L’Association des utilisateurs des TIC (ASUTIC) du Sénégal, une organisation à but non lucratif basée à Dakar et qui travaille à protéger les droits numériques, soutenir l’économie numérique et promouvoir l’écologie numérique, a, à travers une déclaration datée du 23 août 2020, dénoncé le colonialisme numérique de Facebook en Afrique avec la mise en service de Facebook Flex.
En Afrique, avec une population de plus de 1,300 milliard, il n’y a que 212 millions qui utilisent le réseau social. C’est, selon l’ASUTIC, une opportunité commerciale que Facebook ne peut ignorer, et compte bien en profiter. « Aussi, Facebook en partenariat avec les opérateurs de téléphonie mobile du continent africain, a mis en service Facebook Flex qui est une version gratuite de Facebook sans photos, vidéos ou liens externes », souligne Ndiaga Gueye le président de l’ASUTIC.
Selon lui, ce que Facebook a décidé, est de permettre aux entreprises de téléphonie mobile utilisant les ressources rares de nos gouvernements de n’offrir que Facebook sans aucune autre option sur l’internet ouvert, porteur d’opportunités de développement pour l’Afrique.
« Facebook construit, ainsi, un un enclos numérique dans lequel les personnes pauvres d’Afrique ne pourront accéder qu’à un ensemble limité de services inadaptés à leurs besoins », avance le président de l’ASUTIC pour qui il s’agit d’un service intrinsèquement discriminatoire qu’on peut qualifier d’apartheid numérique de Facebook dans le continent africain.
Selon l’ASUTIC, contrairement à tous ceux qui ont la liberté sur internet, étant en mesure d’accéder à un internet ouvert ou tous les contenus, applications et services sont traités de manière égale, sans aucune discrimination, Facebook offre à nous, pauvres africains, une «prison numérique».
Aux yeux de M. Gueye, c’est cet internet que Facebook met à la disposition des pauvres d’Afrique qui peuvent se permettre un téléphone portable mais pas une connexion Internet.
L’ASUTIC qualifie ce partenariat de dangereux en ce sens qu’il « viole la neutralité du Net, l’égalité des chances, met en danger la liberté d’expression, la vie privée des utilisateurs et crée de nouvelles opportunités de censure répressive de l’État, mais surtout permet à Facebook d’espionner les données des clients des opérateurs de téléphonie mobile, car tout le trafic passe par ses serveurs ».
Pire encore, ajoute l’ASUTIC, Facebook a principalement conçu ce service pour obtenir les données personnelles des pauvres de l’Afrique. Aussi, afin d’atteindre son objectif de contrôle et de domination numérique sur les populations démunies de l’Afrique, Facebook prétend que son objectif est plutôt de les aider
« Si Facebook veut vraiment aider l’Afrique à sortir de la pauvreté, les préalables à l’accès à internet sont l’accès à une éducation de qualité, aux soins de santé, à l’eau potable et à l’électricité », plaide M. Gueye. Selon lui, même si l’accès ferait partie des priorités africaines, ce n’est certainement pas «l’enclos numérique» de Facebook mais plutôt l’internet ouvert. D’après l’ASUTIC, Facebook est aphone sur ces défis prioritaires pour l’Afrique.
L’organisation consumériste reste convaincue que Facebook gratuit n’est qu’un élément important de la stratégie commerciale de l’une des plus grandes sociétés internet du monde, plutôt qu’un acte de charité altruiste. Un business inique basé sur des intérêts commerciaux égoïstes.
A l’endroit des gouvernements africains, l’ASUTIC leur demande de s’assurer que sur leurs bandes de fréquences que chaque opérateur de téléphonie mobile en Afrique offre à chaque citoyen l’internet ouvert et non pas seulement un petit coin choisi par Facebook.
« Mettez fin à cette illégalité de Facebook Flex en Afrique surtout dans les pays comme le Sénégal où la neutralité du net est protégée par l’article 25 du Code des communications électroniques », demande encore l’ASUTIC aux gouvernements africains.
Il leur demande en outre de prendre l’exemple sur l’Union Européenne, l’Inde, le Japon, le Chili, le Brésil ou le Canada où Facebook gratuit a été déclaré illégal.