité glissante ; le taux de change est en principe fixe, mais la parité de référence est modifiée régulièrement selon les paramètres prédéterminés (crawling peg au sens propre) ou de manière plus discrétionnaire afin de compenser partiellement au moins les écarts d’inflation avec le pays d’ancrage.
La parité glissante a une autre variante, le sliding band où le taux de change nominal dont la parité peut être ajustée périodiquement, fluctue à l’intérieur d’une bande.
- Le flottement administre : les taux de change sont flottants, mais les interventions ponctuelles et/ou coordonnées des banques centrales informent les marches sur la parité considérée comme souhaitable. Il s’agit par conséquent d’un flottement impur.
C Flottements pur et impur
Seul le marché va définir l’équilibre du taux de changent sans intervention de la Banque Centrale dans le cas de flottement pur. Dans le cas de flottement impur, la Banque Centrale peut intervenir pour limiter les variations excessives, mais elle ne cherche pas à conserver une parité donnée. Les variations effectives et anticipées de la demande et l’offre de biens et d’actifs sont reflétés sur le marché des changes.
En effet, tous ces régimes présentés ont des avantages et des inconvénients. Les principaux avantages d’un régime de changes flottants sont, d’une part, que les réservés de devises internationales ne sont pas requises en grandes quantités. D’autre part, les variations du taux de change nominal permettent d’ajuster l’économie après choc (domestique ou étranger) et éventuellement limiter la récession ; si par exemple le pays en question exporte des matières premières (dont les cours sont fixes sur les marchés mondiaux), l’ajustement du taux de change permettra de stabiliser le revenu de ces exportations exprimé en monnaie nationale.
Cependant, la volatilité élevée qui résulte des variations du taux de change nominal (et réel) est souvent préjudiciable : si le pays est endetté en monnaie forte, le dollar par exemple, la dette externe sera assujettie à des fluctuations importantes en termes de monnaie nationale, ce qui expliquera des hausses de spreads de taux d’intérêt traduisant l’augmentation du risque de défaut du pays. Cette hausse des taux pénalisera l’économie.
En ce qui concerne la parité glissante, avec le régime de crawling band, le taux de change nominal qui fluctue à l’intérieur d’une bande dont la parité centrale varie à un taux prédéterminé, peut être calculé à partir de différentiels passés d’inflation. Mais dans ce cas il risque d’introduire dans l’économie une inertie inflationniste considérable. II peut au contraire être base sur des anticipations d’inflation. Là, le danger est alors de produire une surévaluation donnant lieu à des pressions spéculatives.
Dans le cas de sliding band, ce système permet aux économies à haute inflation de stabiliser le taux de change sans connaitre une appréciation du taux de change réel importante. Toutefois, la fréquence ainsi que l’importance des ajustements de la parité centrale n’étant pas connu à l’avance, l’incertitude qui en résulte entraine une forte volatilité des taux d’intérêt.
Avec le régime de crawling. peg, il est possible de réduire l’inflation, tout en évitant une surévaluation trop importante du taux de change réel. Cependant, le problème de crédibilité du gouvernement se pose : surtout s’il mène une politique fiscale incohérente avec ses objectifs.
Dans les régimes de changes fixes, le gouvernement peut bénéficier d’une très forte crédibilité. Cependant, l’économie perd beaucoup en flexibilité : les chocs externes doivent être absorbée par l’économie réelle, qu’il s’agit du chômage ou de la récession
En effet, le système de changes flexibles peut conduire à des politiques qui peuvent s’exercer aux dépens d’autres pays. La France et les membres de l’ECO se doivent de coopérer même si les théoriciens de la FRANCE-AFRIQUE ont tari l’encre de leurs plumes d’autant plus que dans ce contexte de 21eme siècle on parle d’ère post-industrielle. Les changes fixes sont la porte ouverte aux spéculations. Le fait de ne pas coopérer peut se traduire par des résultats macroéconomiques qui peuvent nuire à l’ensemble des pays concernés.
Pour résoudre ces défauts de coordination, une possibilité est d’instaurer un régime de changes fixes qui permette d’éliminer la tentation de s’écarter de façon unilatérale de la solution coopérative. Il importe de rappeler que ce sont les gains anticipes d’une manipulation non coordonnée ou unilatérale du taux de change qui, par l’intermédiaire de l’instrument monétaire, vont rendre instable la coopération.
Le premier aspect se rapporte au problème de l’instabilité de la solution coopérative, le second aspect nous permettant d’aborder les crises de changes. Une première génération de modèles de crises de change était bâtie sur un antagonisme entre l’objectif de fixité de la parité de change et l’évolution de certaines variables expliquant le cours d’une devise. Ces modèles présentaient une première limite de ne présenter et résidaient particulièrement dans une approche déterministe. Ils présentaient les crises de change comme un run sur les réserves de change d’un pays, étant donnée la rationalité des agents prives.
En réalité, il existe une deuxième génération de modèles des crises de changes qui aura la particularité de présenter une explication de ces crises ne remettant pas en cause la rationalité des agents. IIs sont qualifiés de modèles ‘’avec clause de sortie’.
