« Vous savez, j’aime souvent dire que la croissance économique ne se mange pas, elle ne nourrit pas les Guinéens, ce qui les intéresse, c’est l’amélioration de leurs conditions de vie de manière concrète. L’ANIES est née de cette volonté-là ! »
Entretien réalisé à Conakry par Mamadou Aliou Diallo
Ansoumane Camara est diplômé de de Sciences Po de l’Université Montesquieu de Bordeaux, de la London School of Economics and Political Science (LSE) et d’Harvard University (Kennedy School of Government). Il a précédemment travaillé pour le ministère français de l’économie et des finances (Bercy). Depuis août 2018, il est le Conseiller Spécial auprès du Premier ministre Guinéen, Ibrahima Kassory Fofana, en charge de l’Économie, des Finances et du Budget, Coordinateur général de l’ANIES et par ailleurs coordinateur de la mission d’appui à la mobilisation des ressources internes (MAMRI).
Avec un PIB qui a grimpé de 5 milliards en l’espace de 10 ans, passant de 6 milliards en 2010 à environ 11 milliards dollars en 2020, une croissance qui a frôlé les 10 % en 2016 et 2017 (Banque Mondiale), la Guinée est répertoriée par le FMI parmi les 5 pays africains qui résisteraient le mieux économiquement face à la crise liée à la pandémie du covid-19. Le FMI lui crédite même d’une projection de croissance post- covid de 7,6% en 2021. Cet état de grâce économique est lié aux énormes investissements dans son secteur minier, dynamique, en pleine expansion et qui est le principal levier de croissance du pays. Rendre la croissance plus inclusive en luttant contre les inégalités sociales à travers des mécanismes de redistribution de richesses. Telles sont les objectifs assignés à l’ANIES. C’est cette difficile et exaltante mission qu’Ansoumane Camara, conseillé Principal du Premier ministre Guinéen, a la lourde responsabilité de piloter. Dans cet entretien exclusif avec Financial Afrik, le coordinateur de l’ANIES nous parle des approches implémentées par la Guinée en matière de croissance inclusive.
Qu’est ce qui a concouru à la création de l’ANIES ?
L’ANIES est née d’une volonté politique. Le constat est assez simple, en Guinée comme dans la plupart des économies en Afrique, vous avez un dynamisme économique réel. Six (6) des dix économies les plus performantes au monde sont aujourd’hui africaines. La Guinée en particulier a enregistré un certain nombre de succès économiques sur la décennie récente. Le secteur minier a été relancé, l’attractivité s’est renforcée, l’agriculture bénéficie d’un soutien appuyé des pouvoirs publics. Les indicateurs macroéconomiques se sont stabilisés, mais la difficulté et ce n’est pas propre à la Gainée, c’est qu’en fait, il n’y a pas beaucoup de liens entre cette performance économique, qui est pourtant bien réelle et la réalité quotidienne des populations guinéennes. Vous savez, j’aime souvent dire que la croissance économique ne se mange pas, elle ne nourrit pas les Guinéens, ce qui les intéresse, c’est l’amélioration de leurs conditions de vie de manière concrète. L’ANIES est née de cette volonté-là. L’idée, c’est d’inscrire la problématique du partage de la prospérité au cœur de la politique économique. C’est de faire en sorte que les fruits de la croissance économique soient partagés à un maximum de Guinéens, c’est pour cela que l’ANIES a été créée.
Quels sont les mécanismes pensés par l’ANIES pour permettre aux Guinéens de pouvoir bénéficier de cette croissance ?
L’ANIES appréhende la problématique de la croissance inclusive de plusieurs manières. Nous mettons en œuvre des politiques classiques d’inclusion qu’on peut retrouver çà et là dans d’autres pays, notamment avec des transferts monétaires, des travaux à hautes intensités de mains d’œuvre (HIMO) mais aussi des actions spécifiques d’inclusion financière. C’est ce que nous appelons au sein de l’ANIES l’inclusion classique. Il y a aussi un autre volet qui concerne plutôt la dimension économique de l’ANIES qui est l’inclusion économique et sociale, ce que nous appelons l’inclusion productive et dans ce cadre, nous avons planifié des actions dans l’énergie pour encourager l’électrification rurale en particulier à travers des dispositifs « off Grid » directement auprès des populations ou des dispositifs « mini-grid » à l’échelle des communautés villageoises en particulier. Nous intervenons aussi dans l’agriculture.
