Les chiffres sur l’évolution de la pandémie Covid-19 en Afrique sont éloquents et ne répondent pas aux études théoriques de l’Imperial College de Londres, un organe qui, avec l’aide de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), a préconisé le confinement, appliqué en mars-avril sur la moitié de la population de cette vieille planète, au mépris des lois sur l’adaptation naturelle, des vitesses de propagation différentes et des particularités de la vie humaine. L’Afrique qui se trouvait épargnée, partiellement s’entend, par le virus s’est appliqué le remède des grands corps malades (Italie, France) pour finalement se causer les mêmes désastres économiques et sociaux sans forcément vaincre la pandémie.
Au 19 août, le continent dénombrait 1 147 369 cas positifs, 26 618 décès et 870 568 guérisons, rapporte le Centre africain de contrôle des maladies, CDC, basé à Addis Abeba (Ethiopie). Le pays le plus touché par la pandémie est l’Afrique du Sud avec 596 000 cas, soit à peu près 50% des cas dénombrés sur le continent.
Derrière le pays de Mandela, l’on retrouve l’Egypte avec 96 900 cas, le Nigeria (50 500 cas), le Maroc (46 300 cas), le Ghana (43 100 cas), l’Algérie (40 300 cas), le Cameroun (18 400 cas), la Côte d’Ivoire (17 200 cas) et le Sénégal (12 400 cas). Tous ces pays ont confiné leurs populations en mars, quand l’on dénombrait moins d’une dizaine de cas en général pour un coût moyen estimé à 65 milliards de dollars par mois selon la Commission Economique pour l’Afrique (CEA), organe des Nations Unies basé à Addis Abeba.
L’Afrique semble avoir suivi l’Europe et particulièrement la France qui ont confiné leurs populations début mars. Cette dernière a détruit 100.000 emplois par mois en moyenne sur la première moitié de l’année 2020, un rythme jamais vu dans son histoire. Mais les situations du vieux continent et celle de l’Afrique étaient diamétralement différentes ou à tout le moins déphasées dans le temps. L’Afrique a-t-elle été obligée d’appliquer le confinement à l’européenne pour rentrer dans les conditionnalités des prêts et aide de la Banque Mondiale (IDA) ?
Les indicateurs le montrent, l’épidémie n’a commencé véritablement en Afrique qu’à partir de mai, pour passer à une phase exponentielle en juillet-août, période où les dirigeants, rappelés aux réalités de l’économie et d’éventuelles bombes sociales, ont décrété le déconfinement. L’Afrique du Sud vient par exemple d’alléger les restrictions (tout en gardant les frontières fermées, une autre épidémie afro-africaine) , encourageant le retour au travail alors que l’on y a dénombré 3 916 infections nouvelles et 159 décès dans les dernières 24 heures.
Au vu des statistiques du CDC, l’on peut le dire, le confinement a été décrété trop vite en Afrique par suivisme et sans courbe théorique. Pourtant, les décideurs nationaux pensent que le confinement a permis d’acheter le temps, permettant aux pays de préparer leurs plateaux sanitaires, d’organiser leurs équipes et d’importer du matériel nécessaire à la lutte contre le Covid -19. Mais à quel prix, pourrait-on leur opposer ?
Au Sénégal, le professeur Moussa Seydi, en charge de la riposte contre le coronavirus a, dans une récente sortie sur TFM, estimé que le confinement a permis à son pays de gagner du temps, passant de 12 lits de réanimation à plus d’une soixantaine de lits équipés de respirateurs aujourd’hui et à un parc de 2 000 lits. « Nous avons maintenant les moyens de faire face à la situation », a-t-il déclaré.
Concernant le confinent, une étude chinoise publiée dans les Annals of Internal Medicine montre que la plupart des cas de transmission secondaire du COVID 19 étudiés ont eu lieu à domicile. C’est donc à la maison que le risque de contamination semble le plus élevé, et non dans les transports en commun, ou dans d’autres lieux publics. L’étude chinoise apporte de l’eau au moulin des sceptiques du confinement comme le professeur Jean-François Toussaint, professeur de physiologie, médecin à Hôtel-Dieu et Directeur de l’IRMES (France) qui depuis le mois d’avril, préconisait de sortir du confinement «aveugle» pour un confinement «personnalisé» qui permettrait de faire repartir le pays avec le minimum de risques.
Bref, à l’heure où le débat sur le reconfinement bat son plein en prévision de la seconde vague, d’aucuns privilégient en lieu et place le confinement du virus par le masque, l’application rigoureuse de la distanciation sociale, y compris en milieu d’entreprise.