La cérémonie des 60 ans d’indépendance du Mali, ce mardi 22 septembre, a été plutôt sobre, surtout si on la compare à celles, grandioses, des cinquantenaires. Officiellement, on le justifie par le contexte intérieur mais également en raison de la pandémie de Covid-19. D’ailleurs, pratiquement tout le monde portait un masque sur la place d’arme du génie militaire.
Le contexte est particulier. Un mois après le coup d’État du 18 août qui a renversé l’ex-président IBK, et au lendemain de la désignation de l’Ex-ministre de la défense Bah N’Daw, officier à la retraite et ancien ministre de la Défense, au poste de président de la transition, la nation de Soundiata Keita n’arborait pas le sourire. Le Mali se cherche et cherche son opposant, Soumaila Cissé, retenu en otage depuis 6 mois. Amputé de son Nord, gangrené dans son centre, le pays réel se réduit comme peau de chagrin en un pays légal qui épouse les contours de Bamako et, par extension, du Mali fertile par opposition au Mali des Ifoghas. Entre le souvenir de l’indépendance et le rappel de l’accord d’Alger, les descendants du mythique et improbable Bubakari II, découvreur de l’Amérique avant Christophe Colomb, cherchent à négocier un chemin de la transition entre les dunes et les militaires.
Les civils et leurs boubous bariolés ont suivi le colonel Assimi Goïta, chef de la junte qui a renversé l’ex-président IBK, présidant ces courtes célébrations qui ont duré moins d’une heure renvoyant maliennes et maliens aux dures réalités d’un quotidien sous la hantise de l’embargo de la CEDEAO. Le vice-président a appelé le peuple Malien d’aller vers la paix et la réconciliation, mais aussi à «l’union sacrée». Le président de la junte a appelé aussi ses compatriotes à soutenir les forces armées étrangères présentes au Mali dans la cadre de la lutte contre le terrorisme : «Nous demandons à la population malienne de soutenir les forces armées de défense et de sécurité. Et c’est l’occasion aussi, pour moi, de demander à la population de soutenir nos partenaires, avec la force Barkhane, la Minusma, la force G5, la force Takouba.», a-t- il affirmé, nous renvoyant à nos vieilles certitudes, à savoir qu’au pays du grand Modibo Kita, « la somme des forces militaires est nulle ».
Sur place, nous avons relevé une absence quasi-totale du nouveau président de la transition. Cette absence est remarquée et compréhensible. Puisque l’investiture de celui-ci est prévue ce vendredi. «Voilà pourquoi Bah N’Daw n’était pas présent au défié militaire organisé à Bamako pour ce soixantenaire de l’indépendance», a témoigné, un membre du protocole coupant court aux rumeurs qui se propagent vite dans l’air sec du Sahel. Par contre «On a noté en revanche la présence, en tenue militaire, du général Amadou Sanogo, auteur du putsch qui avait renversé Amadou Toumani Touré en 2012. Détenu pendant plus de six ans pour l’assassinat présumé de soldats anti-putschistes, il était resté très discret depuis sa libération provisoire en janvier dernier. C’est clair au Mali, entre manifestations civiles, sermon des imams et intrigues militaires, l’on n’est pas encore sorti de l’auberge ou, c’est selon, de sous la tente.