L’idée, c’est que l’ANIES puisse apporter de petites subventions à une certaine catégorie parmi nos cibles, c’est-à-dire à des personnes déjà identifiées comme étant pauvres, mais qui vivent de l’agriculture, ce qui, économiquement a beaucoup de sens puisque 51 % des personnes pauvres dans le monde vivent de l’agriculture. Donc en fait, on ne peut pas adresser la question de la pauvreté sans aller sur le terrain de l’agriculture. Vous avez aussi la question de l’entreprenariat.
Il y a beaucoup de personnes qui ont des idées entrepreneuriales mais qui n’arrivent pas à les développer compte tenu de leur situation de pauvreté et de vulnérabilité. L’idée de l’ANIES, c’est d’accompagner les gens sur ces volets pour pouvoir faire en sorte qu’il y ait une croissance véritablement inclusive. En somme, Bâtir des politiques en fonction des cibles. Donc d’un côté, vous avez des politiques classiques qui s’adressent plutôt à une catégorie de personnes en situation d’extrême pauvreté et des politiques d’inclusion productive qui s’adressent à une catégorie de personnes en situation de pauvreté classique, c’est-à-dire des personnes qui, si elles sont aidées peuvent s’en sortir à moyen terme.
Concrètement qu’est-ce qui a été fait depuis là ?
je vous rappelle déjà pour commencer que l’ANIES a été créée le 31 janvier 2019. Depuis la mise en place de l’ANIES, on a fait un travail considérable, vous avez probablement écouté le Premier ministre qui a annoncé que les transferts monétaires vont démarrer, d’ici à quelques semaines. On était donc en train de mettre en place l’infrastructure de base : le recensement des personnes pauvres. Figurez-vous qu’il n’existe aucune base de données en Guinée qui identifie de façon précise les personnes en situation de pauvreté. En Guinée comme ailleurs en Afrique, on peut vous dire globalement en volume, combien de personnes pauvres nous avons, mais on ne sait pas exactement quelle est leur identité. L’ANIES a dû commencer par-là.
Au moment où je vous parle, nous avons recensé 1, 6 millions de Guinéens dans une base de données, ce qui fait à peu près 240 000 ménages. Nous allons exploiter ces données d’ici deux semaines pour réaliser des transferts monétaires. Nous projetons de recenser 4,5 millions de Guinéens à partir de septembre, c’est la crise sanitaire qui a un peu retardé la planification. Nous comptons toucher à terme 6 millions de personnes soit 40 % de la population, c’est l’objectif de l’ANIES qui cadre avec les recommandations de la banque mondiale en matière de politique de partage de la prospérité qui, en principe s’adresse aux 40 % les plus pauvres. Nous allons donc commencer les transferts monétaires au mois de juillet pour Conakry et pour neuf (9) autres préfectures les plus pauvres à travers la Guinée ; d’ici à la fin de cette année nous aurons fini de mettre en place les politiques d’inclusion productive, sachant qu’en fait, l’inclusion financière et les transferts monétaires vont ensemble.
En ce qui concerne les transferts monétaires, l’énergie et l’agriculture, nous avons déjà des partenaires de mise en œuvre. Par exemple pour l’entreprenariat, nous sommes en train de finaliser un partenariat avec la Délégation à l’Entreprenariat Rapide du Sénégal, qui est une structure rattachée à la Présidence du Sénégal. Nous avons eu des prises de contact, nous avons échangé sur les approches de collaboration et nous sommes en train de finaliser les discussions. Nous allons collaborer avec eux sur le volet entreprenariat de l’ANIES. En ce qui concerne l’agriculture et l’énergie, nous sommes aussi en train de discuter avec nos partenaires du Kenya, pour voir d’ici à la fin de cette année par exemple comment répliquer le dispositif « M-Poka », des kits solaires permettant de fournir de l’électricité. Monter une agence de cette envergure, recenser en moins de deux ans six (6) millions de Guinéens, procéder à l’identification de l’ensemble des cibles et les conserver dans des bases de données sécurisées, je peux vous garantir que c’est une performance dans un contexte aussi difficile que celui de la Guinée.
Vous avez bénéficié de 70 millions de dollars de la Banque Mondiale, dont 25 millions seront reversés pour la riposte au covid-19, quelle est votre partition dans la riposte ?
le financement Banque Mondiale à l’ANIES est spécifique. Il est de 70 millions de dollars en don, dont 25 millions de dollars vont être utilisés pour lutter contre la crise sanitaire actuelle.