Le précurseur en est OBSFELD[1] et elle permet de rendre compte du rôle central des anticipations. II s’appuie par ailleurs sur le même type de jeu que ceux présentés dans les modèles précédents. C’est la raison pour laquelle, nous préférons nous limiter à l’exposé de substance et nous passer de présentation globale.
Par ailleurs, les agents économiques privés y ont un objectif d’anticiper l’inflation effective et les autorités monétaires vont chercher à minimiser leur objectif traditionnel mais en intégrant cette fois-ci le coût de sortie du système de change fixe. On suppose qu’il y a une incertitude sur la fonction d’offre agrégée. Le résultat de ce modèle est qu’une économie offrant de meilleurs fondamentaux, c’est-à-dire, un niveau d’inflation, élevé et un écart entre la production potentielle et la production d’équilibre faible sera moins d’attaques spéculatives.
Quant aux limites liées à la problématique de la création de l’ECO, il faut se projeter sur le modèle européen avec la création de l’EURO. De source sûre, si l’on prend l’exemple de la France, le FF a eu à cohabiter au moins deux ans avec l’EURO ; une fois un paradigme a vu le jour, la fameuse loi de GRESHAM selon laquelle « la mauvaise monnaie chasse la bonne » les agents rationnels prenant la précaution de l’épargner a montré ses limites. Cela est compréhensible car toute théorie porte en elle le germe de son propre dépassement, La transition étant passée en douce, aucune méfiance vis-à-vis de l’EURO ne s’est manifestée. Aurons-nous le schéma avec l’avènement de l’ECO dans notre zone ?
III RISQUES DE TROUBLES
Une mise en alerte est nécessaire et une conscientisation d’une frange de la population quant à un risque de dérives pouvant survenir après le lancement de l’ECO, allusion faite aux troubles sociaux des évènements de 1989 entre le Sénégal et la Mauritanie avec des morts dans les deux camps, des rapatriements réciproques de part et d’autre. Il n’est d’aucun doute qu’une information sans formation est une desinformation. Des étrangers vivent en grand nombre sur le sol sénégalais regardent avec une loupe de peur ce qui va se passer si la création de l’ECO est source de confusion car il y a des pauvres et analphabètes qui sont aussi des acteurs économiques
Au moment du lancement de l’ECO, il y a sûrement un rush pour s’approprier cette nouvelle devise, une aubaine pour certains là où d’autres vont nourrir un doute comme ce fut le cas lors des changements des signes monétaires. C’est là tout l’intérêt des mesures d’accompagnements pour maitriser toute tentative de dérapage pouvant occasionner des expropriations ou simplement vols ou destructions de biens d’autrui.
IV PROBLEMATIQUE LIEE A LA CONDUITE DE LA POLITIQUE MONETAIRE
L’objectif assigné à la Banque Centrale étant la maitrise de l’inflation, il importe de revenir sur les objectifs principaux de cette institution. En tant que composante de la politique économique sous ses aspects multiples, la politique monétaire devait assurer ou favoriser la croissance économique à bien des égards, c’est-à-dire le maintien du plein emploi et assurer également la stabilité de la valeur de la monnaie ainsi que les comptes extérieurs.
De nos jours beaucoup de théoriciens s’accordent de dire que le rôle essentiel des Banques Centrales ou bien l’objectif de la politique monétaire devrait se résumer à la réalisation de la stabilité des prix.
Le contexte stagflationniste consécutif au premier choc pétrolier et l’influence des arguments monétaristes feront que les Banques Centrales acceptent en effet l’idée selon laquelle l’objectif de plein emploi qui est largement dépendant d’une stratégie d’aisance monétaire était incompatible avec un objectif de stabilité des prix qui requiert une cure durable d’austérité.
Déjà, au cours des années 80, les pays membres du G 7 d’alors (groupe comportant les sept pays les plus industrialisés, à savoir les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et le Canada) attribuèrent à la politique monétaire le seul objectif de stabilité des prix.
Quand un gouvernement décide seul sa politique monétaire, à cette fin deux formes de politiques peuvent être conduites : une politique dite discrétionnaire ou bien une politique dite de règle.
Dans le premier cas de figure, chaque mesure qu’elle aura à prendre sera adaptée à la situation présente. Dans le second cas de figure, une autorité monétaire va décider d’une règle d’intervention invariante dans le temps et indépendante de sa volonté. Mais, cette dernière est connue par les autres agents économiques et ils vont donc choisir leurs actions en tenant compte de cette règle.
Par ailleurs, le problème de choix entre ces deux optiques peut être abordée sous forme de modèles, mais nous nous bornerons à son exposé car dans tous les modèles théoriques le choix de politique monétaire s’effectue dans le cadre du dilemme inflation-chômage notamment sur la base de la courbe de Philips avec anticipations rationnelles.
