Candidat à la prochaine présidentielle au Niger, le Dr Hamidou Mamadou Abdou, président du Rassemblement national africain (RANAA), appelle à la rupture et, au delà de son pays, à une nouvelle Afrique. Après 30 ans au Québec, à la tête d’une grosse entreprise d’ingénierie employant plus de 850 personnes, le candidat compte mettre l’expérience acquise au Canada au service de son pays.
Qu’est-ce qui explique votre candidature aux prochaines élections présidentielles au Niger?
Je me suis engagé en politique pour apporter mon capital d’expérience et d’expertise au service du Niger, mon pays qui m’a tout donné. C’est pour moi l’occasion de lui retourner l’ascenseur. Avec le Rassemblement national africain (RANAA), j’apporte une nouvelle offre politique avec d’autres compagnons du parti mus par la seule ambition de servir comme moi le Niger et participer au bien-être de ses populations. J’ai la conviction que mon entrée en politique contribuera notamment au renouvellement de la classe politique, restée quasiment inchangée depuis la conférence nationale
Est-ce que votre profil de nigérien vivant au Canada doublé au fait que c’est la première fois que votre parti se présente à un tel scrutin ne constituent pas des handicaps?
Le fait d’être un Nigérien vivant au Canada et prenant part à la compétition électorale pour la première fois ne constitue nullement un handicap. Je résidais au Canada jusqu’à mon entrée récente en politique et ma réinstallation au Niger. En réalité, même vivant au Canada, je n’ai jamais été coupé des réalités de mon pays. Outre mes voyages permanents sur place, j’ai toujours entretenu une communication quotidienne avec mon pays. Par exemple, j’ai toujours entretenu de très fortes relations sociales avec ma communauté vivant au Niger.
Je compte donc mobiliser l’expérience acquise au Canada au service de mon pays. L’exposition à la double culture francophone et anglo-saxonne et l’expérience de la diversité culturelle canadienne sont de véritables atouts que je compte capitaliser. Donner une chance à tous peu importe leurs origines et conditions sociales, créer de la richesse et assurer un partage équitable à toute la population est une valeur ancrée dans mon quotidien.
C’est au moins 30 années d’expérience dans le développement et la construction des infrastructures au Canada et ailleurs que je compte mettre à la disposition du Niger. Je participe certes pour la première fois à une compétition électorale, mais la politique nigérienne n’a jamais été loin de moi, avec une bonne connaissance de ses acteurs, ses réalités, ses mœurs. Le fait de participer pour la première fois à une compétition électorale me donne une virginité qui sera plus un atout qu’un handicap.Je m’engage politiquement à un tournant important de l’histoire de notre pays avec une vision et un programme politique qui répondent aux attentes des populations nigériennes face aux défis d’existence dans ce « gros village planétaire ».
Quel regard portez-vous sur le bilan du président Mahamadou Issoufou ? Que retiendrez-vous de lui?
Comme tout bilan d’une gouvernance, surtout longue de bientôt dix années, celui du président Issoufou Mahamadou présente des forces et des faiblesses. Sous sa présidence, le Niger a fait son entrée dans l’ère de la production pétrolière avec le démarrage effectif des activités de la SORAZ.
Sous son leadership, le Niger a obtenu un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de Nations unies ; de nombreux cadres nigériens ont été élus à la tête d’institutions régionales, panafricaines et internationales (UEMOA, CILSS, CIRTEF, CONFEJES…). Je reconnais son leadership dans la création et la ratification de la ZLECA, une œuvre à la maturité de laquelle les générations futures africaines lui seront reconnaissantes avec son homologue Paul Kagamé.
Sur le plan des faiblesses du bilan du président Issoufou Mahamadou, pendant ses 9 dernières années, notre pays est resté essentiellement à la dernière marche au classement IDH (notamment 189e sur 189 en 2019). Il vient d’être classé dernier en matière de pauvreté des populations au niveau de l’UEMOA ; l’école nigérienne traverse actuellement ses pires difficultés ; notre pays rencontre des défis inédits en matière de sécurité ; sur le plan de la gouvernance, de très fortes insuffisances ont été observées dans la gestion des fonds alloués à la sécurité nationale et dans des projets d’infrastructures.
Au-delà du bilan du président Issoufou Mahamadou, mon parti entend, à travers son programme politique, relever les défis qui se posent à la nation nigérienne. Pour cela, RANAA dispose d’un solide programme politique, d’une équipe cohérente et déterminée et d’une vision claire. RANAA travaillera à redonner confiance aux nigériens et agira sans relâche pour transformer positivement le quotidien de toutes les nigériennes et de tous les nigériens.
Le Niger est un pays pauvre avec d’immenses ressources en uranium et en pétrole. Quel sera votre programme pour la valorisation des ressources?
A RANAA, nous avons une vision claire de l’exploitation des ressources minières dont le pétrole et l’uranium. Notre ambition est de faire en sorte que ces ressources minières et naturelles participent au développement du Niger. Pour cela, nous allons assurer une transparence totale de l’exploitation de ses ressources à travers la publication des contrats négociés avec les partenaires, la publication des profits obtenus par le Niger au titre de ses ressources. Nous négocierons toujours les contrats miniers au mieux des intérêts de notre pays.