Le plan de l’ANIES dans la riposte au covid-19 est réparti en 3 phases. Une première phase qui s’est achevée a porté sur la désinfection de la plupart des lieux et marchés publics, notamment 22marchés et ports de pêche ont été désinfectés à Conakry. Nous avons aussi procédé au cours de cette première phase à la sensibilisation. Cent vingt-six (126) Pairs-éducateurs (PE) ont ainsi été mobilisés pour vulgariser les informations essentielles relatives à la Covid-19. Dix (10) préfectures ont été touchées Mandiana, Beyla, Lola, Siguiri, Dinguiraye, Guéckédou, Forecariah, Kindia, Gaoual et Koundara (102 sous-préfectures et 1920 districts) ainsi que la zone spéciale de Conakry, soit 130 900 ménages et 850 000 personnes.
Dans la deuxième phase que nous allons lancer maintenant, elle sera couplée avec la troisième. II va y avoir des distributions de vivres et kits sanitaires de lavage de mains ; essentiellement à Conakry à 26 000 ménages ; l’ANIES va utiliser 90 % de l’apport national en termes de financement, auquel on va ajouter les 25 millions de dollars de la banque mondiale de cette année pour réaliser essentiellement des transferts monétaires à 240 mille ménages à raison de 25 dollars par mois et par ménage, de juillet à décembre avec pour objectif de toucher 1,6 million de personnes cibles. Cet argent-là va être utilisé pour soulager la population parce que vous savez qu’avec la crise sanitaire, les populations cibles de l’ANIES étaient déjà vulnérables, la crise sanitaire actuelle les a rendu juste un peu plus vulnérables. Nous allons poursuivre la sensibilisation à Conakry qui est le foyer de la pandémie. Il est prévu en fonction de l’évolution de la situation de réaliser la pulvérisation des lieux de culte avant leur réouverture ainsi que la construction de 30 forages pour un accès à l’eau potable en zone rurale.
Quelle évaluation faîtes-vous de l’impact de l’ANIES sur les différents aspects de son intervention ?
je pense qu’il faut mettre les choses en perspective et savoir d’où nous partons. L’ANIES s’adresse à des populations qui, je ne dirais pas qu’elles n’attendaient plus rien de l’État, mais disons que c’est des populations extrêmement pauvres. L’ANIES est venue les promettre quelque chose à laquelle ces populations ne s’attendaient absolument pas. Je peux vous garantir pour avoir été avec le Premier ministre et avec l’équipe en caravane dans les dix préfectures les plus pauvres de Guinée pour faire la sensibilisation pour l’identification des personnes, 250 mille francs Guinéens (25 $) par mois, par ménage, c’est très peu mais c’est déjà beaucoup pour des populations qui n’ont pas un (1) dollar par jour.
Je pense que ça peut faire une grande différence, mais encore une fois, il faut faire très attention, ça n’est pas vraiment de l’assistance, c’est-à-dire que, ce n’est pas juste de l’argent qui est envoyé aux populations, c’est de l’argent donné avec un certain nombre de conditions. Notamment sur l’éducation des enfants en particulier les jeunes filles, le respect des campagnes de vaccination. C’est pour cela que le modèle de l’ANIES, c’est d’avoir des relais locaux, des pairs-éducateurs qui sont des jeunes que nous avons recruté, on a 125 jeunes aujourd’hui et d’ici septembre, il y’en aura 300. Ils vont rendre visite à ces familles comme des assistants sociaux pour voir si l’argent que l’ANIES leur envoie à travers les opérateurs de téléphonie leur parvient ; mais aussi pour s’assurer que les conditions qui sont rattachées à cette aide sont respectées, notamment en termes de préservation de la santé des enfants.
Pensez-vous que les transferts monétaires soient l’approche la plus viable en matière de redistribution de richesses ?
vous savez, la grande erreur de beaucoup de politiques de lutte contre la pauvreté, c’est de ne pas faire vraiment de distinction entre les personnes pauvres et les personnes extrêmement pauvres. On a eu des discussions très serrées avec la banque mondiale pour leur faire admettre ce projet avec le volet des transferts monétaires. Je peux vous garantir que ce n’était pas gagné d’avance. Eux, ils avaient un petit projet en Guinée de 43 millions de dollars, près de 80 % de l’enveloppe est allé dans les travaux à haute intensité de mains d’œuvre (HIMO). Nous, nous avons considéré qu’on ne voulait pas faire cela, parce qu’en fait, il faut dissocier les pauvres des extrêmes pauvres. Pour vous démontrer cela, je peux vous donner un exemple très simple. Les universités Princeton et Berkeley ont fait une étude au Kenya avec l’ONG Give Directly, qui a une expertise internationale pour les transferts monétaires et qui est un partenaire de l’ANIES. Ils ont établi que chaque dollar donné aux personnes pauvres générait directement pour l’économie locale 2,7 dollars de richesse collective, c’est-à-dire un effet multiplicateur de quasiment trois. Contrairement à ce que beaucoup de gens peuvent penser, les pauvres ne sont pas des idiots.
