Par ELHADJI ALY SOW, Banquier, Consultant International en Mobilisation de Ressources ancien Directeur des Fonds de Garantie et financements spéciaux du Groupe CBAO ATTIJARI BANK.
La propagation de la pandémie du coronavirus a entraîné des répercussions sanitaires, économiques et financières sans précédent à l’échelle du continent africain. L’impact potentiel du covid 19 varie significativement selon les secteurs d’activités économiques et selon les pays. C’est pourquoi, les pays africains ont mis en place des programmes de résilience économique et sociale avec comme piliers principaux : le renforcement du système de santé, la résilience sociale et la stabilité macroéconomique et financière.
De manière générale, ces programmes reposent sur une étude des impacts sanitaires et socio-économiques, réalisée selon une approche participative et inclusive. Ces études ont permis d’identifier la chaine de transmission des effets de la Covid-19 et de mettre en exergue ses impacts à moyen et long-termes aux fins d’orienter les ajustements nécessaires pour atténuer les impacts sanitaires et socio-économiques de la pandémie. Les effets d’entraînement dans le monde, mais en particulier en Afrique subsaharienne, sont difficiles à prévoir.
Selon la Banque mondiale, pour la première fois depuis 1998, les taux de pauvreté́ dans le monde vont s’accroître. D’ici la fin de l’année, 8% de la population mondiale, soit un demi-milliard de personnes, pourrait se retrouver dans le dénuement, en grande partie à cause de la vague de chômage provoquée par la pandémie du covid 19. L’Afrique subsaharienne enregistrera sa première récession économique en 25 ans, avec près de la moitié d’emplois perdus sur le continent. L’Asie du Sud connaîtra probablement sa pire performance économique mondiale depuis 40 ans. La survenance de cette pandémie met à rude épreuve les pays d’Afrique Subsaharienne qui se trouvent déjà̀ confrontés à plusieurs défis sur les plans sécuritaire, sanitaire et socio-économique. Les personnes qui semblent les plus vulnérables à la crise actuelle sont les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées, les femmes ; Jeunes). Toutefois, cette pandémie offre une opportunité unique pour montrer comment la mobilisation et l’utilisation intelligente des ressources à travers des partenariats de financement innovant.
Les opportunités de mobilisation de ressources
Des mobilisations de ressources ont été organisées de manière désordonnée et sans stratégies dans la plupart des pays avec comme corollaire des participations disproportionnées selon le secteur d’activités, selon la nature de dons, selon le type d’acteur privé, etc. Les États ont par la suite, accordé des faveurs d’ordre fiscal, financier et social dont les effets et les impacts restent à ce jour discutables.
La mobilisation des ressources n’est désormais plus considérée en termes purement transactionnels. Elle est perçue comme la recherche de rapports durables avec les partenaires. Cela exige des capacités institutionnelles effectives et des stratégies qui fondent un dialogue permanent entre partenaires. Une des principales conclusions d’un rapport du Système des Nations Unies est que ‘les organisations devraient mettre en place des structures et des mécanismes clairement identifiables consacrés principalement à la mobilisation des ressources aux fins de la mise en œuvre systématique de la stratégie/politique de mobilisation des ressources…’[1].
La mobilisation de ressources est un processus intégré comprenant la planification stratégique pour absorber les écarts de financement, l’identification des opportunités sur la base d’une analyse de l’environnement externe et des capacités internes, la négociation efficace avec les partenaires potentiels, l’exécution des engagements, une communication régulière et bien ciblée et enfin un travail en réseau avec tous les acteurs concernés.
Si l’Aide Publique au Développement (APD) reste importante, en particulier dans les pays les moins avancés, elle ne sera pas suffisante pour atteindre les ODD. S’appuyer sur toutes les sources de financement – publiques et privées, nationales et internationales – dans tous les pays sera essentiel.
Les options de mobilisation des ressources, sans être exclusives les unes des autres, se focaliseront le (i) Gouvernement, (ii) les partenaires bilatéraux et multilatéraux, (iii) le secteur privé, (iv) les Programmes régionaux de développement, (v) les financements innovants, (vi) les Fondations, société civile, genre et inclusion sociale, (vii) Autres (Diaspora, partenariat sud-sud, etc.).
