Ce sont finalement les agences de notation qui auront fait office de juges de paix dans le débat africain sur l’opportunité ou non d’annuler la dette. Pour n’y avoir pas souscrit, le Bénin vient de voir la reconduction de sa note B+ par l’agence Standard and Poor’s, la perspective restant stable.
Élogieuse sur les réformes en cours dans ce pays depuis l’arrivée de Patrice Talon au pouvoir en 2016, l’agence américaine fonde ses prévisions en 2020 sur une croissance de 6,3%.
Au final, quand on connaît la faible incidence de cette initiative G20, évaluée à moins de 100 milliards de FCFA individuellement sur la Côte d’Ivoire et le Sénégal, il y a lieu de se demander s’il n’était pas préférable pour ces pays de solliciter le marché financier, s’approvisionner en devises à taux bas et, partant, refinancer en partie les dettes contractées antérieurement et financer les programmes de riposte contre la pandémie . Au lieu de cette démarche théoriquement réalisable, les deux locomotives de l’UEMOA ont pris une décision qui a abouti à une mise sous surveillance de leurs notations investment grade synonymes d’emblée de réserves et de surcoûts de la part des investisseurs privés. Le pragmatisme du ministre béninois des Finances, Romuald Wadagni, fondé sur une fine connaissance des règles de fonctionnement du marché, a eu raison du classicisme de Lomé, qui a souscrit un programme tout en sachant que sa dette, estimée à 71% en 2020, est d’abord domestique, orientée vers le marché financier sous régional.
La décision du Club de Paris et du G20 à laquelle il faut annexer la Chine, grand créancier bilatéral de l’Afrique, qui hésite entre démarche commune et engagement en solo, est orpheline de la Banque Mondiale. Si cette institution appuie et soutient l’initiative, elle reste cependant en tant qu’institution notée (ce qui n’est pas le cas du FMI) sujette aux appréciations des agences de notation. Celles-ci l’auraient mise en garde contre toute annulation allant dans le sens de la détérioration de son profil, ce qui a restreint le champ des interventions de la BM aux fonds confessionnels IDA. D’autres institutions financières sous régionales qui voulaient décréter des appuis budgétaires ont reçu la même injonction concernant la nécessité de préserver leurs notes.
Au final l’échange intellectuel et technique des plus intenses entre le ministre de l’Economie et des Finances du Bénin, Romuald Wadagni et ses pairs de la sous région aura servi à rappeler un vieil adage : en payant ses dettes, l’on s’enrichit et l’on relève sa cote de crédit.