Si vous leur donnez de l’argent, ils ne le mettent pas dans l’alcool et ne le gaspille pas dans autre chose. Ils en font une utilisation rationnelle. Encore une fois, vous avez à faire avec une catégorie sociale qui ne peut même pas s’insérer dans une logique d’autonomisation productive, parce qu’ils sont très pauvres. C’est pour cela que j’ai dit que l’ANIES n’est pas une structure d’assistance sociale, donc il est primordial de dissocier les personnes pauvres des personnes extrêmement pauvres qui vont bénéficier des transferts monétaires. Maintenant l’autre approche qui s’adresse aux personnes pauvres ayant plus ou moins une certaine capacité d’insertion, ce sont les politiques d’inclusion productive qui comportent des accompagnements en faveur de l’entreprenariat, dans l’agriculture, et dans des projets énergétiques.
En Guinée, vous avez à peu près 7 à 8 millions de personnes pauvres, dans ce lot un peu plus de 3 millions sont des extrêmes pauvres. Pour nous, il était primordial de leur donner un minimum pour vivre, les autonomiser un minimum avant de pouvoir les insérer dans une logique d’autonomisation productive. Tout ce que l’ANIES est en train de faire, il faut en saisir la cohérence, c’est pourquoi on a construit une direction des transferts sociaux et une direction de l’inclusion productive, c’est simplement pour accompagner les gens sur le chemin de l’autonomisation. Pour cela, nous avons recruté BRAC, c’est la plus grande organisation au monde pour les questions d’appuis au développement. Nous avons élaboré avec eux, la stratégie nationale d’inclusion économique et sociale qui justement repose sur une idée simple qui est de dire : les transferts monétaires, ce n’est pas pour tous les pauvres, mais elles sont destinés aux plus pauvres des plus pauvres. Tandis que les autres qui sont en situation de pauvreté mais qui ont une capacité intellectuelle et physique qu’on peut utiliser pour les autonomiser, cette catégorie-là sera aidée autrement. C’est-à-dire que, si vous êtes pauvres et que vous vivez par exemple de l’agriculture de subsistance, l’ANIES vous viendra en aide pour améliorer votre productivité agricole. Conceptuellement, nous pensons qu’il y a des gens qui sont beaucoup trop pauvres pour les mettre dans cette logique d’autonomisation tout de suite. Il faut d’abord leur donner de l’argent cash et ça c’est bon pour l’économie, cela a été prouvé.
Comment l’ANIES procède-t-elle en termes de corrélation pour bénéficier des retombées du secteur minier qui est le principal levier de croissance en Guinée ?
L’ANIES est une structure de redistribution des retombées de la croissance économique, elle n’a donc pas vocation à agir directement sur le contenu local par exemple. Cependant, vous avez tout à fait raison de soulever cette question. Pour la petite histoire, quand la primature a engagé des pourparlers pour la mise en place d’une structure comme l’ANIES, l’une des discussions que nous avions eu, la finalité c’était justement ce que vous êtes en train de relever. C’est-à-dire que vous avez de la richesse qui est créée en Guinée principalement grâce au secteur minier et théoriquement la Guinée s’est collectivement enrichie, vous avez un PIB qui a quasiment doublé par rapport à 2010. Aujourd’hui le PIB de la Guinée on est autour de 11 milliards, c’était autour de 6 milliards dans les années 2010, mais cette richesse n’a pas touché pratiquement les populations. Ce qu’on voulait faire à l’époque, c’était de faire en sorte qu’il y’ ait un lien direct entre le dynamisme du secteur minier et la réduction effective de la pauvreté en Guinée. C’était ça l’objectif initial de l’ANIES. La primature avait fait des travaux dans ce sens et on avait imaginé un dispositif qui s’appelait CASAM (contribution additionnelle de solidarité sur les activités minières).
Nous nous sommes rendu compte après que cela ne pouvait pas être mis en application tout de suite, parce que beaucoup de projets miniers étaient certes annoncés, mais faudrait-il encore les concrétiser. Il fallait donc éviter d’effrayer les investisseurs, se rassurer que les investissements promis puissent s’installer. Cela est effectif aujourd’hui. En 2016 et 2017 l’industrie minière a connu une croissance annuelle d’environ 50 %. Je suis absolument d’accord avec vous qu’il y a un nouvel équilibre qu’il faut trouver entre l’exploitation des richesses naturelles et la réduction de la pauvreté en Guinée.
