Par Olofumbi G.
Sur la place d’Abidjan, les banques ont du coffre avec l’équivalent de 18 milliards de dollars sous forme de dépôts. Les banques marocaines ont pris le pas sur les françaises. En effet, les trois institutions financières du royaume (Attijariwafa bank, BCP et Bank Of Africa) pèsent 26% des parts de marché contre 22% pour les deux enseignes françaises, Société Générale et BNP Paribas.
Derrière ce duel franco-marocain, arrive la constellation des 10 banques régionales subsahariennes comptant 32% des parts de marché agrégés. Les banques dites ivoiriennes, à savoir la BNI et la NSIA détiennent solidairement 15% des parts de marché. La question est de connaître la contribution du système bancaire à l’économie. Notons tout d’abord que si les banques exigent une transparence élevée à leurs clients demandant du crédit, elles sont en revanche peu enclines à montrer patte blanche. Seules neuf d’entre elles sont cotées à la Bourse régionale des valeurs mobilières d’Abidjan (BRVM), ce qui exprime une certaine réticence par rapport à la transparence et prive les ménages et acteurs économiques de la possibilité de fructifier leurs épargnes.
Surliquidité structuelle
Le désintérêt pour la Bourse s’expliquerait-il par le fait que les établissements de crédit ont d’autres sources de financement plus compétitives ? La place d’Abidjan présente en tout cas une surliquidité structurelle puisque les crédits sont financés à 70% par les dépôts, notamment l’épargne. D’où la guerre sur le pricing qui y a cours en ce moment et qui participe à la surconcentration des risques sur quelques acteurs, toujours les mêmes, assaillis par les offres et surenchères bancaires. Le risque systémique est immense.
Notons par ailleurs que 30% du bilan des banques dort dans les titres pour des raisons prudentielles (Bâle 2 et Bâle 3). En fait, les banques ivoiriennes ne sont pas motivées à emprunter puisqu’elles financent essentiellement des actifs à cycles courts dont les maturités s’alignent sur les passifs exigibles comme les dépôts et aussi les possibilités offertes par le guichet de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Les crédits aux PME, plus risqués par définition, ne connaissent pas toujours l’évolution attendue pour des raisons diverses liées parfois aux PME elles-mêmes mais aussi et surtout à une approche rigide du risque -crédit. Dans ce cadre, le peu d’engouement suscité par le guichet de refinancement des PME ouvert dans le cadre du Covid est illustratif du choix stratégique d’allocation des actifs des banques ivoiriennes sur la base des chiffres à fin juin 2020.
Report à nouveau
Dans l’exercice 2019, l’on relève un report à nouveau négatif de 35 milliards de FCFA, ce qui constitue une petite bombe à fragmentation appelant à expurger les pertes et à ajuster le niveau des fonds propres en conséquence. La raison de ce trou noir viendrait en partie des règles de Bâle où l’accent était mis plus sur les réserves que sur le report à nouveau. Au delà des dispositions règlementaires, des incidents majeurs ont aussi affecté les façades des banques. Ainsi, la faillite de Saf Cacao, aujourd’hui ressuscitée sous de nouvelles couleurs, a forcé les banques à provisionner. De plus, en dépit des efforts du régulateur central de l’UEMOA, la La Banque de l’habitat de Côte d’Ivoire (BHCI), la Banque Nationale d’Investissement (BNI) , Versus Bank, Cofipa et Afriland First Bank Côte d’Ivoire sont toujours fragiles.
Rappelons que Bâle II et III fixe à 12% le niveau des fonds propres dans les engagements d’une banque. Sur la place d’Abidjan, avec 47 milliards en dette subordonnée et 10 % si on pondère tout le bilan (contre une capitalisation de 15% en Microfinance), l’on peut dire que les structures bilantielles sont plus ou moins correctes. D’autant que le secteur offre un ROE de 21%, contre une moyenne de 15% en Europe et, surtout, plus de deux fois le rendement du marché action. La transformation des dépôts en crédit est de 78% contre plus de 100% en Afrique du Sud, et 100% pour la microfinance. Le portefeuille représente 57% des actifs alors qu’en Microfinance 80% des actifs sont du crédits. Beaucoup de déposants sont de la zone UEMOA/CEDEAO et beaucoup détiennent des titres et obligations de l’Etat, certains identifiés comme originaires de la zone EURO.