De la nécessité d’identifier de nouvelles opportunités de mobilisation de ressources domestiques
Le paysage de la coopération mondiale au développement évolue rapidement. Premièrement, alors que les donateurs traditionnels montrent des signes de repli financier et que l’Aide Publique au Développement (APD) stagne, de nombreux pays qui n’étaient que récemment des bénéficiaires nets d’APD deviennent des fournisseurs nets d’APD. Ces acteurs émergents apportent de nouvelles perspectives, approches et ressources, agissant à la croisée de l’APD et de la coopération Sud-Sud. Si la Plateforme doit s’engager avec ses donateurs traditionnels, elle doit également développer de nouveaux partenariats pour mobiliser davantage de ressources.
Les bailleurs et institutions de financement ont des exigences et des critères de financement spécifiques. Comprendre les tendances mondiales en matière de financement ainsi que les politiques et pratiques individuelles des partenaires est essentiel pour la mobilisation des ressources. Le timing est un élément important à prendre en compte car tous les partenaires ne prennent pas leurs décisions de financement au même moment de l’année.
Les Pays non membres de l’OCDE, dont les économies dites émergentes telles que les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) participent aujourd’hui à la coopération au développement, en utilisant souvent un soutien budgétaire direct ou des modalités de contribution en nature. Les économies émergentes du Moyen-Orient, comme l’Arabie saoudite, les Émirats Arabes Unis et la Turquie, sont progressivement devenues des pourvoyeuses d’APD. Ce qui représente à la fois des opportunités et des défis pour les organisations multilatérales ;
Pour attirer le secteur privé national et mobiliser des ressources, les États africains devraient être capables de démontrer qu’ils sont en mesure de fournir des mécanismes innovants en services de haute qualité qui les fidélisent, qu’ils disposent de capacités avérées d’exécution et que leurs interventions sont mieux gérées et coordonnées et de ce fait contribuent à des impacts significatifs et renforcer le capital confiance.
La majorité des fondations privées qui pourraient potentiellement devenir des partenaires financiers de la Plateforme les fondations et les entreprises qui se concentrent sur la santé, la gouvernance démocratique, le relèvement rapide et la stabilisation. Les principales fondations sont : La fondation Bil & Melinda Gates, la fondation Rockefeller, la fondation La Fondation Ford, ainsi que les fondations confessionnelles.
La plupart des pays africains sont nantis en ressources naturelles et disposent d’un énorme potentiel agricole, minier, économique la crise sanitaire a entraîné l’arrêt brutal de larges pans des économies africaines avec un choc de l’offre et de la demande. Face à ces chocs, les entreprises nationales éprouvent des difficultés de résilience mais elles sont promptes à apporter leur soutien aux Etats mais il appartient à ces derniers d’organiser des systèmes innovants de collecte de fonds à travers un guichet unique « secteur privé » bien calibré.
Le secteur privé africain doit être le moteur d’une croissance soutenue et durable, c’est pourquoi, il est nécessaire de cartographier le secteur privé en fonction de leur taille, de leur nature, de leur secteur d’activités, de leur pouvoir de négociation partenariale, etc en vue de bâtir une stratégie de levée de fonds qui tient compte de l’habileté des entreprises à démontrer leur capacité de résilience plus que leur potentiel de rentabilité.
En cette période de rareté des ressources, il est impératif que les partenaires multilatéraux, bilatéraux et les agences des Nations Unies développent des stratégies pour mobiliser des ressources par des mécanismes innovants ci-après :
- le partenariat public privé (PPP)
- les investissements socialement responsable (ISR)
- les investissements à fort impact (IFI)
- le développement de partenariats avec la société civile, les fondations, la diaspora, les collectivités locales……
Mais aussi, à travers d’outils d’accélération de la transition digitale, de formation et de mise à niveau des parties prenantes, de matching fund, de promotion de bridge loan avec les fonds d’investissements et de garantie.
La communication est un outil essentiel pour la mobilisation des ressources. Il est recommandé qu’une stratégie formelle de plaidoyer et de communication soit développée pour faciliter la mobilisation des ressources. Il convient d’améliorer les systèmes de redditions de comptes par rapports aux partenaires qui doivent justifier les fonds alloués.