: Justement en terme de financement comment l’ANIES parvient-elle à financer ses activités et quels sont les mécanismes mis en place pour capter cette manne financière ?
: jusque-là, l’ANIES a pu mobiliser comme je vous le disais depuis janvier de l’année dernière, c’est-à-dire en un an et demi quelque chose comme un peu plus de 200 millions de dollars. Dans cette manne, vous avez du financement national et vous avez une part apportée par les partenaires étrangers. Au compte du budget national, l’année dernière nous avons obtenu du budget de l’État l’équivalent de 9,5 millions de dollars soit 87 milliards de francs Guinéens ; au titre du budget de cette année, au compte de la loi des finances initiale, l’ANIES était doté de 130 milliards de francs guinéens, soit un peu plus de 14 millions de dollars ; donc pour la loi des finances rectificative, ce niveau de financement au titre du budget va être rehaussé, les crédits budgétaires de l’ANIES au compte de cette année seront situés à 160 milliards de francs guinéens soit un peu plus de 17 millions de dollars, ce qui est déjà pas mal.
En termes de financements internationaux, nous avons bénéficié comme vous le savez de 70 millions de dollars de la banque mondiale, je précise que c’est un don. Ce financement a été approuvé le 29 mai dernier par la banque mondiale. Nous avons aussi bénéficié de 55 millions de dollars de la BAD, et enfin 75 millions de dollars des Émirats Arabes Unis. La partie sociale de l’intervention de l’ANIES qui sont les transferts monétaires est couverte par le budget alloué par la banque mondiale ; la partie productive de l’intervention, c’est-à-dire l’agriculture, l’énergie et l’entreprenariat, est couverte par les fonds mobilisés auprès de la BAD ; le financement des émirats nous permet de réaliser des solutions en termes de digitalisation et c’est le lieu de préciser que l’ANIES a acquis un Data Center où nous allons stocker et manier les données de 6 millions de Guinéens, qui sont des données ultra sensibles.
Aucune structure en Guinée n’avait des données de ce niveau-là. Nous avons recruté IDMIA pour l’identification biométrique et la sécurisation des données et financements des personnes pauvres, afin de palier toute éventualité de fraudes ou de subtilisation. Tout cet argent-là sera utilisé pour faire en sorte que la croissance soit inclusive.
Pour vous donner une idée, en Afrique en moyenne les pays consacrent 1 % de leur PIB au financement national et étranger à ces politiques de redistribution de richesses de la croissance, tandis que la Guinée est en train de consacrer 2 % de son PIB pour la croissance inclusive, c’est du jamais vu. Donc cela, il faut le relever. Certes, c’est beaucoup mais c’est encore très peu si nous prenons en compte le fait que la Guinée a un potentiel minier considérable et que la vraie question, c’est de s’assurer que chaque Guinéen où qu’il réside quelle que soit son ethnie, sa religion ou les idées qu’il peut avoir, éprouve le sentiment d’appartenir à la communauté nationale et bénéficie de la croissance économique.
Pour parvenir à cela, je crois et c’est mon point de vue, qu’il faut une corrélation entre l’exploitation des ressources naturelles de notre pays et la réduction de la pauvreté, d’autres pays le font. Au chili, vous avez des fonds qui sont mis en place et qui sont très bien gérés. Notamment dans le cadre de la crise covid-19, le chili s’en sort bien parce qu’il a une épargne publique considérable qui a été constituée. Il faut envisager à un moment qu’il y ait un lien entre le développement du secteur minier et la réduction de la pauvreté en Guinée.
quelles sont vos perspectives à court terme ?
L’ANIES en tant que structure nouvellement créée a généré en si peu de temps beaucoup d’espoir auprès des populations qui ne s’attendaient pas à une telle réponse de la part de l’État. En tant que responsable de l’ANIES, nous avons un vrai devoir de responsabilité vis-à-vis des populations. Nous avons le devoir de ne pas les décevoir, nous devons faire en sorte que ce qui a été promis soit effectivement donné, jour et nuit nous nous employons à cela. D’ici à la fin de cette année, l’ensemble des six volets de l’ANIES seront effectivement mises en place. Les transferts monétaires seront effectifs dès la mi-juillet.
Il faut cependant reconnaitre qu’au vu des attentes, que les ressources déjà mobilisées sont certes énormes, mais ne seront pas suffisantes. Nous avons déjà mobilisé 200 millions de dollars, mais nous souhaiterions mobiliser d’avantages auprès de nos partenaires mais aussi sur le plan interne pour faire en sorte de toucher d’avantages de populations cibles.