Aussi, Keynes dont les idées vont être par la suite reprises et défendues par les postkeynésiens, considérait une politique de type discrétionnaire avec comme argument sous-tendant une telle position que l’interventionnisme était le bienvenu pour conférer à l’Etat le pouvoir discrétionnaire de corriger et réguler l’activité économique qui est dépendante des turbulences conjoncturelles.
A l’opposé, les monétaristes, sous la bannière de Milton FRIEDMAN défendaient un comportement macroéconomique de l’Etat fonde sur la notion de règle[1] .
S’agissant de cette dernière, quand un gouvernement à la latitude pour s’y engager, il peut alors soutenir le taux d’inflation que l’on peut qualifier de « socialement optimal », un tel taux est déterminé par la relation de Philips.
Cependant, s’il n’est pas crédible auprès des autres agents économiques, ceux-ci ont déjà anticipé un taux diffèrent auquel il aura intérêt à s’adapter. De ce fait si l’on suppose que les contrats salariaux sont négociés en termes nominaux une période à l’avance et qu’au moment où ils sont signes les salaries négocient le salaire en tenant compte de leurs anticipations d’inflation pour le futur, le gouvernement va chercher à réduire le chômage sans relancer pour autant l’inflation.
Les agents économiques privés ont un objectif d’emploi différent de celui du gouvernement. En début de période, le gouvernement va annoncer un niveau d’inflation. A partir de cette annonce les agents forment leurs anticipations de prix et déterminent le niveau de leurs revendications salariales. L’équilibre économique va aussi dépendre de la politique annoncée.
Mais une fois que les salaires sont négociés, le gouvernement dont les objectifs peuvent être différent souvent de ceux des agents privés n’a plus intérêt à se conformer ou respecter ses engagements.
Ainsi, en réalisant une inflation supérieure à celle qui a été annoncée, le gouvernement permet une relance de l’activité économique et fait baisser par la même le taux de chômage.
Cependant, les agents vont revendiquer un niveau de salaire tel que le gouvernement ne sera pas incité à changer sa cible d’inflation, eu égard à l’anticipation de cette déviation du gouvernement sans effet sur le chômage. On s’écarte ainsi de l’objectif poursuivi par le gouvernement, d’où le caractère non soutenable de l’équilibre.
Alors que dans une optique de règle, il convient en matière monétaire de la conférer à la Banque Centrale qui ne doit plus en bouger, position défendue par les monétaristes, les politiques relevant de l’optique discrétionnaire sont celles soumises aux seules influences conjoncturelles.
Les critiques souvent adressées aux défenseurs des politiques discrétionnaires que sont les keynésiens s’articulent entre autres sur le fait que les dites politiques ont un biais inflationniste et une fois leurs échecs consommés par les agents économiques sur une période, le manque de confiance qui va en découler va aller de paire avec la disparition de la crédibilité du gouvernement ou de l’autorité monétaire qui a en tutelle la mise en œuvre de la politique.
Pour mettre en exergue le biais inflationniste, SVENSSON[2] suggère de faire comme choix une cible d’inflation permettant d’atteindre le taux de chômage dit socialement optimal. La Banque Centrale va donc minimiser l’écart de l’inflation objectif qu’elle doit confronter à une cible d’inflation.
Cet exercice de la Banque Centrale aura pour corollaire la crédibilité de cette institution qui va dépendre en fin de compte de l’arbitrage affiché entre la volonté de lissage des fluctuations conjoncturelles de l’activité économique, donc du niveau de chômage pour limiter le coût social.
En effet, la stabilité des prix produit un climat de confiance qui permet aux agents économiques, ménages et entreprises de fonder leurs actions, leurs plans d’épargne, de consommation et d’investissement en gardant l’idée qu’ils ne vont pas se fausser. D’aucuns qualifient même l’inflation d’impôt sur la valeur ajoutée.
Cependant, demeure entière la question de savoir dans quelles conditions les banques vont-elles réaliser la stabilité des prix à moyen terme. Autrement dit quel taux d’inflation vont-elles viser ?
Deux thèses vont s’affronter sur ce sujet. Pour la première, cette thèse soutient l’idée qu’il est difficile d’avoir une inflation positive sans qu’il n’y ait accélération de l’inflation.
La deuxième défendra l’idée que la Banque Centrale doit chercher à situer l’inflation à un niveau relativement bas. Dans la mesure où le marché s’attend à ce que les autorités ne la laissent pas franchir ce seuil, les anticipations inflationnistes auront tendance à s’aligner à ce niveau. La plupart des Banques Centrales suivent cette démarche.
[1] H. KEMPF « règle et discrétion) » Dans Analyse macroeconomique Tome 2 Sous la direction J-O HAIRAULT
I[2] L.SVENSSON « Optimal Inflation Targets » , conservative central bank and linear inflation contracts , mimeo , Institute for International Economic Studies, stocholm University
[1] M .OBSTFELD, ‘Destabilizing effects of exchange rate escape clauses’’
[1] J.RUEFF ‘ La reforme du système monétaire international ’Plon, Paris , 1973 , p14.