Les ressources seront exploitées en réinvestissant leurs retombées, avec des effets de levier, dans des secteurs créateurs de richesse comme l’éducation, l’agriculture, les infrastructures, la santé, les emplois, etc. Nous accorderons une attention particulière au développement local dans l’exploitation de ces ressources minières et naturelles, en veillant à ce qu’une partie des profits tirés soit reversée aux collectivités locales et décentralisées.
Au-delà des ressources minières, nous saurons compter sur le capital humain nigérien, la force de la jeunesse, et l’engagement des femmes. Nous investirons dans ce capital humain pour faire de la matière grise nigérienne une valeur sûre pour le développement du pays.
La situation sécuritaire du Niger est à la une de l’actualité. Quelle lecture en faites-vous?
Le Niger fait aujourd’hui face à une situation sécuritaire inédite avec une menace terroriste sur sa frontière sud-est commune avec le Nigeria où sévit le mouvement djihadiste Boko Haram ; sur sa frontière nord-ouest commune avec le Mali et le Burkina Faso avec des groupes djihadistes actifs dans le nord du Mali et au Burkina Faso ainsi que sur sa frontière nord commune avec la Libye. C’est dans ce contexte qu’il faut inscrire le lâche assassinat de 2 Nigériens et 6 humanitaires français perpétré le dimanche 09 août à Kouré, à près de 60 kilomètres de Niamey. Nous présentons nos sincères condoléances aux familles nigériennes et françaises éplorées par ce drame et attendons que les investigations en cours permettent d’identifier et punir les auteurs de cet acte. A RANAA, nous savons et louons le dévouement et l’engagement de nos vaillantes forces de défense et de sécurité qui ne ménagent aucun effort pour assurer jour et nuit la sécurité de l’ensemble des Nigériens partout sur le territoire national.
Notre ambition est de mobiliser, une fois que nous arriverons aux affaires, au profit de nos FDS tous les moyens humains et matériels nécessaires à l’accomplissement de leur mission. Nous nous engageons à veiller à ce que toutes les dépenses relevant du secteur de la sécurité et de la défense soient exécutées dans la transparence absolue. Pour nous, l’enjeu le plus important reste de continuer à faire du Niger, le havre de paix et de stabilité, le pays d’hospitalité et de fraternité qu’il n’a jamais cessé d’être.
Votre pays est en ligne de front dans la lutte contre le terrorisme. Quelle évaluation faites-vous du rôle du G5 Sahel?
La création du G5 Sahel en février 2014 est une très bonne démarche qui permet de construire une réponse collective au terrorisme qui est aujourd’hui un phénomène sous-régional, régional et international. Cette mutualisation des moyens a déjà permis la création de la force conjointe du G5 Sahel. L’organisation a également consacré le droit de poursuite automatique d’un pays membre à l’intérieur des frontières d’un autre sur près de 50 km.
Je trouve juste et appropriée l’option choisie par le G5 Sahel qui associe la réponse sécuritaire, au développement et à la gouvernance. Mais, il faut encore aller plus loin dans la recherche de la réponse collective en rapprochant le G5 Sahel des organisations sous-régionales telles que la CEDEAO, l’UEMOA. Ce rapprochement est d’autant plus nécessaire que la menace terroriste s’étend désormais aux pays non sahéliens de la région (Côte d’Ivoire, Ghana, Togo).
Le G5 Sahel doit également favoriser et encourager la formation et l’équipement des armées nationales afin qu’elles assument pleinement la sécurité de ses Etats membres. Enfin, le G5 Sahel doit mettre en place un mécanisme de financement pérenne de ses activités.
Que pensez-vous de la ZLECA?
Je me réjouis très fortement de la création de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA). Elle crée un vaste ensemble économique qui rend l’Afrique plus compétitive et plus présente dans les échanges internationaux. Elle va par ailleurs booster le commerce intra-africain qui présente à l’heure actuelle des statistiques très peu satisfaisantes (moins de 20%). Elle va aussi mettre fin à des aberrations qui font aujourd’hui que des pays comme le Nigeria et le Gabon importent la viande d’Argentine ou du Brésil alors qu’ils peuvent le faire à partir d’autres Etats africains d’élevage comme le Niger, le Soudan ou le Tchad.
Mais si l’Afrique veut tirer le meilleur profit de la ZLECA, il lui faudra aussi renforcer les infrastructures (routes, ports, aéroports), surtout celles qui connectent les pays du continent entre eux. À travers la ZLECA, nous devrons accorder une attention particulière au développement du digital, et créer encore plus des emplois pour les jeunes et favoriser l’autonomisation des femmes.RANAA est un parti libéral panafricaniste qui œuvre pour un développement économique du continent afin de peser dans la croissance mondiale. Il ne peut donc que se réjouir de la création de la ZLECA à laquelle il apporte son soutien total et adresse ses vœux de plein succès.
Un commentaire
Le nom du partie Rassemblement National Africain fait écho au Rassemblement National français, ex Front National , reconnu pour sa xénophobie et bien d’autres horreurs ! J’espère que c’est plutôt pure hasard , simple coïncidence !
Pour le reste , noter bien que le Niger n’est pas le Canada !!!